Bromont Ultra 2018 ou comment être de la fête quand on ne peut pas faire la course

J’adore cette montée. Relativement courte, mais abrupte, c’est ici que j’avais semé Ian durant le premier tour de l’édition 2016. Bah, « semer », le terme est peut-être un peu fort puisqu’il m’avait rejoint dans la section technique tout de suite après. Sauf qu’une fois rendu au ravito P7, il m’avait complimenté sur mes talents de grimpeur.

Présentement, ce sont d’autres talents dont j’ai besoin. Talents que je ne suis pas certain de posséder: ceux d’un motivateur.

Il y a un peu moins de 36 heures, je suis allé souhaiter bonne chance à Louis, Pierre et Joan avant leur départ pour Bromont. Pendant que nous échangions des plaisanteries (dès que des gars se retrouvent ensemble, ils finissent toujours par dire des niaiseries), je n’ai pas pu m’empêcher de remarquer que les 4 premiers au classement de l’édition initiale de cet événement étaient réunis.

Pierre est maintenant le last man standing. Louis s’est arrêté à la mi-parcours, malgré les arguments apportés par le capitaine du ravito, moi en l’occurence. Il faut dire que j’étais au courant de son état de santé (les deux tendons d’Achille pétés, il passera sous le bistouri le jeudi suivant), alors ce n’est que pour la forme que j’ai tenté de lui faire changer d’idée. Quant à Joan, s’il semblait plutôt bien après 80 km, la fameuse Lieutenant Dan l’a achevé et il a hissé le drapeau blanc tout juste après.

Mais les 124 kilomètres parcourus sur ce parcours diabolique ont sournoisement fait leur oeuvre: mon ami est épuisé. Les yeux fermés, il reprend son souffle pendant que j’appuie ma main sur son dos alors que la pluie qui tombe depuis des heures coule sur son visage marqué par la fatigue. Pas pour l’empêcher de tomber, car je sais qu’il est très bien en mesure de se tenir debout tout seul. Je veux juste lui faire sentir que son « petit frère » est là. Que cette maudite côte, dont la pente est tellement raide qu’elle a failli le faire basculer vers l’arrière, on va la monter ensemble. Quand il sera prêt.

***

« Va peut-être falloir que tu fasses sortir du monde… »

Ce que je craignais était en train de se réaliser : le ravito était bondé. Tout se passait bien jusque là. Barbara était arrivée en début d’après-midi, je lui avais expliqué en quoi consistait notre rôle. Geneviève, ma super-partner de l’an passé, était arrivée peu après. Connaissant ma douce moitié, je savais que les deux allaient travailler à merveille ensemble et qu’elles seraient bigrement efficaces. Ça me donnerait plus de liberté pour aller chercher les choses qui allaient inévitablement manquer… ou pour mettre à jour mon placotage.

Il y a eu Seb avec qui j’ai parlé de son Spartathlon, Xavier et la triste controverse de Cruel Jewel, Stéphane et son expérience à l’UTMB. Sans compter les deux Martin, Yannick, qui est venu me saluer après avoir pris contact avec moi par courriel, et plusieurs autres dont j’oublie le nom qui me connaissent via ce blogue. Je ne suis pas jasant de nature, mais quand ça concerne la course…

Toujours est-il que les coureurs se sont mis à arriver. D’abord au compte-gouttes. Il faut dire que compléter le premier tour en moins de 9 heures, ce n’est pas donné à tout le monde !

Le premier symptôme d’un éventuel problème est apparu lorsque Jean-François, un des favoris (et futur vainqueur), est arrivé en troisième position. Souffrant du genou, il s’est immédiatement couché sur le sol, les pieds sur une chaise. Pendant que l’équipe médicale travaillait à le remettre sur pieds, j’ai remarqué la quantité de gens présents : il devait y avoir une dizaine de personnes autour de lui. Et elles prenaient beaucoup de place. Il n’y avait pas d’autre coureur présent, mais s’il avait fallu qu’il y en ait 5 ou 6…

J’étais préoccupé. Par la santé de Jean-François, bien sûr, mais surtout par une éventuelle congestion. Tout s’était bien déroulé l’an passé, mais là…

Le calme avant la tempête: le capitaine du ravito prend des nouvelles de son ami après 80 km (merci Martin Bherer pour la photo)

Pendant que j’avais encore le temps de vérifier si les coureurs prenaient le bon côté en partant pour leur deuxième tour… (photo: Martin Bherer)

Après, lentement mais sûrement, la fréquence d’arrivée des coureurs augmenta. Quand mes amis Pierre puis Joan se sont présentés, tout allait encore bien. Mais environ 30 à 45 minutes après eux, pour paraphraser Geneviève, nous avons perdu le contrôle. Les équipes de support étaient de plus en plus nombreuses, certaines occupant même 2 ou 3 chaises. Un coureur en particulier a littéralement été assis dans le milieu de la place durant 20 longues minutes, son équipe de 3-4 personnes étant présente durant tout ce temps. Et parmi cette « équipe », une seule personne travaillait. Les autres ?  Elles étaient là, point. Dans le milieu de la place.

On ne peut pas leur en vouloir, ce n’est pas tout le monde qui connaît le fonctionnement d’un ravito aussi important. Mais leur présence nuisait non seulement à nous bénévoles, mais également à l’équipe médicale qui avait comme mission de déceler les moindres signes de problème chez les coureurs qui entraient. Selon Guylaine, la très sympathique responsable du médical, il était peut-être temps de faire quelque chose…

Je sentais toutefois que ça passerait et je ne me suis pas trompé. Ouf !  Lentement, mais sûrement, les coureurs sont repartis et la place s’est pas mal libérée. Aussitôt, j’ai agrippé la chaise installée au mauvais endroit pour la mettre hors d’état de nuire. Ok, le reste de la soirée se déroulerait sans anicroche.

Erreur. 15-20 minutes plus tard, c’était à nouveau la cohue. Beaucoup de coureurs, entourés de leur famille, prenaient beaucoup trop de temps. À un certain moment, un coureur solo est arrivé et m’a demandé son drop bag. En tentant de me rendre à l’endroit où les sacs étaient déposés, j’ai été pris dans la congestion. Plus capable d’avancer d’un pouce. C’en était trop.

Question de me faire entendre par-dessus la musique, j’ai élevé ma voix de quelques décibels, pour demander, en utilisant exactement les mêmes mots que Pat en 2015, aux gens de sortir de manière à ce qu’il n’y ait pas plus d’une personne par coureur.

La plupart des gens me connaissent comme un gars souriant, (très) discret, qui parle peu et surtout, qui ne dit jamais un mot plus haut que l’autre. Sauf que lorsque la situation le commande, bien que j’aie ça en sainte horreur, je suis capable de lever le ton. Et disons que dans ces cas-là, je n’ai pas besoin de micro pour me faire entendre.

L’effet a été immédiat. Silence complet dans la tente, les gens se sont mis à sortir. Barbara m’a dit qu’elle avait compté au moins une douzaine de jeunes enfants dans le lot.

« Good job, Fred » m’a glissé Guylaine.

C’était ce qu’il fallait faire dans les circonstances, mais ça m’a fendu le cœur. Je hais chiâler après le monde. J’HAÏS ça. Profondément. Ça vient me chercher, vous n’avez pas idée. J’espérais juste que les enfants sur place avaient eu le temps de donner un câlin à leur maman/papa… Malheureusement, je n’avais pas le choix, c’était une question de sécurité. Si j’ai offensé quelqu’un, vous m’en voyez vraiment désolé.

Stéphane et trois dames se sont joints à moi pour le reste de la soirée, me permettant de libérer Geneviève qui avait encore fait un travail colossal cette année. Je me suis tout de même gardé le droit de retenir Barbara une heure de plus, question que quelqu’un « d’expérience » soit là pour guider les  « petites nouvelles »… et aussi d’avoir ma tendre épouse avec moi un peu plus longtemps !  😉

La règle du « une personne par coureur » n’a évidemment pas pu être appliquée à la lettre par la suite, mais lorsque je voyais des « équipes » nombreuses se pointer, je leur demandais gentiment d’amener le coureur juste à côté, dans la tente principale, où il y avait beaucoup d’espace. Avec le recul, c’est ce qu’on aurait dû faire dès le début.

L’arrivée de Stéphane a été une bénédiction. La raison ?  Ça me soulageait de la tâche ingrate d’avoir à suggérer fortement de repartir aux coureurs qui traînaient un peu trop au ravito. Pour l’occasion, il avait enfilé sa casquette de finisher du Vermont 100, alors même ceux qui ne le connaissaient pas savaient qu’ils avaient affaire à quelqu’un de crédible. Imaginez ceux qui le connaissent…

***

J’entends la voix de Pierre qui m’appelle au loin. Moi qui suis supposé l’aider à demeurer dans le droit chemin, à garder son allure, je suis rendu en contre-bas d’un sentier où je n’ai pas affaire, en train de gosser après ma maudite frontale qui ne veut pas se rallumer. Tabar… !  Et il fait noir en calv… !!!

Il y a quelques minutes, mon coureur a posé la question qui tue : « Vois-tu des flags ? »

C’est qu’il a la réputation de se perdre souvent, je lui ai d’ailleurs signifié 2 ou 3 virages qu’il avait manqués depuis que je me suis joint à lui. Dans la partie boisée de la section atrocement interminable reliant les ravitos P7 (km 126) au lac Gale (km 145), nous faisions face à un brouillard épais et tenace (il y a toujours du brouillard au Bromont Ultra). Je tenais ma lampe au niveau de mes hanches, question d’avoir une meilleure visibilité.

Ce n’était pas suffisant on dirait. Après un petit bout sans voir ni fanion, ni ruban rose, j’ai dit à Pierre de demeurer sur place pendant que je retournais sur nos pas pour vérifier. Au bout d’une centaine de mètre, il y avait bel et bien un fanion rose planté dans le sol. Nous étions sur le bon chemin.

Après un autre bout sans balisage, je suis parti en éclaireur (c’est le cas de le dire) devant alors que Pierre, convaincu de notre erreur, rebroussait chemin.

Il avait raison et je l’entends m’appeler pendant que c’te maudite patente à gosses ne veut toujours pas se rallumer. Non mais, dans le genre pacer nuisible…

J’allume la lampe de secours que j’ai installée à ma taille et rejoins finalement mon coureur à une intersection, là où nous avons vraisemblablement raté le virage. C’est pourtant clair, comment avons-nous pu rater ça ?

Question existentielle, cependant: où va-t-on ?  La nuit, ce n’est pas évident de s’orienter et nous n’avons aucune idée de quel côté nous sommes arrivés. Va falloir attendre que du monde passe.

Nous entendons des voix approcher. Dans le groupe, une femme. Mais bon Dieu, ils sont combien ?

« Vous êtes des coureurs du 160 ? »

Affirmatif. Ouf !  Ils sont cinq, soit trois coureurs et deux pacers. Parmi eux, Caroline, première femme (en fait, elle n’était pas vraiment première, mais c’est une longue histoire).

Nous reprenons le sentier, dans la bonne direction. Après son mini-passage à vide, Pierre s’était remis en marche. Et il a tellement repris du poil de la bête que j’ai peiné à le suivre dans la descente menant au ravito P7 (km 126). Eh oui, les 121 kilomètres qu’il a de plus que moi dans les jambes ne suffisaient pas pour contrebalancer mes carences en descente… C’est la vie !

Mais là, il a un petit down et décide de laisser passer ceux qui nous ont rejoints. Au final, c’est une excellente décision puisqu’en plus de nous montrer le chemin, nos nouveaux camarades sont de fort agréable compagnie. Et, au fil des kilomètres, nous apprenons que finalement, Pierre et moi sommes les paresseux du groupe. En effet, Stéphane P., qui sert de locomotive au groupe, revient du Tor des Géants où il a dû abandonner à cause d’un genou récalcitrant… après 220 kilomètres. C’était il y a trois semaines.

Quant à Caroline, elle s’est tapé la « Route de l’électron »: 2000 kilomètres entre Natasquan et Montréal, en passant par Manic-5. C’est elle qu’on voit dans les pubs d’Hydro-Québec ces temps-ci. Et que dire du pacer qui marche devant nous ?  Il a terminé le Tor…

Bon pour l’humilité vous dites ?

Devant, une voix que je crois reconnaître. Stéphane ?  Mais qu’est-ce que tu fous-là… en sens inverse ?

Il s’en va pacer François et comme il était dans « l’obligation morale » d’assister au départ de la course de sa douce, il a manqué son passage au lac Bromont et à P7. Il s’en va donc à sa rencontre, en remontant le parcours en sens inverse. On est un pacer dévoué ou on ne l’est pas !

Après une ou deux éternités, voilà enfin la route de terre. Hallelujah !  Bout de viarge, je ne suis qu’un pacer et j’en avais plein le derrière de ce sentier qui n’en finissait plus. Alors j’imagine ceux qui font la course…

Direction ravito-surprise de Chantal, véritable oasis dans ce désert un kilomètre plus loin. Je le sais, je le sens, Pierre a encore du jus. Il a trop d’expérience dans les 100 miles pour qu’il en soit autrement. Et le sachant rapide et habile dans les descentes, j’ai dans mon idée que…

Effectivement, nous distançons immédiatement nos compagnons. Avant d’arriver au ravito, je m’enquière de ses besoins et passe la commande: du café. Quelque chose à manger ?  Non, pas vraiment. Bon… Pendant qu’il prend sa dose de caféine, je m’empiffre. Littéralement.

C’est que voyez-vous, j’ai négligé un détail: quand on commence à courir à 2h du matin, le dernier repas est loin. J’aurais bien pu amener un wrap et des sandwiches du ravito principal et les engouffrer avant de me joindre à mon ami, mais ça ne m’est pas passé par la tête. Ce qui fait que mon ventre gargouillait déjà avant même de me mettre à courir. Au point où j’ai avalé une barre Fruit-3 pour tenter de calmer mon estomac. Ça a fait la job jusqu’à P7, mais tout juste. Ce que j’ai pris là m’a aidé à tenir, mais je dois renouveler mes stocks, comme on dit.

« Fred, je suis prêt à y aller… »

Wow, méchant pacer : 2-3 Pringles à moitié enfoncés dans la bouche, encore en train de piger dans les plats alors que son coureur l’attend pour partir. Bravo champion !

Dans la section de switchbacks en montée, Pierre jette des regards légèrement inquiets derrière. Bien que l’esprit compétitif soit beaucoup moins présent en ultra, on regarde toujours comment on évolue par rapport aux autres coureurs, question de s’évaluer soi-même, finalement.

Ils sont loin. « T’es sûr ? » Oui. On dirait bien qu’il ne se rend pas compte qu’il avance très bien depuis la précédente sortie du bois. Dans la descente, je laisse échapper quelques jurons : mon choix de souliers n’est pas des plus adéquats et je ne leur fais tout simplement pas confiance sur la roche glissante.

« Quoi, t’as tes Skechers ?  Tu ne voulais pas mettre tes Peregrine ? » Euh, comment dirais-je ?  Ben, la dernière fois que j’ai enfilé les Peregrine, disons qu’à mon retour au jeu, ça ne s’est pas vraiment bien passé, ça fait que j’ai un peu la chienne. Genre, comme…

Heureusement, mes jambes plus fraîches me permettent de compenser mes carences aux niveaux technique et matériel. C’est sans encombre que nous arrivons au chemin de Gaspé. « Si tu veux retourner à ton auto, c’est ici que ça se passe… »

Ouais, c’est une option que j’avais envisagée originalement. La raison ?  Un ischio récalcitrant qui avait eu la merveilleuse idée de commencer à jammer dimanche et de poursuivre sur sa lancée lors de ma dernière sortie mardi. Sauf que, ho timing, j’avais un rendez-vous avec Annie, ma masso (elle est foutrement bonne vous savez; sans elle, il n’y aurait pas eu de Massanutten, tout simplement) est parvenue à le faire relâcher. Et là, je ne sens à peu près plus rien, alors, mauvaise nouvelle : tu es pris avec moi, mon cher !

« Super ! »

(Au cas où ça vous serait venu à l’idée, je tiens à souligner qu’il n’y avait pas une once de sarcasme dans cette réponse)

***

« Je pense que cette montée-là est pire que la Lieutenant Dan ! »

La pluie a cessé, le jour va bientôt se lever. Nous piochons dans la montée qui suit de peu le chemin de Gaspé. Très abrupte, glissante, sans véritable point d’appui. Elle est vraiment chiante. Je tente d’encourager Pierre en lui disant qu’après, ça va être du gâteau, ou presque. Il ne va rester que le mont Gale. Ça achève.

Ce sont ces moments-là qui font les ultras. Quand la course s’éternise, quand les heures et les heures dans les sentiers commencent à peser, quand cette montée-là semble être la montée de trop… C’est cette capacité à aller puiser au plus profond soi pour avancer, encore et encore, qui fait la différence.

Comme les autres, cette montée ne résistera pas aux assauts de mon ami. Le reste de la section se déroule très bien et nous sommes accueillis par les cris et les applaudissements au lac Gale (km 145).

Pendant que Pierre s’éclipse aux toilettes, je m’affaire à remplir son réservoir et… à bouffer. Quand il revient, j’aime ce que je vois : un homme plus que prêt à s’attaquer à la dernière partie de son périple.  Nos compagnons de tantôt arrivent comme nous sommes sur le point de partir. « Vous êtes des machines, les boys ! ». Ben oui Stéphane, venant d’un gars qui s’est tapé le Tor, mettons que… Je me contente de répondre que c’est Pierre, la machine. Moi, bof…

Justement, la machine me lance : « On y va ? ».

You bet !

Principe universel au Bromont Ultra : se rendre au sommet du mont Gale, c’est toujours plus long qu’on pense. Pas grave, je le sais et le plus important, il le sait. Les sentiers sont beaux, les kilomètres passent plutôt rapidement.

Sauf qu’une racine (ou une roche) vient arrêter net sa progression. C’est la quatrième fois qu’il tombe et à chaque fois, j’ai de plus en plus peur que la fatigue lui ait enlevé le réflexe de se protéger.

Quelques jurons plus tard, je l’aide à se relever. Dommages mineurs: une éraflure à la main. Ça peut sembler bizarre, mais j’ai beaucoup appris de ces chutes. Non pas sur le « comment » de tomber, mais plutôt, sur l’acceptation de tomber. Moi, je suis tellement pissou que je suis trop prudent et au final, ça me ralentit. Aucune chute à Massanutten, ce n’est pas normal. Définitivement que c’est une leçon que je vais retenir.

Finalement, le sommet. Et la vue sur le lac… perdu dans la brume. Encore une fois. Je me demande si un jour, je verrai ce lac par un beau soleil…

« Tu vas voir, le nouvel ajout est vraiment bien ! »

Eh oui, il y a eu deux modifications significatives au parcours cette année et l’une d’elles consiste à faire un lien direct en tre les sections du lac Gale et du mont Oak, sans passer par le quartier général. Et pour ce faire, il faut passer ailleurs, sur un terrain privé en l’occurrence.

Et sur ce terrain privé, on trouve quoi ?  Un sommet (celui du mont Oak ?) où une plate-forme avec une table et des chaises ont été installées. Wow, ça doit être vraiment écoeurant… quand il fait beau. N’empêche, juste cette vue-là marque une amélioration considérable du parcours.

Après la descente, nous aboutissons sur un chemin de terre. Pas tellement plus loin, c’est l’entrée dans le réseau de sentiers du mont Oak, dernière étape de cette aventure.

À peine entrés dans les sentiers, nous tombons sur une dame qui est là, perplexe. « Vous faites quelle course ? » qu’elle demande. Le 160 solo. Ça a toujours un effet bœuf quand on répond ça… Et vous ?

« Le 12 dans un relais et là, ça fait deux fois que je passe ici. Je n’ai pas envie d’en faire 15 ou 18, ou… ». Pierre lui dit qu’elle n’a qu’à suivre les rubans et drapeaux roses et que le tour devrait être joué. Elle ne semble pas convaincue, alors elle se met à nous suivre.

En fait, elle essaie de nous suivre parce mon coureur, commençant à vraiment sentir que l’arrivée est proche, a définitivement enclenché la vitesse supérieure. Heureusement que le sentier n’est pas trop technique, sinon je me ferais larguer !  Lui qui parlait d’un temps au-dessus des 27 heures durant la nuit, s’aligne pour terminer sous 26h30.

Juste avant de sortir du bois, nous rejoignons un monsieur qui fait également le relais. En le dépassant, je lui demande si ça paraît que mon coureur a 158 kilomètres dans les jambes. « HEIN ?!? 158 kilomètres !!! ». Hi hi hi, un autre effet boeuf !

Arrive la clairière, nous marchons la montée. Je passe un bras autour de ses épaules, un large sourire fend mon visage. C’est fini. Tu l’as encore eu, mon ami. Maudit que je suis content !

« Merci Fred, merci pour tout ce que tu as fait… »

Euh… Tu veux dire m’empiffrer, lâcher des gaz sonores à toutes les 2 minutes et t’aider à te perdre ?  Ben, ça m’a fait plaisir !  Je peux recommencer n’importe quand, tu sais…

À l’approche de l’arche, je crois reconnaître une silhouette familière. Non, ça ne se peut pas…

Mais oui : c’est mon père !  Et qui est avec lui ?  Ma sœur !  Mon dream team qui est venu me voir jouer au pacer, elle est bonne celle-là !  On leur donne des high fives en passant.

Ca achève…    (photo: Jacques Giguère)

À environ 200 mètres de la ligne, on annonce l’arrivée de celui qui sera maintenant le seul à avoir complété toutes les éditions du Bromont Ultra. Je ralentis le pas, question de lui laisser la place devant.

Son épouse Line et sa fille Marion sont là, tout sourire. Une fois la ligne franchie, Gilles, Louis et plein d’autres se joignent à nous.

Et voilà, c’est fait !  Bravo mon ami !

Ça a été un honneur de t’accompagner.

Bromont Ultra, presque six semaines plus tard

J’avais mis la touche finale à ce billet jeudi dernier et avais prévu le publier vendredi soir ou durant la fin de semaine. Or, ça me semblait tellement futile suite aux événements de Paris que je ne voyais vraiment pas pourquoi je le ferais. Maintenant, je tente, tant bien que mal, de revenir à la « normale ». Amis français, si ce billet peut vous changer un tant soit peu les idées, vous m’en verrez plus que ravi. Mon coeur est avec vous, plus que jamais.

Cheville tendre oblige, je suis passé d’un rôle principal à celui de soutien au dernier Bromont Ultra qui s’est déroulé les 10 et 11 octobre derniers. Je dois avouer que l’expérience m’a ouvert les yeux sur la somme colossale de travail qui est requise pour mener à bien une telle entreprise. J’avais beau le savoir dans mon for intérieur, ce n’est jamais la même chose quand on le vit.

Récit d’une fin de semaine en trois actes.

Acte I : le montage

J’ai reçu un courriel me demandant de participer au montage quelques jours avant la date prévue. Comme je savais déjà que j’allais faire les quarts de travail de 16h à 20h le samedi, puis de minuit à 8h le dimanche au ravito principal, j’ai été un peu surpris de voir qu’on réclamait ma présence pour d’autres tâches. Mais bon, j’avais donné des disponibilités pour le vendredi en après-midi, alors je n’étais pas pour me défiler.

Ce qu’il y a de plaisant dans de telles circonstances, c’est que lorsqu’il n’y a plus de travail à faire, hé bien on s’en va, un point c’est tout. Donc, après avoir marqué le stationnement avec des piquets et des cordes, installé des pancartes, monté et déplacé des tentes, tout ça sous la pluie, mes deux compagnons et moi nous sommes retrouvés à ne rien faire. Il faut dire qu’il y avait beaucoup, beaucoup de monde sur place et la fourmilière était vraiment efficace. Déjà, à seulement sa deuxième année d’existence, l’organisation ne donne pas sa place côté logistique. Donc, après avoir erré un peu sur le chemin menant à l’arrivée, me rappelant la dernière fois où j’y avais posé les pieds 12 mois auparavant, je suis retourné à la maison. Deux grosses journées m’attendaient.

Acte II : le ravito

Cours ou cours pas ?  C’était la question existentielle en ce samedi matin. Comme j’aurais à pacer Fanny sur une trentaine de kilomètres le dimanche matin, la raison me commandait de me tenir tranquille. Mais il faisait si beau…

Peine perdue, je suis allé faire un tour. 10-12 km maximum, mais il fallait que je courre. Mon équilibre mental en dépendait.

Puis, coup d’œil aux résultats préliminaires avant de partir: Seb était passé en tête au 35e kilomètre. Et qui suivaient, 20 minutes derrière ?  Mes amis Louis, Pierre et Martin. J’aurais pu être là. J’aurais être là. Quelle torture !

Ce que j’ai vu sur la route de Bromont ne m’a fait aucunement regretter mon choix de courir. Le soleil était éclatant, les couleurs de l’automne, à leur apogée. Les montagnes m’appelaient, s’il avait fallu que je sois « à jeun »…

À mon arrivée, je me suis rendu au ravito principal où Pat et Joan fixaient au loin, attendant (im)patiemment le premier passage de Seb, au kilomètre 72. Je me suis joint à eux et ai découvert ce qui allait être ma réalité pour les prochaines heures: l’attente. Comme d’autres courses se déroulaient en même temps, c’était difficile de savoir si c’était bien lui qui arrivait quand quelqu’un se présentait tout en haut de la butte qui surplombe le parc équestre.

Puis, il est arrivé. C’était comme l’euphorie dans notre petite troupe. Il est passé en coup de vent et honnêtement, s’il n’avait pas eu à se soumettre à la pesée, pas certain qu’il se serait arrêté. En fait, il est passé tellement vite que François (son équipe de support au grand complet) l’a tout simplement raté.

Recommença ensuite l’attente. Comme mes amis avaient 20 minutes de retard au 35e kilomètre, je m’attendais à au moins 45 minutes de retard ici, sinon une heure. Je piaffais d’impatience, j’avais trop hâte de les voir. Je voulais, je devais savoir s’ils allaient bien. Après un certain temps, n’en pouvant plus, je suis parti en sens inverse à leur rencontre.

Après une éternité, Pierre et Martin se sont présentés au bas du chemin de terre arrivant du lac Gale. Louis les suivait, pas trop loin derrière. J’étais énervé comme un gamin. Comment ça va ?

« Comme après 70 kilomètres » me répondit Pierre qui n’avait pas son sourire habituel. C’est vrai qu’ils étaient dans la partie la plus difficile d’un ultra, soit celle où on commence à accuser le coup sans être rendu à la moitié.

Après leur avoir demandé de quoi ils pensaient avoir besoin, je suis parti à pleine vitesse pour retourner au ravito, question d’essayer de leur préparer le tout. J’avais un sentiment d’urgence, je tenais absolument à me rendre utile. À ce moment-là, j’ai compris pourquoi les bénévoles dans les ultras sont si dévoués : ils attendent des heures avant qu’un coureur daigne se pointer le nez, alors quand il y en a un qui arrive, on veut tout faire pour lui faciliter la vie, comme si on voulait se « racheter » pour le temps qu’on a passé à ne rien faire.

Par la suite, ça a été un peu plus rock’n’roll. Les coureurs se sont mis à arriver plus regroupés et naturellement, les tâches se sont séparées. Julia, la fille de Pat, prenait en note les heures d’arrivée. Pat et Joan s’affairaient aux drop bags et moi, je me suis retrouvé à transporter des chaises, à couper patates et bananes ainsi qu’à diriger les coureurs.

Sauf qu’à un moment donné, avec les équipes de soutien (sans compter l’équipe médicale), on commençait à joyeusement se piler sur les pieds. Pour certains accompagnateurs, ça paraissait qu’ils en étaient à leur première expérience: disons que l’efficacité n’était pas vraiment au rendez-vous. Beaucoup de conversations pas tellement pertinentes se déroulaient, auxquelles s’ajoutaient les coureurs du relais qui venaient piger dans les victuailles réservées aux coureurs des 80 et 160 kilomètres. Bref, c’était le bordel, au point où, à un moment donné, Pat a dû élever la voix et demander à tous ceux qui n’avaient pas d’affaire là de sortir, limitant le nombre de membres d’une équipe de support à une personne. Disons que ça a fait effet.

J’ai aussi été à même de constater une chose: moi qui croyais que j’étais lent aux ravitos, j’ai pu me consoler en observant les autres agir. Et j’en suis venu à la conclusion qu’en règle générale, plus un coureur est lent, plus il prend du temps à un ravito. Certains sont demeurés là une bonne quinzaine de minutes, ce qui est beaucoup trop long. Nous avons même dû en insister pour que quelques-uns finissent par partir, leur rappelant que plus ils tardaient, moins ils auraient le goût de relancer la machine.

Ça n’a pas été le cas de Fanny, celle que j’allais pacer plus tard, et avec qui j’ai fait connaissance alors qu’elle embarquait sur la balance. Après un petit câlin, elle a pris quelques trucs et s’est envolée. Je n’ai malheureusement pas pu la revoir au 80e kilomètre car mon capitaine, sentant que le rush achevait, m’a envoyé au dodo, ajoutant au passage que vu que la nuit serait tranquille, je n’avais pas à me dépêcher pour revenir.

Ainsi donc, après avoir mangé un peu, je me suis retrouvé dans mon sac de couchage que j’avais déroulé dans le RAV4. Étonnamment, j’étais foutrement bien, mis à part le fait que pour la première fois de ma vie, j’aurais vraiment souhaité mesurer 5 pouces de moins. Pas évident de dormir quand on est obligé de toujours garder ses jambes repliées. Mais j’ai tout de même réussi à perdre la carte 2 ou 3 heures.

De retour au ravito vers 2h, c’était le calme plat. Tout le monde était évidemment passé depuis belle lurette et mise à part la progression de Seb en tête de course, il n’y avait pas grand-chose d’autre que le suivi des coureurs à faire. Car, dans la nuit froide, il était important de ne pas les « perdre » et de savoir qui était toujours en course et qui avait dû quitter.

On me raconta d’ailleurs l’anecdote d’un coureur qui avait débuté sa deuxième boucle les yeux dans le vide, en chancelant. Joan avait prédit « qu’il ne ferait pas long » et effectivement, des gens l’ont retrouvé quelques centaines de mètres plus loin, couché dans le sentier. Évanoui ou endormi, on ne le sait pas trop, mais avec la froideur de la nuit, heureusement que quelqu’un était là car c’est l’hypothermie qui l’attendait.

Nous avons donc passé ce qui m’a semblé de longues heures à attendre. Il y a eu le départ du 80 kilomètres à 3h qui nous a un peu changé les idées, départ suivi de près par l’abandon de Vincent (après 4 kilomètres de course !) sur cheville foulée. Aussi, un coureur que nous avions « perdu » s’est présenté. Il s’était égaré, en avait ras le pompon et avait fini par retrouver le camp de base. Il s’est emparé de ses affaires et est parti sans dire un mot ou presque. Le parcours avait eu raison de lui.

Puis, ce furent les spéculations autour de l’arrivée de Seb. Son équipe, maintenant composée de François et de la blonde son pacer (dont j’oublie les noms) attendaient avec nous sous la tente. Après une éternité à voir passer sporadiquement des coureurs qui faisaient le relais, nous avons vu deux lampes frontales se pointer au loin.

C’étaient eux !  Branle-bas de combat, Seb s’en venait !  Après des heures, nous aurions enfin quelque chose d’utile à faire !!! Et que fit Seb en arrivant dans la tente ? « Du Coke !!! ». Il voulait du Coke. Il en a calé 2 ou 3 verres, puis est reparti en trombe pour sa dernière boucle de 8-9 km. Son pacer, qui venait à peine de s’asseoir, a laissé échapper un léger soupir de découragement, ayant l’air de dire : « Déjà ?!? ». Et voilà, après toute cette anticipation, nous avions une autre heure à tuer avant qu’il se passe à nouveau quelque chose.

Je l’ai pour ainsi dire passée à jaser avec son équipe de soutien et aussi, à me préparer pour ma matinée. Car j’anticipais le moment où Fanny allait m’appeler pour que j’aille la rejoindre au kilomètre 124. J’avais vraiment hâte.

Tout comme Joan l’an passé, Seb a eu droit à une haie d’honneur pour son arrivée, après un peu plus de 21 heures passées dans les sentiers. Tous les bénévoles et spectateurs présents se sont massés pour l’accueillir. C’est vraiment cool comme façon d’accueillir le grand gagnant. Son plus proche poursuivant allait arriver presque 5 heures plus tard…

Tout sourire et l’air pas trop fatigué comme c’est son habitude, il donnera quelques entrevues avant d’aller prendre une douche bien méritée. Comme on dit dans le milieu: great job !

Une fois la commotion terminée, j’ai commencé à sérieusement m’inquiéter pour Fanny dont je n’avais aucune nouvelle. Finalement, après avoir multiplié les contacts par radio, Pat a fini par apprendre qu’elle poursuivait son petit bonhomme de chemin, lentement mais sûrement.

Autre inquiétude: alors que Seb avait terminé depuis belle lurette, on nous apprenait que Bruno venait de quitter le ravito Balnéa (kilomètre 143). Or, pas de nouvelles de Martin et Pierre. Je me doutais que Louis en arrachait après l’avoir vu quitter péniblement pour son deuxième tour, mais les deux autres ?  Selon mes calculs et les temps de passage à la mi-parcours, ils auraient dû être passés depuis un bout de temps… J’étais persuadé qu’ils s’étaient perdus, surtout qu’ils n’étaient plus en deuxième place, eux les ultramarathoniens aguerris. Pour moi, ça n’avait pas de sens.

À force d’argumenter, mon raisonnement a fini pas faire son chemin dans la tête de Pat et Guylaine et voilà, j’avais semé un mini-vent de panique dans l’équipe. Fallait les retrouver !

Finalement, mes amis se sont effectivement perdus quelques minutes, mais ils ont surtout poursuivi en mode plus relaxe et quand Bruno les a rattrapés, ils n’ont pas poussé la note pour le suivre. Cette idée de nous inquiéter de même, aussi…  😉

À 6h, je reçus un appel de Fanny qui approchait du ravito « Chez Bob ». Elle prévoyait arriver au kilomètre 124 à 8 heures, je l’ai assurée que je serais là bien avant, au cas où…

Acte III: le pacing

J’étais bien sûr au Lac Bromont avant 8 heures. Le soleil se levait doucement sur une autre belle journée, j’allais faire une trentaine de kilomètres dans des sentiers, que pouvais-je demander de plus à la vie ?

Je me préparais tranquillement en jetant parfois un oeil à la route, d’où arrivaient les coureurs. À chaque fois qu’il y en avait un qui se présentait, j’espérais que ce soit elle, mais non. Un en particulier, Patrice (ben non, pas celui que vous connaissez…) est arrivé en boitant lourdement. La cheville complètement fichue, ce serait son dernier arrêt. Tout de suite, je lui ai offert de s’intaller dans le RAV4, question de ne pas frigorifier en attendant que sa douce moitié vienne le chercher. Je me suis également occupé d’avertir l’organisation de son DNF. Il était tellement reconnaissant que ça en était gênant…

Un autre coureur était là depuis un bout, sa blonde étant arrivée (elle allait le pacer) en même temps que lui. Elle avait pris le temps de se changer, de s’échauffer et de le masser. Quand je dis que ce n’est pas tout le monde qui passe en coup de vent à un ravito…

Fanny est arrivée comme ils partaient. M’attendant à ce qu’elle prenne 4-5 minutes, je terminais d’ajuster mes affaires et j’étais en train d’annoncer à Patrice que malheureusement, je devais l’évincer (j’avoue que ça me fendait le coeur de le faire et par après, je me suis dit que j’aurais pu juste lui demander de verrouiller les portes du RAV4 avant de partir, du con…) quand je l’ai entendue me lancer: « Je repars tout de suite, je ne veux pas manquer le cut-off ! ».

Hein ?  Déjà ?  Wo-ho, elle ne niaise pas avec le puck celle-là !  Je sens que je vais l’aimer…

Je suis donc parti à sa poursuite, un peu tout croche et ma Suunto neuve (que je ne connaissais pour ainsi dire pas du tout) pas encore prête pour l’action.

Pat m’avait dit: « Elle n’est peut-être pas la plus rapide, mais elle est vraiment tough ! ». Je dois avouer qu’il n’avait pas tort, bien au contraire. Pendant près de 6 heures, ce petit bout de femme qui mesure 5 pieds et pèse 100 livres, qui n’avait pas dormi depuis plus de 30 heures, avançait, encore et toujours, sans jamais se plaindre. Toute une force de caractère !

À la voir progresser, il était évident qu’elle avait mal. « Une ampoule » qu’elle me disait. À part ça, rien. Une vraie de vraie. On a jasé de tout et de rien. De course, évidemment, mais de la vie aussi. Quand elle m’a appris qu’elle était végétalienne, ma curiosité était piquée. Pour la première fois, j’allais avoir l’occasion de savoir c’était quoi, la vie d’un végétalien. Elle pensait peut-être que j’entretenais seulement la conversation pour la distraire, mais non, ça m’intéresse vraiment. C’est bien beau lire Scott Jurek, mais ce n’est pas comme échanger ouvertement sur le sujet.

Je dois avouer que j’ai appris bien des choses intéressantes et comme je le pensais, ce qu’elle trouve le plus difficile, c’est la partie « sociale » de ce mode de vie qui est la plus problématique. En effet, quand les parents et amis ne sont pas végétaliens, on fait quoi quand on est invité à souper ?

Quant au « pourquoi », je dois avouer que son argumentaire était solide et je ne pouvais rien lui opposer. À part que merde, c’est bon, de la viande et du fromage…

Nos discussions n’ont pas empêché le parcours de se dresser devant nous tel un véritable mur. À plusieurs reprises, je me suis dit: « Ha oui, cette partie-là… ». Les gens « normaux » et même les coureurs sur route ne peuvent imaginer ce que les ultramarathoniens doivent affronter comme terrain. J’avais envie de rire, quelques heures plus tôt, quand l’ami de Seb s’était étonné de voir que ce dernier avait pris 2 heures pour parcourir une section de 13 kilomètres. Hé oui, même Seb doit marcher par bouts… 🙂

Malheureusement pour Fanny, le chili absorbé au souper avait décidé de littéralement se transformer en courant d’air intestinal. Moi qui suis déjà plutôt actif de ce côté en temps normal, la fréquence de mes backfires était hallucinante. Au point où elle a fini par me lancer: « Je n’ai jamais vu quelqu’un qui pète comme toi ! ». Heu, comme première impression, on a déjà vu mieux, pas vrai ?  😉

Par contre, je m’arrangeais toujours pour être derrière elle quand ça se produisait. En fait, j’ai passé le plus clair du temps derrière, sauf quand le sentier était assez large pour qu’on puisse évoluer côte à côte. Je ne sais toujours pas si c’était la bonne chose à faire, mais je ne voulais pas qu’elle sente de la pression pour avancer et qu’elle risque une blessure à essayer de me suivre si je tentais de lui donner un rythme plus rapide devant.

Petit à petit, des coureurs du 80 km se sont mis à nous rattraper. À les voir aller, je me disais que dans mes meilleurs jours, j’aurais pu finir dans les 3 premiers. Puis, dans la section autour du mont Gale, ce fut au tour de ceux du 25 km. Et dans ce cas-là, pas question d’un top 3, ni même d’un top 10: de véritables fusées sont passées à côté de nous !  Je suis vraiment fait pour les longues distances, il n’y a pas à dire…

Le seul endroit où elle a perdu un peu de temps a été au ravito du Balnéa où elle a pris le temps d’aller aux toilettes. J’en ai profité pour m’empiffrer de wraps au poulet (ben quoi, je suis omnivore, j’ai le droit !) qui étaient écoeurants comme on dit si bien ici. Fanny, tu manques quand même quelque chose…  🙂

Par la suite, même si c’était la troisième fois que je me tapais cette partie de parcours, j’ai commis l’ultime erreur du pacer: encourager faussement ma coureuse en lui disant que la montée du mont Gale achevait. En fait, ça ne finissait tout simplement plus et à la fin, je ne me croyais plus moi-même quand je pensais que le sommet approchait. À me rappeler l’an prochain: le mont Gale ne finit pas, le mont Gale ne finit pas, le mont Gale ne finit pas…

Une fois rendus en haut, ce fut la longue descente et finalement, le chemin nous ramenant au camp de base. J’essayais de courir pour l’inciter à faire de même, mais après plus de 30 heures de course, il y a des limites à ce que le corps puisse accomplir.

En arrivant au centre équestre, tout de suite après la descente, sa famille l’attendait. L’ayant reconnue au loin, ils se sont tous mis à crier et elle m’a avoué: « Je vais me mettre à devenir émotive s’ils n’arrêtent pas ». Je lui ai donné un « câlin de côté », comme pour lui dire qu’elle pouvait se laisser aller un peu, elle en avait bien le droit.

Mais, bien que mon travail de pacer s’arrêtait là (sa cousine allait l’accompagner pour la dernière boucle de 8-9 km), ce n’était pas fini pour elle et elle est retournée en mode « finissons la job ». Pendant qu’elle était aux toilettes, je vérifiais le contenu de son sac d’hydratation et avant même que je m’en rende compte, elle était repartie. Ouais, c’est une vraie de vraie !

Je ne sais pas combien de temps ça lui a pris pour faire ladite boucle, mais ça m’a semblé très long. Heureusement que je la savais accompagnée, parce sinon, je me serais vraiment inquiété. Et comme j’étais retourné chercher mon auto (à la course, c’étaient deux petits kilomètres par la route) entre-temps, j’avais perdu contact avec sa famille, alors j’étais seul pour l’attendre à une centaine de mètre de l’arrivée…

Puis, au loin, je l’ai reconnue. Les membres de sa famille s’étaient rendus à sa rencontre, au moins 500 mètres avant l’arrivée. Je me suis précipité à leur rencontre et c’est en groupe que nous l’avons accompagnée jusqu’au fil, ses parents insistant pour que je termine à côté d’elle. C’est après 33 heures et 5 minutes d’effort, 55 minutes avant la coupure qu’elle franchira la ligne, en 16e position, deuxième femme à réussir le 160 kilomètres du Bromont Ultra.

Ça terminait de belle façon une fin de semaine vraiment pas comme les autres…

Mes impressions au final ?  Être de « l’autre bord » nous permet d’apprécier et de comprendre le travail incroyable que doivent se taper les membres de l’organisation. Ça nous permet également voir les dessous de ce qui se passe durant une telle épreuve. En plus, comme j’ai eu la chance de jouer de double rôle de pacer et de bénévole, je dois avouer que c’est très gratifiant de savoir qu’on a pu aider de quelconque façon des gens à réussir un tel défi. Immanquablement, des liens se créent. Juste la petite conversation que j’ai eue avec Benjamin, qui était sur un nuage après avoir complété son premier 100 miles valait la courte nuit et les heures passées à attendre.

Je compte bien récidiver un jour… mais je préfère courir !  🙂

À recommencer

6h45, c’était un peu tôt à mon goût pour me rapporter à la tente des bénévoles de la Grande Virée des Sentiers. Mais comme le premier départ serait donné à 8h00, c’était bien normal que j’arrive un petit peu avant, non ?

Aussitôt, j’ai fait la connaissance de Chantal, la responsable des bénévoles. Et tout de suite je l’ai aimée. Sympathique, affable, le genre de personne qu’on sent immédiatement qu’elle est agréable à côtoyer. Dès que je lui ai donné mon nom, elle s’est confondue en excuses à propos de la petite confusion qui s’était produite durant la semaine. En effet, elle croyait m’avoir rencontré aux entrainements du Club des Coureurs sur Route de Mont St-Bruno (ce sont eux qui organisent l’événement) et m’avoir donné mon assignation alors qu’il n’en était rien. Ce n’était vraiment pas grave…

Après quelques minutes de confusion, je me suis retrouvé dans une fourgonnette accompagné de 5 autres personnes en direction… des rues de la ville. En effet, j’agirais comme signaleur sur le parcours. Or, une partie de la course de 20 km (environ 3-4 km) se déroule dans les rues. Donc, après avoir aidé les autres à monter deux tables pour un point d’eau, on m’a amené à « mon » intersection, située entre les kilomètres 15 et 16. Moi qui connais les sentiers par cœur, j’étais assigné dans les rues d’une ville que je ne connais pas du tout. Ironique, n’est-ce pas ?

Il était 8h30. Comme David Le Porho avait gagné la course en 1h07 l’an passé, je m’attendais à le voir se pointer entre 8h50 et 8h55. J’avais donc du temps devant moi. Je l’ai passé en nettoyant la rue de quelques branches mortes sur lesquelles les coureurs, fatigués par la montée et les kilomètres, pouvaient trébucher ou glisser. J’ai aussi déplacé légèrement les cônes marquant le passage réservé pour les coureurs de façon à leur donner plus d’espace. Un policier à vélo est venu me voir et on a discuté un peu. Je lui ai fait part de mes craintes au niveau circulation, mais il avait l’air habitué et m’a dit en souriant que les automobilistes étaient respectueux en très grande majorité.

N’empêche que de la manière dont l’intersection était faite, les automobilistes n’allaient pas voir arriver les coureurs sur leur droite, des arbres cachant la vue. J’allais donc devoir être prévenant pour éviter qu’un coureur voit son rythme brisé ou pire, un accident.

Les minutes s’écoulaient. 8h50. 8h55. Ben voyons que se passait-il ?  Bientôt une heure que le départ avait été donné et toujours pas signe de vie… Le départ avait-il été retardé ?  Ou peut-être que David n’était pas là. Mais Sébastien lui ?

À 9h pile ou à peu près, j’aperçus un premier coureur au loin. La casquette vissée sur la tête avec la visière vers l’arrière et ses lunettes lui donnant un petit air intello (il est tout de même médecin !) je reconnus tout de suite le sympathique Sébastien Roulier. Spontanément, je me suis mis à taper des mains et à lancer des encouragements. Comme j’étais fin seul, ça faisait bizarre. Mais je me suis vite arrêté car le trouble se pointait derrière lui: un groupe de cyclistes.

Ils étaient 5 ou 6 et au rythme où ils avançaient, ils allaient couper le meneur de la course, c’était certain. Merde… Tout ce que je pouvais faire, c’était crier, alors je me suis exécuté: « On laisse passer le coureur s’il-vous-plait !  On laisse passer le coureur !!! ». Sébastien a poursuivi sa route sans broncher, tâchant d’éviter les vélos qui lui coupaient le chemin.  « Il faudrait nous avertir avant ! » m’a lancé un des cyclistes.

Vous avertir avant ?  Vous venez de remonter une rue qui fait un bon kilomètre de long sur laquelle des pancartes de stationnement interdit et des cônes orangés forment un couloir que je considèrerais comme assez évident merci. Vous avez certainement dépassé plusieurs coureurs sur ce kilomètre, il semble que c’était plutôt clair qu’il y avait une course d’organisée, non ?  Tu voulais quoi, du con ?  Une enseigne sur une feuille de plywood de 4′ x 8′ à tous les 10 pieds pour t’avertir ?  Tabarn…

Bref, j’étais en petit crapaud et je sentais que j’avais raté mon premier call. J’espérais juste que Sébastien ne s’était pas trop fait briser son rythme dans l’opération…

Après une éternité, un autre coureur se pointa. Puis deux autres. À chaque fois, j’envoyais des encouragements et les dirigeais au bon endroit. À un moment donné, la concentration de participants se mit à augmenter. Et bien évidemment, la circulation automobile aussi. C’est là que je me suis senti vraiment utile, arrêtant le trafic le temps que les coureurs passent, puis faisant signe aux voitures quand le chemin était libre. Plusieurs participants m’ont remercié, ça m’a fait chaud au cœur.

Quant aux automobilistes, ils ont été super pour la très grande majorité. À part un qui a montré une certaine impatience (il avait probablement été obligé d’attendre une loooongue minute), tout le monde a été très gentil. Il faut dire que je me faisais un devoir de les remercier à chaque fois, ça aidait peut-être…

Après un certain temps, de mois en moins de coureurs se sont mis à passer. Puis, plus rien. Heu, je faisais quoi, moi ?  Finalement, j’aperçus un monsieur qui avançait lentement, suivi de deux bénévoles. C’était le dernier coureur. J’ai décidé de me joindre à eux et terminer la course. Le coureur était monsieur Gilles Rancourt. Il avançait, lentement mais sûrement. Jamais il ne s’est arrêté, jamais il n’a marché.

Au fil des kilomètres, le bénévole qui fermait la course se faisait demander par walkie-talkie où nous étions rendus, car l’organisation s’inquiétait pour l’heure de départ du 5 km. Disons que c’est toute une gestion, organiser plusieurs épreuves qui partent et finissent toutes au même endroit. Car il n’était pas question que le 5 km parte avant la fin du 20 km, vu que nous allions arriver en sens inverse…

Finalement, à mesure que nous approchions, une foule se formait et voyant monsieur Rancourt accompagné de gars portant des t-shirts orangés, elle se mit à se faire entendre. Les cris fusaient de partout, j’en avais des frissons. Mais on dirait que ce n’était pas assez, alors j’en demandais plus et les gens répondaient. Monsieur Rancourt a terminé en 2:27:46 sous les acclamations du public. Un bien beau moment.

Le reste de la journée a été tout aussi plaisant. J’ai eu l’occasion de regarder le départ et l’arrivée du 5 km (remporté par Dany Croteau), puis de servir de « poteau » pour tenir les câbles limitant l’accès au parcours durant ce qui constitue toujours un moment fort dans ces événements: les courses de 1 km des petits.

Et  par pur hasard, qui s’est retrouvé à côté de moi pendant que je jouait au piquet ?  Le vainqueur du 20 km lui-même !  Comme nous avions déjà échangé par courriel, je me suis présenté et nous avons amorcé une petite jasette. Il se rappelait à peine l’incident de « mon » intersection. ce qui m’a soulagé. Nous avons parlé du parcours, de la course, du fait qu’il avait couru 140 km durant la semaine (gulp !) et 1 heure et demie au mont Orford la veille (double gulp !). Et il venait de planter tout le monde !  Je me demande bien par combien de minutes il aurait pu gagner s’il avait été le moindrement reposé…

Son fils étant inscrit dans une des courses, il l’a suivi, mais nous avons eu la chance reprendre notre conversation par après. Comme je lui parlais de marche en ultramarathon, il ne semblait pas trop comprendre. La raison est fort simple: il ne marche jamais !  Je n’en revenais pas. Même pas au Vermont 50 ?  Même dans le mur au 47e mille ? Shit…  Seb, es-tu vraiment certain d’être humain ? Après ça je me demande pourquoi il a terminé presque 2 heures avant moi… 😉

Un ultrarunner bien connu s’est ensuite joint à nous, la conversation tournant autour des futures courses, des championnats mondiaux auxquels Sébastien participera en juillet, du Vermont 100 (où les deux se retrouveront, espèces de chanceux !) et de bien d’autres choses.  C’est fou ce que la course peut me rendre sociable !  🙂

Puis, les gens ont commencé à s’en aller. Mais pour nous bénévoles, la journée n’était pas terminée: il fallait tout ramasser. Ça s’est fait dans la bonne humeur et je ne comptais plus les chaleureuses poignées de main que j’ai reçues avant de partir, vers 14h30.

Organiser un tel événement, c’est vraiment beaucoup, beaucoup de petites choses à penser, à prévoir. Et c’est beaucoup de travail, j’ai pu le constater. Mais le faire dans le plaisir et la bonne humeur, ça a été un pur bonheur. Originalement, mon but était d’amasser des heures en vue du Vermont 100 de l’an prochain. Mais j’ai tellement apprécié que je crois bien que ce sera un rendez-vous pour les prochaines années, Vermont 100 ou pas.

Pour une première fois de « l’autre côté »

Depuis que je cours, j’ai eu la chance de prendre part à un grand total de 23 compétitions organisées. À chaque occasion, des bénévoles étaient là pour nous aider, nous supporter, nous encourager. Peu importe la température, qu’il fasse chaud et humide ou froid, pluvieux et venteux, ils étaient là, toujours souriants, dévoués pour nous. À quelques occasions, j’ai eu beaucoup d’admiration pour ces personnes qui étaient présentes, malgré le mauvais temps. Nous coureurs avions payé et étions entrainés pour ce jour précis, alors la pluie n’était qu’un inconvénient. Mais rien n’obligeait ces valeureux bénévoles à braver les intempéries dans le seul et unique but de nous aider. Il aurait été bien plus facile pour eux de demeurer à la maison. Mais non, ils étaient là.

À chaque point d’eau, je me fais toujours un devoir de remercier la/le bénévole qui me tend un verre. À mon sens, c’est la moindre des politesses. Car sans eux, il n’y aurait pas de courses, tout simplement.

Hé bien, pour la première fois demain, je serai de « l’autre côté », c’est-à-dire que ce sera (enfin) mon tour d’aider les coureurs dans le cadre de la Grande Virée des Sentiers du Mont St-Bruno. À ce que j’ai compris, mon rôle sera de guider les coureurs sur les différents parcours. Ça tombe bien, disons que j’ai une assez bonne connaissance de l’endroit. Je vais tâcher de faire ça comme du monde tout en profitant au maximum de la chance que j’aurai de pouvoir observer de près la technique des meilleurs de la discipline au Québec. Je vais également essayer de rendre une partie des encouragements que j’ai reçus au cours des années. Car je connais très bien l’effet que peuvent avoir de bons mots bien placés sur le moral et au bon du compte, sur la performance d’un compétiteur.

Allons-nous assister à un 5e sacre consécutif pour David Le Porho dans l’épreuve-reine, le 20 km ?  Je m’attends également à voir un certain Sébastien Roulier aux avant-postes…  🙂

Bonne chance à tous et à toutes !

Du bénévolat, moi ?

Quand j’ai fait mon premier marathon, bien que je n’ai pas pris ça à la légère, disons que je ne m’en suis pas trop fait. C’était à l’époque où on pouvait encore s’inscrire pour l’épreuve durant l’expo-marathon, alors je m’étais donné le temps de voir si j’étais capable de faire la distance avant de finalement procéder, 5 ou  6 semaines avant la course. Cette époque vraiment pas si lointaine (c’était en 2007 !) est maintenant révolue. Les courses qui ont la moindre importance s’emplissent à pleine capacité en quelques jours, voire même quelques heures. Il faut donc être prévoyant et penser à long terme.

Étonnamment, le même phénomène s’observe pour certains ultramarathons. Les plus prestigieux, (entre autres le Western States 100, le Wasatch Front 100, le Hardrock 100, le Leaville Trail 100 et bien évidemment, le Vermont 100) s’emplissent très rapidement. Certains tiennent même une loterie, comme le Marathon de New York, pour “choisir” qui fera partie de l’épreuve. C’est fou à ce point-là !

Ces épreuves peuvent donc se permettre des petits “caprices”. Le Vermont 100, qui fait partie du Grand Slam of Ultrarunning, suit la voie tracée par les courses citées plus haut (à part Leadville) en exigeant de ses participants qu’ils aient fait “un minimum de 8 heures certifiées de bénévolat lors du Vermont 100,  du Vermont 50, de tout autre ultra de plus de 50 km ou de toute autre course approuvée par l’organisation. Ce bénévolat doit se faire au cours des 14 mois précédant l’épreuve”. Le bénévolat peut prendre plusieurs formes: faire partie de l’organisation, participer à l’entretien des sentiers, être à l’inscription, à l’information, aux points d’eau, etc. Toutefois, toute participation “active” dans une course est exclue: être entraineur ou être un lapin de cadence, par exemple.

Le but visé ?  Que les coureurs « redonnent à leur sport ». Je crois plutôt qu’ils ont de la difficulté à avoir des bénévoles et qu’en agissant ainsi, ils se trouvent plus facilement de la main-d’oeuvre. Mais bon, c’est juste mon avis…

La première fois que j’ai vu ça, je me suis exclamé: de quessé ?!?  Ces courses sont déjà plutôt dispendieuses en partant (l’inscription coûte 250$ pour le Vermont 100 2013), il faut faire du bénévolat en plus ?  Un participant peut toujours “racheter” son bénévolat, mais ça lui en coûtera 150$ supplémentaires. Et comme les autres épreuves du Grand Slam n’offrent pas cette option, je ne serais même pas surpris que cette avenue soit fermée quand je voudrai m’y inscrire, l’an prochain.

Pour être poli, disons que ça ne fait pas mon affaire. Je me dis qu’il faut vraiment, mais vraiment vouloir se taper 100 milles à pied pour payer ET faire du bénévolat en plus. Ou payer plus cher… Je commence sérieusement à me questionner sur mon état mental. Et puis non, je ne me questionne même plus… 😉

Quelles sont mes options alors ?  Les ultras de plus de 50 km au Québec, il y en a un: St-Donat. Mais j’avais envie de le COURIR moi, pas de me taper la route pour aller remplir les bouteilles d’eau de d’autres coureurs que je passerais la journée à envier… Le Vermont 50 ?  Même chose: trop loin pour ne pas le courir une fois que le voyage aura été fait. Et dans ce cas-là, je serais tellement jaloux des participants que je pense je mettrais du laxatif dans l’eau que je distribuerais. Ou peut-être des morceaux d’ex-lax parmi les bonbons, tiens…

Ne pouvant trouver de solution, j’ai écrit à l’organisation en leur expliquant mon cas. J’ai joint à mon courriel des liens vers certaines courses qui se déroulent en trail au Québec. Ces courses, soient les deux de la série X-trail Asics (Sutton et Orford) et la Virée des sentiers du mont St-Bruno sont pas mal plus courtes qu’un ultra (demi-marathon et 20 km respectivement), mais légèrement plus accessibles pour moi, mettons. Elles pourraient peut-être être “approuvées” par l’organisation… Manipulateur sur les bords, j’ai pris soin de commencer mon courriel en disant que j’avais ADORÉ mon expérience au Vermont 50 (ce sont les mêmes gens qui organisent les deux épreuves). Ben quoi, on gars n’a rien à perdre !  🙂

Quelques jours plus tard, j’ai reçu ma réponse: “mes” courses étaient acceptées. Ouf !  L’organisatrice en chef m’a toutefois fait remarquer que ça vaudrait peut-être la peine que je fasse la route pour être bénévole  au prochain Vermont 100. Ça me permettrait de faire partie de la fête un an d’avance et le camping est gratuit pour les bénévoles. Ouais, bon, quand ils disent que le camping est gratuit, je suppose que ça consiste à avoir une place pour planter une tente dans un champ, et peut-être avoir accès à un Johnny on the Spot

Enfin, je verrai. Ce serait tout de même un gros investissement côté temps. En fait, je serais probablement pas mal plus intéressé à faire le pacer de quelqu’un. En effet, pour les 30 derniers milles de l’épreuve, les participants peuvent être accompagnés d’un pacer. En fait, cette personne ne donne pas vraiment la cadence comme en course sur route, elle est plutôt là pour garder les yeux ouverts quand la fatigue commence à faire son oeuvre et s’amuse à jouer des tours à la conscience de celui qui a déjà 70 milles dans le corps. Ça c’est un rôle que j’aimerais beaucoup jouer, ce serait une expérience tellement enrichissante… Alors s’il y a quelqu’un qui lit ceci qui est à la recherche d’un pacer, je suis votre homme !  🙂

J’y pense: je pourrais faire quelques heures de bénévolat ET pacer quelqu’un ?  Hum…