Bah, la pluie, ça ne dure jamais longtemps en été…
C’est ce que je me disais quand je suis parti de chez moi mardi matin. Je m’attendais à faire une autre course dans la chaleur humide. Bien j’ai été plutôt servi côté humidité ! Il a plu tout le long du trajet m’amenant au pied du mont Royal et j’ai dû m’abriter sous un arbre pour faire mes réchauffements.
Pendant que je m’échauffe, je regarde distraitement l’endroit où aboutit le chemin Olmsted. Même à cette heure matinale, il y a habituellement une panoplie de coureurs qui arrivent et qui partent. Ce matin, je vois seulement une coureuse arriver. Ouin, je pense que je vais avoir la paix aujourd’hui…
Bon, avec les nuages et la pluie, premier problème technique: tout comme le satellite qui nous transmet les signaux pour la télé, celui ou ceux dont se sert mon GPS pour me donner des infos sur ma progression jouent à cache-cache. Je suis planté là, à la pluie, devant la statue de Georges-Étienne Cartier, à attendre que mon foutu GPS finisse par trouver ses signaux. Allô, il pleut ! Est-ce que je peux commencer à courir ?
Finalement, la technologie moderne me donne le OK et je pars. Je n’ai pas posé le pied dans le premier sentier que j’entends le tonnerre gronder. Et les nuages se mettent à passer du gris au noir, la pluie d’agréable à « vache qui pisse ». Dans le bois, j’ai peine à voir où je mets les pieds. J’ai beau commencer à connaitre le coin, on ne sait pas tout par coeur: roches, racines, etc. Mais ce sont des conditions auxquelles je dois m’habituer, au cas où… Et comme il fait chaud, la pluie ne dérange pas tant que ça.
Pendant l’ascension, je dois obligatoirement faire un bout sur le chemin Olmsted. Et là, je suis vraiment exposé au derrière de la vache. Et elle a toute un envie ! Il n’y a définitivement plus un seul centimètre carré de mon corps qui n’est pas déterempé! Arrivent enfin les « vrais » sentiers. Ouf, je suis un peu plus à l’abri, mais on dirait qu’il fait encore plus noir que tantôt… Pour les montées, ça ne va pas si mal, mais pour les descentes, je dois ralentir car je ne peux distinguer si le sol mouillé est en terre ou en roche. C’est que la roche, c’est un tantinet plus glissant et je n’ai vraiment pas envie de me péter la marboulette, moi !
Rendu au belvédère, je décide d’aller jeter un coup d’oeil à la ville, question de l’admirer à la pluie. Ouais, bon, pas grand chose à voir: on dirait que les nuages la couvrent. Je repars. Les sentiers commencent à être remplis de flaques d’eau. Au bout d’un certain temps, je ne me donne même plus la peine de les contourner: je passe dedans. Et je continue à avancer à la vitesse vertigineuse d’un escargot, redoublant, retriplant même de prudence dans les descentes. Sans compter mes souliers qui commencent à alourdir…
Et l’orage qui continue de tomber. Les éclairs suivis de coups de tonnerre: ok, il semble assez loin. Je me sens tout de même comme dans le film Apocalypse Now: j’entends la musique de Wagner pendant que les bombes pleuvent autour de moi. Au lieu de faire du surf comme dans le film, je cours dans le bois. Puis, une idée me traverse l’esprit: et si la foudre frappait un arbre juste à côté de moi ? Je lis déjà la première page du Journal de Montréal: « Un ingénieur d’Hydro-Québec tué par la foudre au mont Royal ! » Et j’imagine le journaliste expliquer bêtement à ses lecteurs que j’aurais dû connaitre les risques, avec ma formation, et patati et patata. Oui, je les connais les risques, mais j’ai le droit de m’amuser, non ?
Parce que oui, je m’amuse comme un petit fou. Même avec l’orage qui ne tempère pas ses ardeurs. Les sentiers les plus larges sont maintenant des torrents où j’ai de l’eau aux chevilles. J’essaie d’emprunter les plus petits sentiers, mais il sont gorgés d’eau. Et j’avance toujours aussi lentement. S’il fallait que ce soit comme ça au Vermont 50 ? Aille, 80 km comme ça ? Pas certain de trouver ça amusant aussi longtemps, moi !
Finalement, l’orage se calme et laisse place à « seulement » de la pluie moins forte. Je peux maintenant voir où je vais. Les sentiers se drainent assez rapidement et à défaut d’être secs, redeviennent presque praticables. Puis je me rends compte d’une chose: je n’ai pas glissé une seule fois. Malgré les roches, les racines, la boue. Je dois me rendre à l’évidence: les souliers de trail, c’était extrêmement important par de telles conditions. Essentiel, même.
À la fin, je peux redescendre à pleine vitesse et compléter les 18 km que j’avais prévus faire. Les jambes couvertes de boue, le t-shirt et les shorts transpercés, le sourire au visage. Les très nombreux absents (j’ai rencontré plus de chiens que d’êtres humains !) de la montagne ont vraiment manqué quelque chose !
Le plus ironique dans tout ça ? J’ai pris mon parapluie pour la petite marche de 15 minutes entre mon auto et le Saint Siège ! 🙂