Vermont 100: cap sur Camp 10 Bear… deux fois

Le début du parcours fait étrangement penser à celui du Marathon de Boston : ça descend sur une route. Et ça descend pas mal, à part ça !  Je passe à côté de Pat et lui glisse : « Il y a du monde en calv… ! ». Il me répond qu’on était mal placés dans le peloton. Je ne peux pas contester ça. Heureusement, on n’est pas dans un étroit sentier, mais plutôt sur une route assez large, ce qui nous permet de dépasser les coureurs plus lents assez facilement.

Comme c’est la coutume, le peloton finit par s’étirer. Dans le premier sentier, je continue à dépasser du monde. Je me retourne: Pat n’a pas suivi. Il a le don d’être sage au départ et garder un rythme constant tout au long de la course. Une vraie horloge. Je m’attends à ce qu’il finisse par me rejoindre.

Puis, devant, une femme. Je ne sais pas si on peut dire qu’elle est musclée ou tout simplement qu’elle est maigre, mais bon, je suis certain de la reconnaitre: il s’agit de Kathleen Cusick, la gagnante ici l’an passé et à Massanutten il y a deux mois. Après être partie plus lentement que moi là-bas, elle m’avait rejoint. On avait fait un bout à saute-moutons, puis elle m’avait définitivement botté le derrière autour du 26e mile. Je m’étais promis que si j’en avais la chance un jour, j’allais essayer de suivre une des meilleures femmes, question de voir comment elle gèrent leur course.

Je décide donc de demeurer avec elle. Par bouts, ce n’est pas facile, car je suis définitivement « en dedans ». Sur marathon, cette fille-là n’aurait aucune chance contre moi, mais bon, on n’est pas en marathon justement. Patience.

Ouais, évoluer avec une femme qui pète, qui rote et qui passe son temps à se vider le nez, mettons que ce n’est pas ce que j’appelle une expérience agréable. Et c’est plutôt déstabilisant. Disons que côté éructation, elle n’a rien à envier à mon chien ou à Barney des Simpson. Difficile de croire que cette machine à produire des bruits dégueux soit titulaire d’un doctorat en microbiologie. Et pourtant…

À Densmore Hill (mile 7.0), premier ravito qui est constitué d’une table et de cruches contenant de l’eau et du Tailwind (de quessé ?). Étant parti avec une bouteille à la main parce que je ne voulais pas solliciter encore plus mon kyste avec une veste et que le parcours le permettait, j’entreprends de refaire ma mixture de LG.

Pas évident. Après avoir empli la bouteille d’eau, je dois ouvrir le petit ziploc, puis verser la poudre de LG dans ladite bouteille. Hé bien, je n’avais pas prévu que la manipulation du ziploc soit si difficile… J’ai l’impression que ça prend une éternité avant qu’il finisse par finir d’ouvrir. Et pour le verser, j’aurais besoin de 3 mains. Bref, à partir de maintenant, je vais me contenter d’eau quand il n’y aura pas de bénévole pour m’aider.

Alors que le jour se lève tranquillement, ma découverte du Vermont 100 se poursuit. Et il est exactement comme c’était décrit sur le site web et dans les récits : ça monte, ça descend, ça monte, ça descend… Sur des chemins de terre la plupart du temps, dans des sentiers parfois. Je sais que plusieurs ultramarathoniens détestent, mais moi, j’adore.

Le jeu de saute-moutons entre les concurrents est bel et bien engagé. Il faut dire que le parcours s’y prête. Ainsi, certains (comme moi) préfèrent marcher les montées et aller plus vite sur le plat ou dans les descentes. Je trouve que ça me permet de varier l’effort que les jambes doivent fournir, sollicitant ainsi d’autres muscles. Par contre, certains coureurs (dont madame Cusick) gardent un rythme plus constant (entre deux rots), ce qui fait qu’ils vont plus vite en montée, mais sont plus lents le reste du temps. D’où le jeu de « je te dépasse, tu me dépasses, je te re-dépasse, tu me re-dépasses ».

Je garde toutefois l’œil sur madame Cusick, tâchant de la garder à une distance raisonnable à l’approche de Dunham Hill (mile 11.5). Mais il y a également d’autres femmes dans le portrait, ce qui complique ma stratégie. Dois-je me coller à Kathleen ou suivre les autres qui la dépassent ?

Je remarque que le rythme est assez rapide, malgré le fait que je sois toujours en mode « Woh les moteurs !». En effet, ma Garmin m’indique que je suis sous les deux heures après le passage au demi-marathon !  Je ne peux pas croire que ça va rester comme ça. Il est vrai que le temps demeure couvert et relativement frais (je dirais 18-19 degrés). Mais c’est très, très humide, ma camisole étant déjà détrempée. J’espère de tout cœur qu’on ne verra pas le soleil de la journée, car sinon, on va vivre un bel effet de serre…

Arrivée dans Taftsville, un petit village typique du Vermont. C’est tellement chouette, le Vermont… Je vous l’ai déjà dit ?  Ce village prend un grand total de deux minutes à traverser à la course, puis nous empruntons un joli pont couvert, pont qui semble faire la fierté du village. Au ravito (mile 15.4), le gentil bénévole à qui j’ai demandé de l’aide en arrache pour ouvrir mon petit ziploc. Ça me rassure un peu de le voir gosser comme ça, me disant que dans le fond, je ne suis pas si pire. Mais en même temps, va peut-être falloir que je revoie mon système…

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Le joli pont couvert de Taftsville

Mis à part ce petit village, je remarque une chose du parcours : il n’y a rien de remarquable, justement. Des routes de terre, des enchainements montées-descentes, des champs et des montagnes à perte de vue. Je ne peux vraiment pas dire que je déteste.

Sur le chemin menant à So. Pomfret (mile 17.6), je continue de me tenir à portée de Kathleen. Comme je la dépasse dans une descente, elle me lance un beau « Good morning ! ». Je lui réponds sur le même ton, sourire aux lèvres, m’attendant à un sourire de sa part. Sauf que son regard n’est pas dans ma direction, mais est plutôt dirigé vers le pré d’à côté où gambadent de superbes chevaux. Heu, c’était à moi qu’elle disait ça ou aux chevaux ?

Arrive bientôt Pretty House (mile 21.3), première station où les équipes de soutien ont accès. Mon père prend des photos et ma sœur m’accueille… avec des applaudissements et un merveilleux sourire.

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La « pretty house » en question. Vrai qu’elle est belle, non ?

Ouais, bon, c’est super gentil, mais j’ai une course à faire, moi là… « Du jus, du jus !!!» que je lâche, sur un ton un peu bête. Ma petite soeur se rend compte de ce qui se passe et me dit de lui laisser ma bouteille, elle va la remplir pendant que je vais me chercher à manger.

Le buffet offert est classique : patates bouillies, bananes, etc. Je pige un peu partout, puis reviens à mon équipe. Ma bouteille est dûment remplie de LG préparé d’avance. Ils me tiennent au courant de la progression des autres: Pierre est passé depuis une dizaine de minutes, Joan presque une demi-heure. Mon père m’avoue qu’il ne m’attendait pas si tôt. Le temps couvert et la température tolérable font que les miles passent plutôt bien. Espérons que ça continue comme ça.

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Première rencontre familiale de la journée

Au moment de quitter, je leur laisse ma frontale rendue inutile par le lever du soleil. Mais aussi, je regrette d’avoir été « direct » dans ma demande initiale. J’aurais pu être moins raide envers ma sœur qui a choisi de passer ses dernières journées de vacances à aider son frère à compléter un projet de fous. Enfin, je sais qu’elle ne m’en voudra pas. Dans 9 miles, quand je les reverrai, l’incident sera chose du passé. J’ai déjà hâte de les revoir, d’ailleurs.

En direction de U-Turn (mile 25.3), le parcours se durcit. Je continue de suivre Kathleen à distance, mais les enchainements de montées-descentes pas trop abruptes font qu’elle s’éloigne peu à peu.

Je m’encourage toutefois en constatant que je reprends du terrain sur un gars qui me semble pourtant rapide. Arrivé à sa hauteur, je reconnais… Simon ! Hé comment ça va ?  « J’ai des raideurs dans les jambes, c’est rough depuis un petit bout. Je pense que je vais prendre ça plus relaxe ». Ainsi, après avoir empli ma bouteille, je me retourne pour voir s’il me suit, mais il me dit de ne pas l’attendre. J’espère que ça se passera bien pour la suite des choses. Il ne semble pas très bien aller…

Dans le sentier qui suit, je rejoins ma cible, puis sur la route en descente menant à Stage Road (mile 30.3), je la distance. En fait, je crois que je la distance. La descente est longue, roulante, se fait super bien, ce qui fait que je me présente au ravito à vive allure. Mon père s’étonne encore, cette fois-ci de voir que j’ai franchi près de 50 kilomètres en moins de 5 heures. Ce n’est pas Massanutten, hein ?

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Je me présente à Stage Road. La « Dame en bleu » derrière, c’est Kathleen Cusick. J’ignorais qu’elle me suivait de si près…

À ce rythme, je vais faire sous les 16 heures !  Ça n’a tout simplement pas de sens, le parcours doit devenir plus difficile plus loin, sinon on va tous péter des scores ! Pendant que je réfléchis à voix haute, on nous annonce l’arrivée des premiers chevaux. De superbes bêtes, montées en style classique. N’empêche que ça fait bizarre. Après avoir partagé les sentiers avec les vélos de montagne au Vermont 50, c’est maintenant au tour des chevaux ici. Je suis certain que s’il existait une variante « hiver » de ces courses-là, on la ferait en compagnie de traineaux à chiens.

J’ai à peine pris une bouchée d’un sandwich dinde-fromage que je vois Kathleen repartir sous mes yeux. « Ha la tabar… ! ». Mon père part à rire et me dit de la laisser aller, qu’il n’y a rien qui presse. Tu ne comprends pas: je pensais bien avoir réussi à me donner un petit lousse avec elle, mais voilà qu’avec un ravito rapide, elle reprend tout le terrain qu’elle avait perdu sur moi. Pas moyen de prendre un petit break, dans cette foutue course-là !

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Hein, elle est déjà partie ?!?

Je pars donc à ses trousses, un peu découragé. Dans combien de temps vais-je me refaire botter le derrière ? Elle est vraiment forte.

Après un petit bout sur un chemin de terre, c’est la route 12 qui nous accueille. Elle est en asphalte et la circulation y est omniprésente. Pas l’endroit idéal pour courir, mettons. Je vois que Kathleen s’est arrêtée en haut d’une longue et douce montée pour… se refaire une beauté !

Hé oui, elle semble vouloir refaire sa coiffure, ce qui a l’air pour le moins complexe au profane du domaine que je suis. En fait, quand je passe à sa hauteur, elle est toute empêtrée dans ses cheveux qui, à première vue, semblent avoir la texture de la laine d’acier. Ho que ça a l’air compliqué mettre de l’ordre dans tout ça…

Il faut croire que ce n’était pas si pire, car nous arriverons ensemble au ravito bien nommé Route 12 (mile 33.3) et elle en repartira avant moi. Je ne la reverrai plus. Voilà, je viens de me faire botter le derrière. Encore.

Ok, le tiers de la course est passé, où en suis-je ?  Évidemment, je suis dans un bien meilleur état qu’au même endroit dans la course à Massanutten. Là-bas, je songeais déjà à abandonner, alors qu’aujourd’hui, il n’en est même pas question.

Ceci dit, sur le chemin menant à Camp 10 Bear, là où je reverrai mon équipe, un certain découragement commence à se faire sentir. Je parcours devient de plus en plus difficile, la température monte peu à peu. Je sais qu’il ne faut pas faire ça, mais je ne peux m’empêcher de songer à la distance qu’il me reste à franchir. J’ai ralenti, je le sais. Il y a des gens qui me dépassent, j’en rattrape peu. La définition du terme « montée » devient de plus en plus souple : je marche souvent.

Au passage de Lincoln Covered Bridge (mile 38.2), j’ai un petit regain, mais le moral a une tendance à la baisse. Peu après Lillians (mile 43.3), un gars me rejoint et décide de faire un bout avec moi… sans vraiment me consulter. On jase un peu. Il vient de la Floride. Ce qui veut dire que lui, l’humidité… Quand il me demande si j’ai un objectif, je lui réponds simplement : « Buckle ». Je n’ose pas dire tout haut que je vise sous les 20 heures. Il me répond que lui aussi, il veut le buckle (que chaque concurrent qui termine en moins de 24 heures recevra) car si on fait plus de 24 heures, on reçoit… un magnifique sous-verre.

Quoi, un sous-verre ?  Ha ben non, je ne me suis pas tapé ces années d’entrainement pour me retrouver avec un sous-verre !  Un paquet d’allumettes, tant qu’à faire ? Bah, au rythme auquel je suis parti, je pense que mes chances sont excellentes pour le buckle. Les 20 heures ?  Pas sûr, surtout si je continue à peiner.

« On devrait atteindre la mi-course en 8h30 » rajoute le gars. Hum, pas certain. J’espérais arriver à Camp 10 Bear (mile 47.0) en 8 heures, puis arriver à Pinky’s (mile 50.8) en 8h30, mais je sens que je dois rajuster mes objectifs à la baisse. 8h15 à Camp 10 Bear ?  Peut-être… si je finis par y arriver.

Puis, la route prend une tendance vers le bas. Ma Garmin me le confirme : Camp 10 Bear est proche. Je suis revigoré juste à l’idée de revoir mon Dream Team II. Leurs sourires, leur bonne humeur, ça va me faire du bien ! Quand j’y arrive, je découvre un méga-ravito. Des autos stationnées très serrées comme si on était au centre-ville, plusieurs gazebos de montés, de la bouffe en quantités industrielles. Wow !

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Premier passage à Camp 10 Bear

Première mission pour mon père : recoller la poignée de ma bouteille. Avec quoi ?  Ben mon rouleau de duct tape, bien évidemment !  On ne peut pas faire un ultra sans duct tape… « Pourquoi tu ne prends pas l’autre ? » demande ma sœur. Verdict : elle est trop petite… et je n’aime pas le bouchon qui fait du bruit. Je vais donc m’en servir seulement si j’en ai vraiment besoin, ce qui n’est pas le cas présentement.

Puis, c’est la pesée : 146.8 livres. Parfait !  Je me suis peut-être un peu déshydraté, mais vraiment pas grand-chose. J’ai bien sûr la permission de poursuivre.

À la bouffe, je reconnais la fille de Pierre (je ne sais plus si c’est Marion ou Alice, maudite mémoire…) et lui demande où est sa mère. Réponse : partie à l’hôpital avec sa nièce qui avait très mal à une oreille. Ho… C’est dont ben plate, ça…  J’espère que ce n’est rien de grave…

Avant de partir, coup d’œil autour : aucun indice de la présence de Dan Des Rosiers. Pourtant, ce n’est pas son genre d’être discret. Il est supposé être le capitaine du ravito, alors je m’attendais à l’entendre aboyer des ordres à gauche et à droite. Mais rien. Bizarre.

Ok, la boucle Camp 10 Bear maintenant. Boucle qui débute par une interminable montée. Des gars bien calés dans une auto me demandent si je veux quelque chose à manger. Non merci. Mais avez-vous de la bière ?

La blague est vielle comme le monde et pourtant, elle fait mouche. C’est ça Fred, continue avec le blagues au premier degré, c’est la meilleure façon pour que tu sois compris…

Après la montée, une longue descente, suivie d’une section relativement plate. Section que je trouve tout de même difficile car je dois tenir un rythme constant, n’ayant pas vraiment de raison de marcher.  Et mes jambes qui réclament un certain répit…

Ouais, je commence à avoir hâte d’être arrivé à la moitié, moi là. Selon mon GPS, c’est déjà fait, mais j’aimerais bien avoir une petite confirmation. Tiens, c’est peut-être la petite pancarte là, sur le bord du chemin. Je m’approche et y lis : « 50.5 miles, 49.5 miles to go ». Bon ben, j’ai passé la moitié, ça a l’air.

À Pinky’s (mile 50.8), le rose est à l’honneur (duh !) et le ravito n’est occupé que par des représentantes de la gente féminine, de tous les âges. Et fait étrange, tout le monde nous… remercie de courir. Hein, de quessé ?  Vous passez la journée à attendre des coureurs et c’est vous qui les remerciez ?  Heu…

Peu après Birminghams (mile 53.9), alors que je joue à saute-moutons avec quelques chevaux, je constate que mon soulier droit est en train de se délacer. Essaie de me pencher, impossible. Déjà qu’en temps normal, je suis souple comme une barre de fer, imaginez avec plus de 80 kilomètres dans les jambes… Bon ben, on va s’asseoir par terre. Niet, pas possible. Comment je pensais que je pourrais me relever, donc ? Je parviens à trouver une roche où je pourrai prendre la position assise pour la seule et unique fois de la course. À voir aller Pierre à Massanutten, je me demande si sa tactique n’est pas meilleure que la mienne.

Ce petit intermède me permet de me reposer un peu, mais ça ne change rien à un phénomène que j’ai remarqué depuis Camp 10 Bear : je n’avance plus. Pas que ça va mal, mais la fatigue se fait sentir. Et je commence à me demander si je ne suis pas allé en surcharge côté compétitions depuis un petit bout. Il s’agit tout de même de mon quatrième ultra en trois mois…

À Margaritaville (mile 58.5), que j’ai atteint après avoir eu l’impression de monter pendant des heures, ma sœur me le confirme : ils ont commencé à voir arriver des coureurs qu’ils n’avaient pas vus avant, preuve que je perds peu à peu du terrain.

Je leur explique que je vais bien, mais que j’ai ralenti, un peu comme à Bromont. Je leur demande donc d’être patients, mes passages risquent de s’espacer… « Pas de problème, prends tout ton temps, on est là pour ça. Voudrais-tu changer de t-shirt ? ». Pourquoi pas ?  J’avais prévu attendre le retour à Camp 10 Bear, mais à quoi bon ?  Je tends donc ma camisole complètement détrempée à ma sœur (ha, l’amour fraternel…)  et en enfile une toute propre. Ouais, pas trop déplaisant…

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Autre photo de famille à Margaritaville

C’est là que j’apprends que Pierre et Joan courent maintenant ensemble (on m’avait dit plus tôt que Joan n’était pas dans une bonne journée), environ une demi-heure devant moi. Hé bien, mon ami Pierre a décidé de faire un upgrade de partner, on dirait ! Avec Joan comme pacer personnel, il aura de bonnes chances de réussir un excellent temps.

Je repars, mais j’ai à peine franchi 300 ou 400 mètres que je me mords les doigts : j’ai oublié de réclamer mes Advil. Merde !

C’est que voyez-vous, un mal que je connais et reconnais très bien s’est installé dans ma cheville gauche. Il va et il vient, mais disons que depuis une heure ou deux, il se fait de plus en plus présent.  Ça sent les deux semaines de repos forcé après la course. Ajoutez à ça un genou gauche qui se plaint dans les descentes et on se retrouve avec un gars qui pense à soulager ses malaises artificiellement. À l’entrainement, je ne fais jamais ça, mais en course, ce n’est pas la même chose.

Le retour vers Camp 10 Bear se fait beaucoup mieux que l’aller, j’ai l’impression que la tendance est plus à la descente. Passent Puckerbrush (mile 61.6), puis Brown School House (mile 64.6) sans problème particulier. Prochain arrêt : le retour à Camp 10 Bear, au mile 69.4.

Léger embûche cependant. Le ciel, qui s’était passablement éclairci en début d’après-midi, me forçant parfois à prendre des petits détours pour courir à l’ombre, s’est ennuagé à nouveau. Et la menace n’est plus simplement une menace, ça va tomber. Reste à savoir quand.

Hé bien pour moi, ça se concrétise autour du 66e mile. J’entends le ciel se déchirer, je vois les éclairs tomber et finalement, le déluge qui s’abat. L’homme seul contre les éléments, le combat est inégal. Je me dis que courir sur un chemin de campagne durant un orage, ce n’est peut-être pas l’idée du siècle. Je devrais peut-être me trouver un abri…

Ben oui Chose, un abri… Tu veux trouver ça où ?  Il n’y a crissement rien autour. Il y a seulement des arbres, des champs et un chemin vallonné. Tu n’es tout de même pas pour aller te cacher sous un arbre !

Je poursuis donc, essayant de me rassurer en me disant que si la foudre tombe, ce sera certainement sur un arbre, pas sur moi. Puis, un orage étant ce qu’il est, tout s’arrête et le soleil reprend ses droits.

La boucle achève. Je croise des coureurs du 100 miles et me demande ce qu’ils peuvent bien foutre là… jusqu’à ce que je comprenne qu’ils commencent leur boucle, boucle qui m’a pris 4h40 à compléter. Je me sens envahi par une vague de découragement/sympathie. Ces gens-là commencent à peine leur boucle ? Ça va faire bientôt 13 heures que nous sommes partis et ils n’en sont pas encore rendus à la moitié ? Hou la la…

Après une longue montée, puis une toute aussi longue descente, Camp 10 Bear II est là. 50 kilomètres à faire.

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J’arrive à Camp 10 Bear pour la deuxième et dernière fois

Game on.

Vermont 100, l’avant-course

La journée débute tôt. 6h30, je suis assis sur le dur plancher devant l’entrée de la clinique sans rendez-vous, le premier en ligne en vue de l’ouverture à 7h30.

Après l’attente, une fois entré dans le cabinet, le médecin regarde la plaie: pas vraiment de changement. Heureusement pour moi, elle est de bonne humeur aujourd’hui, alors elle me fait un pansement triple épaisseur (pour qu’il tienne bon durant la course) sans rechigner. En échange, je promets de commencer les antibiotiques qu’elle me prescrit,  mais seulement à partir de lundi. « On se revoit mardi ou mercredi » qu’elle me lance. C’est un rendez-vous, docteur ! Ou presque…

Je suis de retour assez rapidement à la maison, puis on pacte le RAV4 en vue du petit voyage vers le Vermont. Barbara passant son tour pour cette fois, mon équipe de support sera composée de ma soeur Élise et de mon père pour mon troisième 100 miles.

C’est avec une certaine surprise que nous constatons le peu de monde qu’il y a à la frontière. Pourtant, avec les vacances de la construction qui commencent aujourd’hui… On nous avait prévenus de partir tôt, mais… rien.  Tant mieux !  C’est tout juste si le douanier pose une question et nous sommes passés.

Les routes du Vermont, c’est comment dire ? Reposant. Les montagnes qui se profilent à l’horizon, les grands espaces verts et surtout, pas une seule publicité sur le bord de l’autoroute qui viendrait gâcher ce spectacle. J’adore.

Petit arrêt pour une pause-pipi. De l’auto qui s’est stationnée à côté de nous sort un gars qui porte des bas de compression et un t-shirt du Oil Creek 100. Mon extraordinaire pouvoir de déduction me dit que lui et ses accompagnateurs s’en vont à la même place que nous. Et comme bien des hommes, nous engageons la conversation… aux urinoirs. Il se présente: c’est Vincent. Il en sera à son deuxième Vermont 100 (je tiens à souligner que nous avons gardé la première poignée de main pour plus tard dans la journée, question de demeurer temporairement des gens normaux en ce qui concerne les convenances hygiéniques).

Nous poursuivons notre route et après le diner, nous nous dirigeons vers Silver Hill Road, le lieu de départ/arrivée de la course et où est situé son quartier général durant la fin de semaine. Après quelques détours, nous arrivons sur place.

Ça fourmille déjà. Plusieurs campeurs sont installés depuis un bout, les chevaux sont là également. Car oui, parallèlement à la course à pied, il y a une randonnée à cheval qui se déroule. Se cogner le postérieur sur le dos d’un cheval sur une distance de 100 miles, il faut quand même le faire. Ok, vous allez me dire qu’il y en qui font ça à pied, je suppose…

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Le terrain de camping

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Le « camping » pour les quadrupèdes

Après avoir dûment enregistré le RAV4 comme « voiture officielle » pour le soutien (chaque coureur est autorisé à n’en avoir qu’une seule), nous nous dirigeons vers la tente où je ramasserai mon dossard, mon t-shirt (qui est noir, c’est quoi l’idée pour une course organisée en plein été ?) et subirai ensuite un petit examen médical.

J’avoue que celui-là me stresse un peu. Je n’ai pas l’intention de parler de mon kyste, mais s’ils le découvraient ? Me laisseraient-ils faire la course ?

Ok, d’abord la pesée. Hou là, on ne parle pas de « balances » bric-à-brac comme à Bromont, ici. Ces bidules sont électroniques et l’organisation a pris soin de les installer sur quelque chose de solide et stable. Quand j’embarque dessus, je vois apparaitre 148.0 livres. Ouais, ça a de l’allure.

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La pesée officielle. Ça ne se passe pas vraiment comme à la boxe, hein ?

Bon, pour la pression et « l’interrogatoire », maintenant. Les trois « infirmières » sont libres, je me présente à celle la plus près qui s’adonne par le plus pur des hasards à être la plus jolie. Ma sœur s’amusera plus tard à se payer ma tête à ce sujet car semble-t-il, il y a toujours des références à l’esthétique de la gente féminine dans mes billets. Ben voyons, où va-t-elle pêcher ça ?  😉

Ma pression: 148/70. C’est donc ben bizarre, cette affaire-là… 148, c’est haut, mais bon, je suis un peu nerveux et quand même en présence d’une plutôt jolie personne. Mais 70 ?  C’est bas, il me semble. Enfin, mon explication de l’énervement précédant la course semble passer.

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Pression à 148/70. De quessé ?

Suivent quelques questions à propos de mon passé médical. Dans mon anglais rouillé, je réussis à bafouiller quelques réponses qui me semblent approximatives, mais qui ont l’air d’être satisfaisantes. Je passe donc le test. Clear to go. Et pas un mot sur mon kyste. Parfait !

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Ce que je bredouille semble tout de même assez intéressant…

Il est 14h. Trop tard pour retourner s’installer à l’hôtel, mais trop tôt pour attendre le briefing de 16h. Que faire ?  Ben attendre, il n’y a foutrement rien à faire, ici…

Nous nous installons à une table sous la grande tente. Seb arrive peu de temps après, avec son équipe de support. Comme il dit qu’il va aller acheter les billets pour le souper du soir et le BBQ de dimanche, je lui offre ceux que j’ai pour le BBQ, lui expliquant que je devrai retourner à Montréal dimanche matin pour faire changer mon pansement, qu’on ne pourra pas être là, etc.

« As-tu ton stock ici ? » demande un de ses équipiers. « Je suis chirurgien, je pourrais te faire ça. »  Malheureusement, je n’ai rien pour changer le pansement, mais peut-être me serais-je trouvé quelqu’un pour régler ce foutu volcan une fois pour toutes ?  À suivre…

Seb semble très confiant. Il est souriant, blague sur tout et rien. Presque totalement remis de sa blessure, il vise sous les 15 heures demain, ce qui l’amènerait tout près du record du parcours. Ce serait bien qu’il réussisse. Vous imaginez, un Québécois qui gagnerait ici ?  Ce serait génial. Et si Joan est en forme…

La délégation québécoise se pointe tranquillement: Vincent arrive, Stéphane le suit de près. On aperçoit Joan, qui ne semble pas à son meilleur. Et pour cause: Mélanie n’est pas là, victime de la gastro, tout comme un, peut-être deux de leurs enfants. Il sera donc vraiment solo demain.

Tiens, Line, la femme de mon partner Pierre. Elle, leur fille et leur nièce sont ici pour être bénévoles à Camp 10 Bear, LE poste ravitaillement, celui où on passera à deux reprises durant la course et où on sera contrôlés médicalement à chaque fois. Je m’en vais saluer Pierre qui viendra nous rejoindre pas tellement plus tard, nous amenant d’excellents gâteaux aux dattes qu’il a faits lui-même jure-t-il. Il nous présente Simon, un coureur qui en sera à son premier 100 miles et qui me rappelle quelque chose… Puis Pat arrive, on pique une petite jasette. Il y va pour son 5e Vermont 100, il est ici avec sa petite famille ainsi que ses amis pacers. Tout ce beau monde dormira à l’hôtel, sauf lui, qui sera sous la tente. On parle aussi souliers. En fait, lui parle de souliers, car moi, je n’ai aucune foutue connaissance dans le domaine…

Cout’ donc, pour un gars pas sociable, ça commence à faire pas mal de monde avec qui je jase…  😉

Le briefing commence. Je sais que ce n’est pas le but, mais c’est loin d’être intéressant. Après un petit speech du représentant du Vermont Adaptative, il y a remise de prix pour ceux qui ont amassé le plus d’argent. Puis Amy, la directrice de course, nous sert un rappel des divers règlements de la course. J’entends Omer Simpson d’ici: « C’est plate ! ». Disons que l’organisation a des croûtes à manger pour rendre ça aussi intéressant que Massanutten. C’est seulement lorsque Amy, visiblement mal à l’aise, nous rappelle de ne pas faire de numéros deux sur des terrains privés (il semblerait que certains propriétaires du coin se soient retrouvés avec des rebuts humains dans leur jardin ou derrière leur cabanon certaines années) et plutôt essayer de se trouver un endroit boisé avant de s’exécuter. Ha, quand on parle de pipi-caca, on finit toujours par rire !  Je note qu’on ne nous demande pas d’enterrer le tout, comme lors de certaines courses. S’il avait fallu… Les chevaux, est-ce qu’ils enterrent leurs choses, eux ?

Départ pour l’hôtel où la préposée à l’accueil me demande si je fais la course. Quoi, elle sait que ça existe, cette course-là ?  Elle semble pas mal au courant, en fait. Et à ce qu’elle dit, nous sommes plusieurs coureurs qui couchons ici. La bonne affaire: ça risque d’être très tranquille cette nuit.

Après être passés à l’épicerie, nous nous installons dans la chambre pour souper. Je préfère manger des choses familières la veille d’une course, ce qui explique pourquoi nous ne sommes pas au souper fourni par l’organisation. Mon père m’offre une bière. Elle me tente… Juste une, ça dérangerait quoi ?  Je résiste. Il revient à la charge quelques minutes plus tard, en versant un tout petit peu de précieux liquide dans un verre. « Ça ne te fera pas mourir ». Il a bien raison. Je me laisserai tenter à nouveau un peu plus tard. Je suis tellement faible…

Puis c’est la préparation de mes affaires pour demain en ensuite, le dodo. Ou le semblant de dodo. J’ai le sommeil agité. À minuit, je vais aux toilettes et ne dormirai plus. Je sens que mon père, couché dans le lit à côté, ne dort pas vraiment lui non plus. Ma soeur ?  Elle ronfle même si elle est couchée sur la combinaison fauteuil-pouf-chaise de bureau, personne n’ayant osé suggérer de partager un des deux lits doubles avec un autre membre de la famille.

Une fois l’heure prévue arrivée, je me lève et discrètement, me dirige vers la salle de bain: c’est là que je prendrai mon dernier repas avant la course. À la guerre comme à la guerre. Puis, quand vient le temps de réveiller mon monde, je me dirige vers la fenêtre et constate qu’il pleut. Et pas mal à part ça. Merde, je m’en serais bien passé… Heureusement, ça arrêtera avant le départ, mais on sent que ça va revenir… et que la journée sera très humide.

Nous arrivons sur le site autour de 3h10. Ça commence à grouiller, les campeurs se réveillant tranquillement. Je préfère toujours arriver pas mal d’avance, question de… faire ce que j’ai à faire pour ne pas avoir à m’exécuter derrière un cabanon, si vous comprenez ce que je veux dire.

Après l’enregistrement, je retrouve le clan québécois. On jase un peu, l’ambiance est comme toujours avant une course: simili-relaxe et il y a beaucoup de sourires. On prend quelques photos et un instant plus tard, on nous appelle au départ.

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Pierre, Joan, moi et Simon. Vous ne trouvez pas que Joan a un drôle d’air ?

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Ma petite sœur qui récupère mon accoutrement d’avant-course. Ready to go ! 🙂

Il fait noir, très noir, et le ciel couvert n’aide pas à éclairer le ciel. Moi qui me demandais si je devais partir à la frontale. Du con… Comme je suis arrivé un peu tard dans le groupe, je dois me placer plutôt à l’arrière, avec Pat et Vincent.

Puis, c’est le décompte. Voilà 100 miles, 160.9 kilomètres à franchir. Encore. Ouf !

Le kyste

« Vous êtes dur à votre corps, vous ! Endurer ça depuis une semaine… » Je venais de dire au médecin que j’étais ultramarathonien. Me semble que ça vient avec la « définition de tâche », non ?

C’était le 3 juillet dernier, 6 jours après l’Ultimate XC. Le kyste que j’ai dans le dos depuis des lunes et que je néglige de faire enlever parce-que-je-n’ai-pas-le-temps-ou-je-trouve-un-paquet-d’excuses-pour-ne-pas-prendre-de-rendez-vous a décidé que trop, c’était trop, et qu’il s’infectait. Les 8 heures passées avec ma veste d’hydratation qui frottait dessus sont venues à bout de sa patience. Pourtant, il avait bien « accepté » les 28 heures de Massanutten. Enfin…

Oui, ça faisait mal, mais ça s’endurait. Sauf que ça devenait de plus en plus inconfortable et avant de partir une semaine en camping, j’ai décidé d’aller consulter le docteur Morin, qui est tout simplement  extraordinaire.

« On va ouvrir ça. ». Vous pouvez faire ça ici ?  Good. On vide le méchant, on met un petit pansement et puis c’est fini !  Dans 2-3 jours, je ne sentirai plus rien.

Ce qu’on peut être ignorant, des fois dans la vie. Surtout quand on n’est pour ainsi dire jamais malade. Après avoir ouvert ledit abcès et laissé couler une quantité appréciable de liquide dégueux (à ce qu’il parait, parce que moi, je ne voyais crissement rien), j’ai reçu le verdict : la plaie devait être nettoyée et le pansement-mèche remplacé tous les jours, dans un CLSC. « Et on se revoit lundi ».

Quoi ?  Tous les jours ?  Et je ne peux pas revenir lundi, je vais être parti en camping. « Va donc falloir vous trouver un médecin là-bas. Et trouver une façon de faire changer votre pansement sur place aussi. Il y a certainement un CLSC là-bas…».  Calv…  Je peux courir ?  « Vous pouvez faire n’importe quelle activité physique qui vous tente ». Ouf !

Ça dure depuis maintenant deux pleines semaines. Le CLSC tous les jours, le médecin aux 4-5 jours. Pas de baignade depuis, des douches qui ne finissent plus. Au premier changement de pansement, il y avait tellement de cochonnerie qui sortait de là que l’infirmière était en panique. Moi, j’ai juste senti l’odeur et j’en avais une bonne idée. Le lendemain, ma douce est venue « assister » et elle qui a le cœur très solide, a dû sortir avant que l’opération soit terminée. C’est bien pour dire…

Au fil des jours, mon état s’est amélioré, j’avais bon espoir de me débarrasser de ça cette semaine. Mais l’infection est revenue. Grr !!!

Je serai donc obligé de me présenter au départ du fameux Vermont 100, LA course de 100 miles qui me faisait rêver depuis que j’ai envisagé de faire des ultras, avec une foutue guenille enroulée dans le cratère (qui a tout de même fait jusqu’à 2 cm de profond !) que j’ai dans le dos.

Vraiment pas idéal comme situation. Évidemment, pas question de courir avec ma veste, mais je n’en avais pas l’intention de toute façon. La course se déroulant en grande majorité sur des chemins de campagne, j’avais décidé d’essayer de la faire avec une bouteille à la main, quitte à revenir à la veste en cours de route. Ben pour la veste, on va laisser faire, je pense !

Quant à la performance ? On oublie ça, tout simplement. De toute façon, je ne pourrai vraisemblablement pas assister à la remise des prix, vu que je devrai revenir en vitesse après la course dimanche… pour faire changer mon pansement. C’est vraiment la joie.

Salut Chris !

Depuis que j’ai appris la nouvelle, il y a une question que je me pose, encore et toujours : « Peut-on dire que nous étions des amis ? ». À l’ère des réseaux sociaux, nous l’étions, c’est sûr, mais étions-nous vraiment des amis ?  Au bout d’un certain temps, j’ai dû me rendre à l’évidence : ton départ subit m’a tellement bouleversé que je ne pouvais faire autrement que répondre par l’affirmative à cette question existentielle.

On ne peut pas dire que ça a très bien commencé entre nous. Nous étions jeunes, les emplois étaient rares et nous nous sommes en quelque sorte un peu retrouvés en compétition. Ce qui fait que ton côté légèrement exubérant avait le don de me taper joyeusement sur les rognons, moi l’introverti, moi le discret.

Heureusement, les choses se sont stabilisées au niveau travail et par le fait même, j’ai appris à te connaitre. Ta bonne humeur perpétuelle, ta sociabilité hors norme, ton entregent, ce n’était pas seulement une façade. Tu étais comme ça, tu aimais profondément les gens. Jamais, au grand jamais, même quand nous étions en plein milieu d’une séance de bitchage collectif, je ne t’ai entendu parler en mal de quelqu’un. Tu essayais toujours de trouver le côté positif, peu importe la situation et surtout, de garder le respect envers la personne. D’ailleurs, l’habitude que tu avais d’appeler tes collègues « docteur » reflétait ce grand respect que tu avais pour nous tous.

Je n’oublierai jamais ce mois que nous avons passé ensemble au pays au soleil levant. Travailler n’était plus vraiment travailler avec toi, c’était s’amuser. Et pourtant, la pression était forte et le client, exigeant. Mais nous avons réussi à tout faire fonctionner, nous les petits jeunes de même pas 30 ans… tout en s’empiffrant régulièrement avec le fameux clubhouse submarine du Grass Root, un véritable trou que nous avions découvert par hasard. Un bar de style américain dirigé par un Japonais portant un chapeau de cowboy, disons que ça marque les esprits…

Après 10 ans à se côtoyer quotidiennement, nos chemins professionnels se sont séparés… pour se croiser à nouveau, 5 années plus tard. Quand on s’est revus, tu m’as accueilli avec ta vigoureuse poignée de main, ton sourire si caractéristique et ton traditionnel : « Fred, câl… que je suis content de te revoir ! ». J’étais au moins aussi content que toi, mon ami, et peut-être même plus.

C’est avec une certaine surprise que j’ai appris que comme moi, tu étais devenu coureur. Hein, Chris qui court ?  Pourtant, c’est un sport pour introvertis, non ? Et dans le fond, tu l’étais. De ta vie privée, on n’en savait pas beaucoup. Tu préférais de loin t’intéresser aux autres que parler de toi. Et je ne saurai jamais le fin fond de l’histoire derrière ton marathon de Las Vegas…

J’enviais l’approche que tu avais pour notre sport: tu le faisais strictement pour le plaisir. Tu préférais faire plusieurs kilomètres en jasant avec quelqu’un de plus lent que de battre un record personnel. Quoi que j’ai senti une grande fierté dans le chest bump qu’on s’est donné ce jour de mai 2012 où tu es descendu pour la première fois sous les 4 heures à Ottawa. Tu sais Chris, il n’y a vraiment pas de mal à être fier de ce qu’on a accompli !

Tu auras laissé une empreinte indélébile sur nos vies. Plusieurs de tes expressions colorées qui faisaient ta renommée font maintenant partie de notre langage courant. Ainsi, une bière de format standard (soit 341 mL, 355 mL ou 12 onces), je n’appelle plus cela une bière, mais bien un « échantillon ». Aussi, quand je demande à ma douce si elle en veut une, j’utilise toujours la phrase : « Mon amour, une bière avant que ça commence ? ». Et quand elle répond que non, pas aujourd’hui, plus tard, etc.,  je sors invariablement ton : « Bon, ça commence… »

Il y en a évidemment beaucoup d’autres, mais elles ne peuvent malheureusement pas être retranscrites ici… 😉

Toi qui n’aimais pas te vanter, tu pourras quand même dire à tes comparses là-haut que tu auras réussi à me faire verser des larmes.

Repose en paix, docteur Larose. Tu vas me manquer…

Ultimate XC St-Donat 2015: la course

J’entame la course dans le milieu du peloton, ou à peu près. J’aime bien la première section du « nouveau » parcours : elle est ondulée, assez roulante, pas trop technique. Parfaite pour une mise en jambes en début de course. Je constate toutefois sas tarder que Dan nous a encore emplis avec son histoire de « parcours plus sec que jamais ». Ben oui, Chose. Déjà à ce point, il me semble y avoir plus de boue que l’an passé. Rien à voir avec 2013, bien évidemment, mais quand même.

Guillaume, un de mes lecteurs, me rejoint et me reconnait, probablement grâce à mes maudits protecteurs aux genoux dont je n’arrive pas à me débarrasser. On jase un peu, du parcours, surtout. Quand je lui demande si c’est sa première fois ici, il me répond que oui. Je lui demande alors s’il est bon dans les descentes et aussitôt, autre réponse affirmative… suivie d’un petit rire gêné. Ha, un vrai coureur : il n’aime pas se vanter. Mais entre nous, il n’y a pas de honte à se dire si on est plus habile dans tel ou tel aspect de la course, bien au contraire.

Toujours est-il que lorsque je réponds par un simple « Non » à sa question à savoir si je sens que j’ai récupéré de Massanutten, on dirait que ça lui donne un coup de fouet et il s’envole, comme s’il s’était dit que bon, calquer sa course sur celle d’un gars qui n’est pas remis d’une course qui a eu lieu 6 semaines auparavant, ce n’était pas vraiment une bonne idée.

Denis est un autre que j’ai vite perdu de vue. Il me suivait depuis le départ, puis soudain, il m’a dépassé et lui aussi semble parti pour la gloire. Décidément…

Le rythme est plutôt rapide depuis le début et c’est avec un certain soulagement que je vois la première montée se pointer. Ça va me permettre de regagner un peu de terrain.

Tiens, il me semble que c’est moins efficace mon affaire. Encore une fois, je rejoins du monde, mais moins que les autres années. Peut-être suis-je simplement parti plus à l’avant du peloton ?  Toujours est-il que je réussis tout de même à reprendre Guillaume, mais il demeure collé à mes baskets. C’est qu’il grimpe bien, le jeunot, particulièrement pour un gars de sa taille. S’il est le moindrement fort en descente…

Au sommet, je me tasse pour lui laisser le passage. Il me sourit et se transforme en véritable fusée. Pas moyen d’observer sa technique, question d’apprendre un peu, il est déjà hors de ma vue. Ayoye !  Il va vraiment falloir qu’il « casse » pour que j’aie la moindre chance de le rejoindre !

Dans la section technique nous amenant au pied de la Grise, je jure comme un bûcheron à chaque fois que je m’enfarge, c’est-à-dire très souvent. Non mais, c’était quoi l’idée que tu avais de rêver à un podium ici ?  Tu es nul en descente, presque aussi nul dans le technique, c’est quoi qui t’est passé par la tête ?  Tu as eu une crampe au cerveau ou quoi ?  Du con…

Je me retrouve seul, déjà. Mais en quelle position puis-je bien être ?  10e ?  15e ?  20e ?  Aucune espèce d’idée. Peu importe, la course est encore jeune. Et il commence à faire moins froid. Donc, out les arm warmers. Mais où les foutre ?  Mes poches sont pleines, alors pas le choix : dans mes shorts. À la guerre comme à la guerre !

Au sommet de la Grise, je décide d’arrêter pour relacer mes souliers, trouvant que mes pieds s’y promènent un tantinet trop allègrement. Toutefois, les moustiques ont décidé que tout arrêt était interdit ici et se mettent en meute pour m’attaquer. Au final, un seul soulier verra ses lacets resserrés, étant dans l’incapacité d’endurer ces voraces bestioles une seconde de plus.

Dans la petite montée avant la grande descente, je rejoins Denis qui me dit qu’il a bien tenté de demeurer avec Laurent et Benoit, mais qu’il a décidé de les laisser aller. Dans la descente, miracle, un coureur qui ne va pas plus vite que moi ! On la fait donc ensemble, pour ensuite arriver au Nordet (12.5 km).

Sur place, pas de verre. Bah, je m’en tire en utilisant un couvercle de thermos. Ici, le système utilisé par l’organisation n’est pas au poil, chaque coureur devant attendre après la pompe qui tire l’eau directement d’une cruche de 18 litres. Dans les autres courses, les bénévoles utilisent des pichets, ce qui accélère le processus. J’avoue que c’est un peu chiant, devoir attendre que l’autre coureur ait fini de remplir sa bouteille avant de pouvoir prendre une ou deux gorgées d’eau.

La première femme arrive comme je lève les feutres. Bon, vais-je me faire chicker encore une fois cette année ?  Bah, on verra si elle est encore sur mes talons dans la montée de la Noire. Et puis cout’ donc, si elle est plus forte que moi, elle passera, un point c’est tout !

Dans la section plus technique nous menant au lac à l’Appel (19 km), Denis me distance plus ou moins. Quand on est ensemble, lui aussi se pose des questions sur le parcours supposément plus sec que jamais. « Il avait l’air de quoi, avant ? ». T’aurais dû voir… Mais je demeure persuadé qu’il était dans un meilleur état l’an passé.

Au ravito, je demande des nouvelles des coureurs du 38 km. On me dit qu’ils sont tous passés. Ha oui ?  Déjà ?  Seraient-ils plus forts ?  Ou peut-être est-on partis en retard ?

Enfin, je ne perds pas de temps à la station : je mange quelques morceaux de banane, avale un verre d’eau et reprends aussitôt les sentiers. Denis, qui remplit son réservoir, me rejoindra bien assez vite. Quant à moi, je juge pouvoir me rendre au lac Lézard (29.8 km) avec ce que j’ai.

Tiens, ne fallait-il passer dans le lac ici ?  Je ne sais plus. Peu importe, c’est en traversant un petit pont en bois que je croise les « fermeuses» de parcours de la course de 38 km. Je vais donc bientôt me mettre à rejoindre des coureurs.

Ce qui se produit effectivement un peu plus loin. Je les encourage en passant à chaque fois, puis entame la montée de la Noire. J’aime bien cette montée : longue, ardue et même technique par moments, elle se fait en plusieurs sections, ce qui peut décourager les gens à la longue. J’espère bien y gagner quelques positions.

Malheureusement, à chaque fois que je vois une silhouette se profiler, c’est celle quelqu’un qui prend part à la course de 38 km. Pas un chat du 60 km en vue, ça en est frustrant. Arrivé au sommet, mise à part une vue superbe, rien. Par les années passées, le ravito était installé ici, mais cette année, il est 3 km plus loin, à l’endroit où les parcours des deux courses se séparent momentanément. Petit coup à la réserve sur mon dos : ok je devrais me rendre, surtout que ça descend.

Ça descend, mais c’est technique, bout de viarge !  Je réussis quand même à gagner du terrain sur quelqu’un. Ce n’est pas un gars de ma course, je ne peux pas croire… Je parviens à diminuer progressivement la distance qui nous sépare, puis soudain, il se retourne et me lâche la question qui tue : « Tu ne trouves pas que ça fait longtemps qu’on n’a pas vu un flag rose ? »

Ha ben, TABAR… !!!

Effectivement, on n’en voit pas autour. Je retourne sur mes pas et en aperçois un au loin. Ok, nous sommes sur le bon chemin. Nous poursuivons, mais les rubans se font rares… On en voit de temps en temps, mais ils sont tous défraichis. L’autre gars aperçoit une aile d’avion. « Ce n’est pas la première fois que tu le fais ?  As-tu déjà vu un avion écrasé ? ». Ils en parlent sur le site de la course, mais non, je ne l’ai jamais vu…

MERDE !!!

Je m’entête. Trouvant que ça n’avance pas assez vite, je pars devant, suivant le sentier. Pas de rubans. Je poursuis, m’enfonce. Je me doute bien, non, je SAIS que je ne suis plus sur le parcours.  À chaque enjambée, je m’éloigne du point où je devrais revenir. Mais je ne retournerai pas. Pas question. Où je m’en vais ?  Aucune espèce d’idée. Mais je ne retournerai pas, un point c’est tout.

Maudit que j’ai la tête dure…

Après le technique, du roulant. Je fonce à vive allure, comme si c’était pour améliorer la situation. Je ne retournerai pas. Si je me perds, il y a bien quelqu’un qui va me retrouver et j’aurai mon premier DNF. Mais je ne retournerai pas. C’est-tu assez clair ?

Je croise des randonneurs. Avez-vous vu des coureurs ?  « Oui, pas tellement loin, en montant sur la droite. »  Ça me conforte dans mon idée. Mais « pas tellement loin », ça veut dire combien, ça ? C’est parce que je commence à être très bas côté liquide…

Après une éternité à rouler, j’entends des voix. Serait-ce le ravito ?

Je poursuis, à pleine vitesse, puis arrive sur une montée. En haut, des tables, du monde qui parle fort. Le ravito. Ouf !

Il est rempli de coureurs du 38 km. J’en aperçois un seul du 60, un gars qui m’a dépassé plus tôt. Il a l’air vidé et se laisse tomber sur une chaise. Le plus dur est passé, mec, si ça peut t’encourager.

Avec l’aide d’une bénévole très efficace (ils le sont tous à cet endroit), je remplis mon réservoir et vide deux sachets de « LG » (la boisson énergétique de Louis Garneau, un test en vue du Vermont 100) dedans. Petite bouffe et je prends le (bon) sentier exclusif à notre gang du 60k.

Cette section est un peu décourageante, car relativement longue et répétitive. Elle se fait bien, n’est pas trop technique, mais on a l’impression de ne pas avancer, qu’elle ne finit plus.

Mais ce n’est pas le sentier qui me préoccupe en ce moment. J’ai plutôt des problèmes de conscience. De sérieux problèmes de conscience. À Bromont, je m’étais trompé de la même façon, mais sur pas mal moins long et je savais que je ne m’étais pas avantagé, autant sur la distance que sur la difficulté du chemin emprunté.

Ici, je ne le sais pas. Côté distance, ma Garmin semble dire que c’est équivalent. Mais pour ce qui est de la difficulté ?  Là est le problème. Et si ce petit « détour » m’avait fait sauver du temps ?  Et s’il me permettait de gagner une ou plusieurs places ?  Déjà, est-ce que j’aurais rejoint le gars que j’ai vu au ravito ?

Et que dire si je termine devant Guillaume ou quelqu’un d’autre qui m’a déjà dépassé ? Et si je terminais sur le podium ?  Ça non, je ne pourrais pas vivre avec cette idée. Faire un podium illégalement, jamais. Je me dénoncerais.

De toute façon, théoriquement, je n’ai pas suivi le parcours, alors je devrais être disqualifié, peu importe mon rang. Ha, que faire ?

C’est décidé, je vais terminer cette course, mais en arrivant, je vais aller me dénoncer. Voilà, c’est la bonne chose à faire.

Bon, on a beau avoir l’esprit occupé, la section ne passe pas plus vite. Et toujours personne devant, personne derrière. À croire que je suis le seul à faire cette satanée course. Quand se présente finalement la montée menant vers Inter-Centre (38.3 km), c’est une véritable bête que j’ai à affronter. Elle est longue, ardue par moments. De plus, les mouches à chevreuil m’obligent à me métamorphoser en ado et retourner ma casquette, palette vers l’arrière. C’est qu’elles ont le don de venir me bouffer le cuir chevelu juste par le petit trou situé derrière… Sales bestioles !

Pendant que je monte, je songe à ce que je ferai une fois rendu au ravito. C’est un des avantages de connaitre le parcours : on sait quand on approche et on peut se préparer au lieu de se planter devant les tables en se demandant ce dont on a besoin.

Pendant que je pige dans les chips, on m’apprend que je suis dans les premiers. Ha non, ne me dites pas que je suis premier… « Non, mais vous êtes dans les premiers ! ».  Shit, définitivement que je vais devoir me disqualifier en arrivant.

Direction Vietnam. Après une belle petite descente, on entre dans le vif du sujet. Pour une fois, Dan exagérait à peine : il y a effectivement beaucoup de petits rubans roses. Pas aux 6 pouces, mais quand même. La première section passe plutôt bien, puis je crois reconnaitre l’endroit où j’étais demeuré coincé en 2013. Cette fois, ça passe comme du beurre dans la poêle. La traversée des rivières ?  Bof…

Puis le Vietnam, le vrai, celui qui est annoncé avec une pancarte, se pointe. Ouch !  C’est le retour dans le monde du « si vous ne vous tenez pas aux arbres, vous allez faire un plongeon; note: les arbres pourraient toutefois être déjà déracinés ». Ça, il n’y en avait pas l’an passé, je suis prêt à le jurer. On ne s’enfonçait pas dans la boue jusqu’à la taille non plus. Ha, espèce de Dan Des Rosiers à la m… !

Je rejoins une nouvelle fois les derniers du 38 km. Leur verbal et leur non-verbal sont unanimes : ils détestent ça !  J’avoue que j’ai aussi hâte que ça finisse et c’est avec un certain soulagement que je me retrouve sous la 329, de l’eau jusqu’aux genoux.

Suite à la remontée du ruisseau, que je fais évidemment du mauvais côté, question d’avoir des acrobaties à accomplir pour le traverser et regagner le sentier, c’est la montée qui m’amènera au Chemin Wall (42.2 km). Ha, on peut relaxer…

Hé non. Ça monte, oui, mais c’est aussi faux-plat par bouts et ce n’est pas un 100 miles que je fais, c’est un 60k, alors je dois courir. Avec ces maudites mouches à chevreuil qui tournent et tournent encore… Et quand elles piquent, elles partent avec un morceau viande, les espèces de…

J’aperçois une chaise, à l’endroit même où un bénévole devrait normalement se tenir pour annoncer nos numéros aux autres qui sortiraient nos sacs.  Et là, il n’y… qu’une chaise. Bizarre.

J’arrive sur place, les trois bénévoles sont en pleine discussion sur la délinquance chez les poissons rouges en Amazonie ou quelque chose du genre. Heu, s’cusez, c’est que j’ai une course à faire, moi là…

Ils se mettent alors à chercher mon sac. Moi qui ai hésité avant de décider si je le réclamerais ou pas, voilà que je perds du temps à l’attendre. Vous me direz : oui mais on s’en fout, tu vas te disqualifier de toute façon… Ben… peut-être pas. Comme je ne vois personne depuis belle lurette, je suppose que les coureurs plus rapides, ceux qui étaient devant, sont toujours devant. Alors si c’est le cas… Bref, après de longues recherches, on me tend mon sac. Je l’ouvre.

Mais il est où, mon Playboy ?

La blague tombe un peu à plat. Ok, j’avoue qu’elle fait très « années ‘80 », mais quand même… Et puis, est-ce que ça existe encore, le Playboy ?

Je récupère des sachets de LG et redonne mon sac aux bénévoles afin qu’ils puissent reprendre leur conversation de haute importance. Pas de changement de souliers, ni de casquette, ni de t-shirt cette année. J’ai appris que ça ne servait pas à grand-chose.

Tant qu’à arrêter, je fais faire un dernier plein (cette bénévole est pas mal plus efficace que ceux attitrés aux drop bags) de mon réservoir, puis reprends les sentiers. Ça devrait être la dernière fois que je m’astreins à l’opération.

La section m’amenant au lac Lemieux (46 km), je la connais sans vraiment la connaitre. Je sais qu’elle est technique et je sais qu’elle monte. Longtemps. Je la fais donc sans me presser, mais sans niaiser non plus. Et elle me semble encore une fois beaucoup plus longue que les 3.8 km qu’elle mesurerait officiellement.

Ha merde, j’ai oublié de laisser mes arm warmers dans mon drop bag. Pas fort. Finalement, ils auront passé 5 kilomètres sur mes bras et 55 dans mes shorts…

Au ravito, un grand gaillard et deux femmes. Du monde du 38 km ?  Hum, ils ont l’air pas mal trop forts pour être du genre que je rejoins… Coup d’œil à leurs dossards : ils sont de la petite trotte à Joan !  Wow, ce monde-là est dans les sentiers depuis 24 heures maintenant, ils sont en train de finir l’aller-retour de ce parcours infernal !

Disons que la course semble avoir laissé des traces. Une des deux filles a l’air complètement écoeurée. Le bénévole tente de lui offrir de l’aide, tout semble la déranger. Elle est à bout. Je connais, mettons. J’essaie de les encourager en leur faisant part de mon admiration. J’espère que ça va marcher un tantinet…

Direction Lac Bouillon (49 km), par une autre section qui mesure 5 kilomètres alors qu’elle est affichée à 3. La section est roulante à souhait et je me sens comme à Washington: je dois garder le rythme, serrer les dents alors que tout mon corps me demande d’arrêter ou au pire, de ralentir. Pourtant, je ne lève pas le pied et tiens le coup.

Je dépasse plusieurs concurrents du 38 km, mais toujours personne du 60 km. Cout’ donc, ils sont où ?  Je n’en ai pas vu un seul depuis la mi-parcours ! Je regarde ma Garmin. Elle indique 6h26. Comme je me donne 1h30 à partir du lac Bouillon, je constate que ça va être très juste si je veux faire sous les 8 heures… Et le foutu lac Bouillon, je ne le vois toujours pas !

Je m’attends à tomber sur un chantier de construction, c’est plutôt un joli petit développement de condos en bois bâtis sur le bord du lac qui m’accueille finalement, avec en prime, trois, oui trois spectateurs qui me crient des « Bravo » et des « On lâche pas ! ». Même si on est habitué à un relatif anonymat en sentiers, ça fait toujours plaisir à entendre.

En sortant du « quartier » neuf, j’arrive au ravito où cette fois, ce sont des percussionnistes qui soulignent mon arrivée. Ouais, bon, je ne suis pas tellement « musique » quand je cours, surtout après des heures et des heures. Mais je ne suis pas pour leur faire savoir.

Un bénévole, tout sourire, me tend un petit verre contenant un liquide qui semble précieux. C’est quoi, ça ? « De l’eau d’érable » qu’il me répond. Ha non, je n’ai pas envie de me chier le corps, surtout avec le maudites bibittes qu’il y a ici !

Aussitôt dit, aussitôt regretté. J’ai été bête et surtout vulgaire envers un bénévole et c’est un sacrilège. Ces gens-là sacrifient leur journée pour nous, la moindre des choses, c’est de les remercier, qu’ils fassent un bon travail ou pas. En plus, celui-là était très attentionné. Pas fort, mon affaire.

Il ne semble pas m’en vouloir, car aussitôt l’eau d’érable reposée sur la table, il se met à énumérer tout ce qu’il y a de bon à manger. Et comme je m’emplis un peu l’estomac, il m’offre de me verser une verre d’eau dans le cou. Puis un deuxième. Il est si gentil. Je ne me prive pas de le remercier abondamment, espérant compenser un peu pour mon impair, puis prends la direction de la côte de l’enfer.

Après une partie roulante ou je me permets tout de même de petites pauses-marche d’une dizaine de pas pour reposer mes jambes, j’arrive au pied de ladite côte. Regard vers le haut : aussi loin que je puisse voir, je ne vois absolument personne. Bout de viarge…

Prenant soin d’éviter de regarder le chrono, j’entame la première montée en face de cochon. Je sens que je grimpe bien. Arrive la deuxième partie : toujours personne devant, même pas le moindre coureur d’une autre épreuve. Ben voyons…

Arrivé au sommet, je fais part de mon « inquiétude » aux bénévoles : est-ce qu’il y a quelqu’un qui fait cette course ?  Oui oui, il y en a justement qui viennent de passer. Ok, merci de me rassurer. Coup d’œil à la Garmin : 7h. Ok, une heure pour terminer, c’est jouable.

Je finis par rejoindre des gens dans la partie très technique avant la descente. Enfin, du monde !  Parmi eux, le gars avec qui je me suis « perdu » plus tôt. Lui aussi, il est théoriquement « DQ », tout comme le « dude » qu’il a vu là-bas. Heu, le « dude », il te parle présentement. Tu ne le reconnais pas ?

La descente, la dernière vraie descente, est une véritable torture pour l’empoté que je suis. Technique au possible, abrupte comme la côte de l’enfer, je la déteste profondément. En fait, je me lève la nuit pour la détester…

À la station Ravary (54.5 km), un autre band, de cornemuses cette fois, est là pour nous coureurs. Pas certain d’apprécier vraiment ce son grinçant, je dois avouer… De toute façon, le chrono me rappelant que je dois déguerpir sans tarder, je me lance dans la section assez technique, mais bien agréable qui suit. Il y a bien des petits bouts boueux, mais rien pour écrire à sa mère.

J’arrive en peu de temps au poste d’Hydro. Yes, le dernier ravito est proche ! Sur place, une dizaine de bénévoles, mais ils semblent tous trop occupés à discuter du problème de prostitution chez les mammouths au Brésil pour prendre soin des coureurs. Je devine bien qu’ils sont là depuis un bon bout de temps, qu’ils ont vu passer les coureurs de toutes les autres épreuves et que la journée commence à se faire longue pour eux, mais je trouve désolant d’arriver à une station d’aide avec 57 kilomètres dans les jambes et de me faire complètement ignorer.

En fait, il y a en une qui est empressée et qui fait tout pour m’aider. Mais les autres… C’est au point que lorsque vient le temps de partir, j’arrive pour les remercier, puis me ravise: je m’adresse seulement à la dame qui s’est affairée à nous aider. Les autres ?  C’est comme si je n’étais pas là, de toute façon.

Honnêtement, c’est la première fois que je vois ça dans le monde de la course en sentiers et en fait,  je n’avais vu ça qu’au 40e kilomètre du Marathon de Mississauga, où j’avais carrément engueulé les ados qui « s’occupaient » du dernier point d’eau. Ils s’étaient probablement bien bidonné du vieux frog qui les avait enguirlandés en français, mais ça m’avait fait du bien.

Les pancartes décroissantes des 3.5 derniers kilomètres ont fait leur apparition. C’est roulant jusqu’à la route, mais j’évite de me faire des illusions: il reste du beurre de peanut, je le sais. Mais je me fais des espoirs: peut-être en reste-t-il moins que dans mes souvenirs ?

À la traversée, les deux gentils bénévoles me confirment qu’il me reste encore quelques parties boueuses. Puis je tombe sur une section de schnoutte qui s’étend à perte de vue. Ha, calv… !  Était-ce vraiment nécessaire ?  Celle-là, j’avoue bien candidement que je m’en serais passé. Et le chrono qui égraine les secondes…

Je parviens à passer, parfois en prenant carrément le côté du bois. C’est fou de voir à quel point c’est dégueux comme bouette. Et le fait que tout le monde ait piétiné le parcours à cet endroit n’arrange pas les choses. Mais ça finit par se traverser et après quelques autres sections à « obstacles », je tombe définitivement sur du roulant. Ondulé, mais roulant. Enfin !

2 kilomètres, il me reste un peu plus de 10 minutes. Ça va être juste, mais j’ai des chances. Dernier kilomètre: 5:45 de jeu. Je relâche un peu: je vais l’avoir.

Tiens, un photographe. Petit sourire. 🙂

899-6828

Le look ado à 45 ans, avec 59 kilomètres dans les jambes, bof…

Puis, surprise sur ma droite: un sentier balisé avec des rubans roses. Dois-je passer par là ?  Dans le dernier kilomètre ?  Ça ne me dit strictement rien. Tic-tac, tic-tac, j’entends le chrono qui continue à avancer…

Nah !!!  Je ne me souviens pas de cette section, je poursuis sur le roulant. 500 mètres. Good, je suis sur le bon chemin !  J’entends l’animation, le bruit provenant du parc des Pionniers. Je suis à pleine vapeur, les spectateurs m’applaudissent.

Voilà, ça achève. Je passe devant le chrono, il indique 8h01. Hein ?!?  C’est quoi, cette affaire-là ?  Quand je traverse la ligne, le mien indique 7:58:44. Mission accomplie… ou presque.

Pour la petite histoire, après avoir placoté un bon bout avec Gilles à l’arrivée, je suis allé voir les résultats affichés. Constatant que je n’étais pas dans les 10 premiers (contrairement à Guillaume, toutes mes félicitations, mon cher !), j’ai vu que ça ne donnait vraiment pas grand chose d’aller me « dénoncer ». Plus tard, quand j’ai vu que j’avais terminé en 13e position, 9 minutes derrière le 12e et presque 17 minutes devant celui qui me suivait, j’en suis venu à la conclusion que mon « écart » n’avait rien changé au classement final. De plus, ma Garmin m’indiquait que j’avais parcouru la même distance que l’année passée, alors les résultats sont « moralement » acceptables. Mais un petit bémol demeure tout de même…

En terminant, je vous laisse sur un petit film tourné par mon ami Pierre et son frère lors de leur expédition. Ça donne une excellente idée de quoi ça a l’air, l’Ultimate XC…

Ultimate XC St-Donat 2015: l’avant-course

Quand on veut participer à l’Ultimate XC de St-Donat, il y a un incontournable : on doit se taper le trafic des Montréalais qui fuient la grande ville le vendredi pour aller passer la fin de semaine dans le nord. Peu importe l’heure de l’après-midi, on ne s’en sort pas: il faut s’armer de patience et attendre que ça finisse.

Ce qui fait qu’il est autour de 17h20 (mon GPS me prédisait une arrivée à 16h10 au départ de chez moi) quand je me pointe à l’hôtel de ville pour ramasser mon dossard. Bah, ce ne sera pas long, il n’y a jamais d’attente quand on vient chercher son dossard ici. Dans 5 minutes, je serai reparti et avant 18 heures, je serai dans ma super (comme dans « Super 8 ») chambre d’hôtel à Ste-Agathe.

J’ai cependant oublié un léger détail dans mon équation : il est fini le temps où en attendant l’autobus le matin de la course, un inconnu aux cheveux longs et à l’accent franco-québécois m’avait demandé si je savais où il y avait des toilettes dans le coin. Sur le coup, j’avais trouvé qu’il semblait un peu « différent », mais son allure trahissait quelqu’un de très fort. Il allait certainement me planter ce jour-là (ce qu’il a fait, d’ailleurs)…

Aujourd’hui, je connais plutôt bien Joan et on peut dire qu’il ne m’est plus vraiment inconnu ! Un peu grâce à ce blogue, je connais également plusieurs autres personnes dans la communauté des coureurs en sentiers et bon, bien que je ne sois pas la personne la plus sociable sur cette terre, je me sens toujours à l’aise dans cette gang-là.

Je tombe donc sur Pat en arrivant. Et il placote avec qui ?  Pierre, mon inséparable compagnon de route de Massanutten. Trop content de les revoir, on parle-parle, jase-jase. Des vraies mémères. Pat nous parle entre autres du Western States, où son nom a été pigé lors du tirage, mais auquel il ne peut pas participer. Il a averti l’organisation et quelle a été leur réponse ?  Merci de nous tenir au courant. Votre paiement ?  Ha non, impossible de vous rembourser… La grande classe. Il nous fait également une mise à jour sur sa blessure qui l’a tenu à l’écart ce printemps, l’obligeant à rater Massanutten et Ottawa. Il fera le 38 km ici et devrait être en mesure de compléter son 5e Vermont 100 dans 3 semaines.

Quant à Pierre, il accompagnera un autre Frédéric pour cette course: son frère, qui en sera à son premier ultra. Athlète accompli, il a deux Iromen derrière la ceinture, mais ne semble pas trop confiant à l’idée d’avoir à affronter 60 km de racines, de roches, de boue et de montagnes…

Puis je sens que quelqu’un me pince dans le milieu du dos. Mais qui est-ce ?  C’est Julie, mon amie blogueuse hyper-sympa qui a commencé à courir il y a peu de temps (2, 3 ans maximum) et qui peut se proclamer ultramarathonienne depuis Bear Mountain. Ici, elle fera le 38 km, mais je ne doute aucunement en ses capacités à faire le 60. Mais elle y va progressif, ayant couru le 22 km ici l’an dernier. On ne peut pas lui reprocher une telle façon de faire !

Toujours est-il que ça n’arrange pas la malformation qui se développe au niveau de ma mâchoire et l’empêche de fermer quand ça concerne la course. Il faut donc que mon estomac commence à crier famine pour me rappeler que je dois y aller à un moment donné…

Je prends alors mon dossard (numéro 895, ce que je trouve un peu bizarre; ne devrait-on pas avoir un petit numéro ?), mon drop bag et emprunte la route vers Ste-Agathe, non sans avoir au préalable redonné à Julie la serviette qu’elle m’avait si gentiment prêtée… à Bromont !

Pierre m’a bien offert de partager leur condo avec eux, mais la chambre au Super 8 était déjà réservée et payée depuis belle lurette. Et finalement, c’est une chambre bien correcte à laquelle j’ai droit, pas mal mieux que ce que le très vieillissant Manoir des Laurentides a pu m’offrir ces deux dernières années. J’ai suffisamment de place pour étendre mes affaires, une petite table pour avaler mon repas de pâtes et le lit king est vraiment bien. Non, rien à redire.

Après une plutôt bonne nuit de sommeil, c’est sous un épais couvert de brouillard que je reprends la route direction St-Donat. Il fait frais, presque froid : la température indiquée dans l’auto est de 8 degrés. Ouf, Widy a dû trouver la nuit froide !  Une nuit dans les Laurentides, ce n’est pas comme à la TransMartinique, pas vrai Widy ?

Surprise en arrivant aux toilettes portables: il y en a une de prise. Hein ?  Déjà quelqu’un d’arrivé ?  Je constate vite que c’est plutôt un gars, un « vrai », qui a passé la nuit dans son auto. D’ailleurs, dans le stationnement municipal, on retrouve quelques autos qui ont fait de même, ainsi que des motorisés et une roulotte. Mais est-ce légal ?  Aucune idée. Bah, tant que ça ne dérange personne…

C’est bien installé dans l’auto que j’observe la faune arriver, peu à peu. Je songe à mes objectifs. En regardant la liste des engagés, aucun gros nom ne m’a sauté aux yeux, les podiums des dernières éditions ne s’y trouvant pas. Il y a bien Laurent et Benoit qui sont définitivement meilleurs que moi, mais à part ça ?  Ben, il y a Pierre, c’est une évidence, mais il va demeurer derrière, avec son frère. Si je réussissais à faire un 7h30, peut-être pourrais-je me faufiler sur le podium, qui sait ?

Mais c’est plus un rêve qu’autre chose. Les années précédentes, plusieurs coureurs qui m’étaient inconnus m’avaient laissé sur place. Le parcours, très technique, avantage les gens habiles, particulièrement dans les descentes. En plus sa longueur, relativement courte, ne me permet pas de compenser avec mon endurance, comme j’ai pu le faire à Washington en avril.

De toute façon, 7h30, c’est un peu trop optimiste. Avec un 8h12 dans des conditions sèches l’an passé, toute course sous les 8 heures serait la bienvenue. Ajoutez à ça un top 10 et je serai très heureux.

Je finis par me rendre au pick-up qui amènera les drop bags. Comme à chaque année, on nous a avertis que tout sac pesant plus de 5 livres sera rejeté. Et comme à chaque année, les sacs ne sont pas pesés. Ainsi va la vie dans le merveilleux monde des ultras !

J’aperçois Pierre et son frère, prêts à embarquer. Comme j’arrive tout près du superbe autobus jaune, Denis, mon fan numéro un lors du 50k à Sherbrooke (qui peut se vanter d’avoir un fan qui a un PB de 2h51 sur marathon ?  Qui ?) me rejoint. Il semblerait que je suis facile à reconnaitre, étant le seul à porter des genoux pour courir.

On fait le voyage ensemble. Excellent coureur sur route (PB de 2h51, duh !), Denis s’est lancé dans les ultras de style « tourne en rond » contre le temps il y a quelques années. Il s’y débrouille d’ailleurs plutôt bien. Quant à son expérience en sentiers, elle se limite à Bromont, où il n’a finalement pas eu une très bonne journée, ayant à négocier pour ne pas se faire exclure à la mi-parcours pour ensuite devoir abandonner après 93 km de course.

On parle de tout : Boston, Ottawa, nos lieux d’entrainement, nos courses. Notre conversation est toutefois interrompue par un arrêt brutal de l’autobus : un coureur doit faire un pit stop urgent. Je n’ai pas la « chance » d’assister à qui se passe, mais je suppose que c’est le déjeuner qui a décidé de sortir par le chemin où il est entré. Certains disent qu’un ultra n’est pas vraiment commencé tant qu’on n’a pas vomi. Hé bien, pour le gars au sourire gêné qui remonte dans l’autobus sous les applaudissements, on peut dire que la course est déjà partie !

Nous arrivons sur le lieu du départ. Contrairement à l’année passée, personne sur place. C’est donc dire que les concurrents de La petite trotte à Joan sont repartis, mis à part les 4 (sur 13) qui se sont retirés et dont Pierre m’a parlé dans l’autobus. Il semblerait que, si on exclut une équipe de 3 personnes, tout le monde a commis la même erreur que Pierre et sa bande l’an passé, soit emprunter le parcours du 38 km au niveau du lac à l’Appel. Mais selon Dan, notre directeur de course unique et préféré, c’est encore la faute des coureurs qui n’ont pas porté attention et non celle du marquage. Ha, ce cher Dan, on l’aime comme ça !

Aussitôt les portes des autobus ouvertes, tout le monde se garroche dans les buissons pour faire pipi. C’est comme si nous souffrions d’une espèce d’incontinence collective. Denis, peu habitué à ce monde plus « nature », se sent un peu gêné de s’exécuter devant les dames. Tu n’as pas à t’en faire, mon ami, depuis que j’en ai vu une faire ça debout, je ne me gêne surtout pas…

L’arrivée de quelque 60-70 coureurs constitue un véritable buffet pour les insectes de tout acabit. J’ai décidé de ne pas amener de chasse-bibittes, car selon mes souvenirs, je n’en avais pas eu besoin durant la course. Toutefois, la présence des bestioles me rappelle qu’il y a 12 mois, Joan m’avait joyeusement aspergé avant le départ. Shit…

Heureusement, Denis a la gentillesse de m’en offrir. Je lui en serai éternellement reconnaissant.

Dan sort de nulle part et commence immédiatement son discours. Il a l’air sur le Red Bull. En fait, il a toujours l’air sur le Red Bull, mais cette fois-ci, on dirait qu’il est vraiment pressé dans le temps. Bizarre.

Il nous rappelle les règlements de base, nous parle du marquage du parcours « avec des flags roses aux 20 pieds; si vous avez faites plus de 20 pieds sans voir de flag, vous vous êtes trompés de chemin ! ». Oui Dan, on le sait… Quant au Vietnam, il serait marqué « à tous les 6 pouces » et serait divisé en deux parties cette année, à cause du castor qui n’aurait pas construit sa digue à la place habituelle ou je ne sais pas trop.

Pour ce qui est du parcours, Dan nous dit que malgré la pluie du printemps, il n’a jamais été aussi sec. Est-ce que c’est moi ou il nous avait dit exactement la même affaire l’année passée ? Puis, après avoir demandé qui parmi nous en était à sa première expérience ici, il a demandé à nous, les « vétérans », de garder une minute de silence pour les pauvres « recrues ». Ce gars-là va toujours me faire rire !

Coup d’œil à sa montre…

3-2-1, GO !!!

Et c’est comme ça que débute ma troisième aventure ici, moi qui m’étais pourtant juré de ne jamais y revenir…