Pas – Chroniques et récits d’un coureur

Je n’étais pas encore considéré comme un ado que déjà, j’étais un lecteur assidu du journal La Presse. Tous les matins, je faisais religieusement le tour de sa section des sports, qui était en format tabloïd à l’époque. En hiver, je lisais tout ce qui concernait le Canadien; en été, c’étaient les Expos. Puis il y a eu les Jeux olympiques, le football, le Tour de France, les grands tournois de tennis, de golf, etc.

Au fil des ans, je suis peu à peu sorti de mon carcan « sports, sports et sports » et j’ai découvert des chroniqueurs de grand talent. Car on peut dire qu’il y en a, des grandes plumes à La Presse, la moyenne s’étant globalement élevée depuis le départ de Réjean Tremblay pour le fascicule publicitaire à la gloire de l’Empire de la Convergence il y a quelques années. Pierre Foglia demeurera toujours le grand maître dans le domaine, mais j’affectionne particulièrement Vincent Marissal et Patrick Lagacé, probablement parce qu’ils sont des hommes de ma génération et ont le don d’appeler un chat un chat. La complaisance, ce n’est pas leur lot. Leurs argumentations sont toujours solidement bâties et leurs opinions valent habituellement le détour, qu’on soit d’accord ou non.

Marc Cassivi est du même moule, mais je ne le lis malheureusement pas assez souvent, vu qu’il est chroniqueur artistique et que je n’ai habituellement pas le temps de me rendre à cette section lors de mes lectures. Même chose pour Yves Boisvert, qui se spécialise dans le judiciaire. Par contre, quand ces deux-là ont la chance de « sortir » de leur domaine et qu’ils se mettent à écrire sur la course à pied (ils sont coureurs tous les deux, tout comme Marissal, d’ailleurs), on constate l’étendue de leur talent. La rubrique « Le dernier tour » du magazine Kmag, que chacun d’eux a signée à quelques reprises, est une pièce de collection à tout coup.

Monsieur Boisvert a poussé l’exercice un cran plus loin en regroupant une quarantaine de petites histoires reliées à son expérience de coureur dans le livre Pas – Chroniques et récits d’un coureur lancé en avril dernier. Oui je sais, ça m’a pris du temps avant de le lire…

PasChroniquesEtRecits

Mais quand je l’ai commencé, je l’ai tout simplement dévoré. Dès la préface signée Marc Labrèche (son ami et ancien voisin à St-Lambert), le ton est donné: le lecteur ne s’ennuiera pas. Dans le bouquin, Boisvert aborde avec humour et beaucoup d’autodérision les différentes étapes qui l’ont amené à courir, sa relation avec le sport, la manière dont il se perçoit ou il se sent perçu, les manies et superstitions que chacun finit par développer, etc. Je me suis tellement reconnu dans ses propos que je ne pouvais effacer un sourire de mes lèvres tout au long de ma lecture. Sauf lors de certains passages plus graves, dont celui où il raconte la mort du jeune homme tombé au combat en terminant le demi dans le cadre du Marathon de Montréal 2011 disputé par une chaleur inhabituelle pour un 25 septembre. L’immense talent de Boisvert ressort dans ce chapitre écrit simplement, les mots choisis exprimant avec une belle justesse l’aspect si dérisoire de cette course contre le temps qui pousse chacun de nous à vouloir aller toujours plus vite, à faire toujours mieux. Probablement mon chapitre préféré.

Il est clair que n’importe quel coureur va se reconnaitre en lisant ce recueil et fort probablement que les non-pratiquants de ce sport reconnaitront également les gens qu’ils côtoient, ces grands dépendants de leurs sorties au grand air.

Bien sûr, tout comme se qui se passe avec ses collègues de La Presse, je ne suis pas d’accord avec tout ce que monsieur Boisvert écrit. Lui court maintenant pour la performance et avait un seul but en tête: Boston (il a fini par se qualifier en septembre 2012 et sera du départ à Hopkinton en avril). Pour ce faire, il a embauché un entraineur et depuis ce temps, suit à la lettre tout ce que ce dernier lui dit.

Pour ma part, ce n’est pas parce qu’un entraineur a eu du succès en appliquant certaines méthodes avec quelques athlètes que ces mêmes méthodes marchent pour tout le monde. Ainsi, l’entraineur de monsieur Boisvert dit qu’un coureur ne devrait pas faire plus d’un marathon par année et s’il le fait, qu’il ne se fasse pas d’illusions: il lui sera impossible de faire un bon temps à chaque fois. Or, c’est exactement le contraire que j’ai fait en 2012, écrabouillant mon PB à Ottawa en mai pour ensuite récidiver à Philadelphie en novembre… sept semaines après avoir fait une course de 50 milles.

Bref, je trouve qu’il s’enferme dans un certain carcan, refusant « sortir de la boîte ». Autre exemple ?  Il dit que les programmes d’entrainement modernes limitent la plus longue sortie d’un coureur à 32 km parce qu’au-delà de ça, c’est plus dommageable que profitable. Ok, c’est la théorie à la mode et ça se tient. Mais avez-vous déjà essayé autre chose pour voir ?  En ce qui me concerne, je me suis mis à battre des records quand je me suis mis à en faire un peu plus…

Ceci dit, ça n’enlève absolument rien à la qualité de cet ouvrage et comme vous l’aurez deviné, je le recommande fortement à tous, que vous soyez coureur ou non.

Bonne lecture !  🙂

2 avis sur « Pas – Chroniques et récits d’un coureur »

    • Effectivement, je me doute bien que les entraîneurs ne sont pas tous pareils. Tu sembles d’ailleurs avoir une très belle relation avec le tien. Mais moi, on dirait que j’ai la tête trop dure pour travailler avec un. Ça doit être des relents de mon adolescence ! 🙂

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