Des petites vites

Beaucoup de choses à raconter ces derniers temps, mais malheureusement, pas tellement de temps pour le faire. Je dois donc me résoudre aujourd’hui à y aller en mode « petites vites », sinon certaines histoires seront perdues à jamais. Et ce serait tellement dommage… 😉

« C’est le lapin… »

Avant-veille de notre départ pour l’Italie, je suis à mon poste habituel du mardi matin, soit le mont Royal. Tradition oblige, je m’arrête quelques instants sur le belvédère face au chalet, même si ce ce jour-là, la météo n’est vraiment pas propice aux grands spectacles, contrairement à ce qu’elle était quelques jours auparavant. En effet, le ciel est gris, il y a de la brume et même les édifices du centre-ville, pourtant tout près, sont difficiles à distinguer. Alors pour les monts St-Hilaire et St-Bruno, on repassera…

Toujours est-il que pendant que j’admire le non-paysage, je me rends compte que trois dames (à partir de quel âge doit-on abandonner le terme « fille » pour le remplacer par le mot « dame » ?  C’est qu’elles sont tout de même plus jeunes que moi, je dirais…) en tenue de course me jettent des regards furtifs tout en murmurant entre elles.

Bon, qu’est-ce que j’ai, au juste?  Je suis trop vieux pour avoir des substances verdâtres qui me pendent au bout du nez et comme je porte des shorts de course (règle numéro un: il fait plus de 5 degrés, je cours en shorts), pas de risque que ma braguette soit à découvert. Alors, qu’est-ce que c’est ?

J’entreprends de recommencer à courir quand, passant près d’elles, j’entends clairement: « C’est le lapin… Oui, c’est le lapin.. ». Ha ben, du monde qui vient de mon coin de banlieue… Mais suis-je si reconnaissable (tes genoux, du con, il n’y a pas grand monde qui court avec des machins aux genoux !) ?

Au passage, l’une d’elles me demande si j’étais le lapin à la Course des 7. Une petite jasette s’ensuit et j’apprends qu’elle habite à un coin de rue de chez moi. Et pourtant, bien que son visage me semble familier, je ne l’aurais jamais parié. C’est fou à quel point on ne connait pas ses voisins…

Avant de repartir, je lui ai suggéré de jeter un œil à son édition du lendemain du journal local…

L’entrevue

En fait, c’est l’édition de la semaine suivante qu’il aurait fallu qu’elle regarde, mais bon, je ne pouvais pas le savoir.

Car, comme mes amis Face de bouc le savent depuis un bout de temps, on retrouvait ma face en gros plan dans un article du Reflet (dans la version papier, ça faisait presque peur), notre hebdo local. Le sujet ?  Les ultras, bien évidemment.

Pour faire une longue histoire courte, les gens des loisirs de la ville ont parlé de moi aux gens du Reflet et après quelque temps, un journaliste m’a contacté. L’entrevue, qui devait durer une quinzaine de minutes à l’origine, en a duré au moins le double et aurait pu se prolonger encore très longtemps. Pas volubile de nature, je suis difficile à arrêter quand j’entreprends le sujet. J’ai tâché de faire de mon mieux pour être à la fois instructif et précis dans mes réponses. Surtout que, contrairement à ma première expérience dans le domaine, je ne venais pas de tout juste terminer un 160 kilomètres à la course, alors je n’avais pas d’excuse pour dire des idioties !  🙂

Les ultras faisant partie de ma vie depuis quelques années, je m’étonne toujours un peu de voir (ou entendre) des personnes tomber à la renverse quand je parle des distances parcourues. Ben oui, il m’est arrivé de faire plus de 100 miles à pied, je ne suis pas le seul, vous savez…

N’empêche, j’aime toujours quand on me demande quelque chose du genre: « Vous faites ça en combien de jours ? ». Ma réponse, toujours la même: « On part tous en même temps et c’est le premier qui arrive qui gagne. Des fois, oui, on part un matin et on termine le lendemain. ». Ça a toujours un effet bœuf ! 🙂

Monsieur Penven, le journaliste qui a mené l’entrevue, a été hyper-sympathique et très intéressé durant notre entretien. Aussi, il a plutôt bien synthétisé ce que je lui ai raconté afin que ce soit accessible aux gens dits normaux. Il y a bien quelque petites erreurs factuelles dans l’article, mais dans l’ensemble, je suis très satisfait du résultat. Si ça peut aider à promouvoir notre sport et permettre aux épreuves locales de continuer à exister…

Maintenant, c’est rendu que les dames Témoins de Jéhovah qui nous rendent parfois visite le samedi matin m’appellent notre « vedette du Reflet »…

Course à Florence

J’ai déjà raconté mon expérience de course à Rome, je ne peux pas garder sous silence celle que j’ai vécu à Florence, quelques jours plus tard.

Ha, Florence… Moins spectaculaire que Rome, la capitale de la merveilleuse Toscane est d’une beauté inégalée (quoi que Sienne ne donne pas sa place non plus). Autre occasion que je ne pouvais, que je ne devais absolument pas manquer.

6 heures du matin encore une fois donc, je me suis élancé. Après avoir longé l’Arno de par ses deux rives (le traversant entre autres par un Ponte Vecchio entièrement désert), je me suis un peu perdu en cherchant la Piazzale Michelangelo, les indications n’étant pas tellement claires. Quand c’était rendu qu’on annonçait un terrain de camping et un autodrome, j’ai reviré de bord, comme on dit chez nous.

J’ai terminé en sillonnant le labyrinthe des rues pavées formant la ville historique, tâchant de passer à travers chaque place connue, devant chaque église ou monument. Visiter une ville à la course avant qu’elle soit envahie, ha…

Territoires inconnus

Je l’avoue bien candidement, je ne lis pas beaucoup. On dirait que ça prend une occasion spéciale pour que je me donne le « droit » de le faire: les vacances, avant le dodo la veille d’une course, les longs voyages en avion (qui n’arrivent vraiment pas souvent), etc.

Ainsi donc, avant de partir en voyage, je n’avais pas encore terminé la lecture de Territoires inconnus, le livre de Pat, que j’avais amorcée lors du lancement. L’avion n’était pas atterri que j’avais passé au travers.

Comme je ne suis vraiment pas objectif, je ne m’éterniserai pas dans une longue tirade dithyrambique. Je vais plutôt me contenter de dire que Pat s’y livre avec une belle simplicité et authenticité hors du commun. Pas de détours, pas de faux-fuyants. Comme ce qu’il est quand on a la chance de le côtoyer le moindrement.

Pour apprendre à connaitre l’homme et aussi, l’ultramarathonien. Car les deux sont indissociables. À lire absolument.

En dehors de son bocal

Mercredi soir, je me présente à l’heure exacte, ne sachant pas trop à quoi m’attendre. C’est que voyez-vous, je n’ai jamais assisté au lancement d’un livre. Mais pour rien au monde j’aurais refusé l’invitation que m’avait envoyée la maison d’édition de « Territoires inconnus », le livre de mon ami Pat. Je ne pouvais tout simplement pas rater ça.

En entrant dans le sympathique resto où l’événement a lieu, j’aperçois Pat sur ma gauche, lui serre la pince en lui demandant à la blague ce qu’il fout là. Depuis le début de la journée, il est pris dans le tourbillon des photos, des entrevues et tout le tralala qui vient avec ce lancement, mais il semble de super bonne humeur. Il a l’air heureux, tout simplement.

Une gentille dame m’accueille avec le sourire et m’offre un petit coupon pour une consommation. Comment dire non ?  Derrière elle, une table et plusieurs dizaines d’exemplaires du livre, « empilés » de façon à former une pyramide circulaire. J’en prends un sur le dessus et commence à le feuilleter en attendant de payer. Est-ce que ça se fait, feuilleter un livre durant un lancement ?  Aucune idée, alors je le fais.

Quand on m’annonce le prix, je sursaute. Hein, juste ça ?  Pouvez-vous seulement payer le papier à ce prix-là ?  « C’est le prix de lancement » qu’une dame me dit en m’en tendant un autre exemplaire dans lequel elle a inséré un signet à l’effigie du livre. N’empêche…

Je replace l’exemplaire que je feuilletais sur la « pile » et remarque que discrètement, la dame rebâtit ladite « pile » de manière plus esthétique en le replaçant au « bon » endroit. Bon ben, on dirait que ça ne se fait pas, prendre un livre directement dans la « pile », puis le remettre là. Je vais le savoir pour une prochaine fois !

Je jette un œil tout autour: pas grand monde d’arrivé et pas un chat que je  connais. Moi qui suis tellement, mais tellement à l’aise dans ce genre de situation… J’imagine que c’est comme ça que se sent un poisson rouge lorsqu’il se retrouve en dehors de son bocal (au moins, moi je suis en mesure de respirer). Mais pourquoi donc n’ai-je pas invité ma sœur à m’accompagner quand Barbara m’a dit qu’elle ne pourrait pas venir ?  Ou une amie ?

Bah, j’ai un livre, j’ai de quoi passer le temps, non ?  Encore là, je ne sais pas si ça se fait… Au pire, si je demeure le seul de ma gang, après le petit discours de Pat, je vais lui demander de dédicacer mon exemplaire et me transformerai ensuite en courant d’air. Pas plus compliqué que ça.

Je m’installe donc un peu à l’écart et commence ma lecture. Première chose qui me frappe : il a pensé à ses camarades de course de la génération X : c’est écrit assez gros pour qu’on puisse le lire sans « rallonges de bras ». 🙂  Puis, je suis rapidement absorbé. Tout de suite, je me reconnais dans ses écrits : les débuts avant les GPS, les ultras, sa description si exacte d’une sortie automnale au mont St-Bruno qu’on identifie sans qu’il ne le nomme. Moi, un lecteur lent (je suis lent dans tout, de toute façon), je tourne maintenant les pages à une vitesse presque normale.

Flairant mon « isolement », Pat se libère pour venir me piquer une petite jasette et me dire que les autres sont supposés venir. Et d’ailleurs, quelques minutes plus tard, Martin arrive, accompagné de sa charmante épouse dont j’ai oublié le prénom (cette manie que j’ai d’observer le non-verbal de quelqu’un quand on nous présente au lieu d’écouter ce qu’on me dit…).

La pauvre, elle va maintenant avoir à subir nos histoires de coureurs. Martin revient de la Chute du Diable, où il a joué au bénévole à un ravito pour le moins… insolite (ils avaient transformé le ravito en pseudo-hôpital) !  On parle aussi évidemment de l’Eastern States, course qui nous intrigue tous et où il a fait partie des 57 valeureux qui sont parvenus à terminer. Puis suivent toutes les histoires sur Bromont, Virgil Crest, Massanutten, le Vermont, etc. Pauvres conjointes qui ont à se taper ça…

Quand Pierre se pointe, la discussion ne fait que s’intensifier. C’est quoi tes prochaines courses ?   Penses-tu t’essayer pour l’UTMB ?  Pour le Western States ?  Fais-tu Bromont ?   Vous voyez le genre…

Pat nous fera un bien beau petit discours empreint de sincérité et d’émotion, puis dédicacera nos livres dans une ambiance sympathique et conviviale. Je ferai la connaissance de ses proches amis Geneviève et Charles, qui avaient beaucoup parlé avec Barbara à Bromont et que je n’avais pas encore eu la chance de rencontrer. Marathoniens tous les deux, ce sont eux qui jouent aux pacers avec lui au Vermont à chaque année. Je m’étais toujours demandé c’était comment, être pacer dans un ultra, et j’ai été très heureux d’en apprendre plus sur le sujet.

Puis, avant de partir pour de bon, je suis tombé sur Joan. UTMB, Tor des Géants, Western States, Hardrock, sa course Québec-Montréal (qu’il termine au moment où j’écris ces lignes, il est incroyable), tout y est passé et je n’ai pas vu le temps filer.

Le poisson rouge avait définitivement retrouvé son bocal.