2014, mieux que 2012 ?

Une autre année qui s’achève. La tradition étant maintenant bien établie, je vous offre aujourd’hui chers lecteurs une petite rétrospective de mon année de course à pied. Avec mes bons et mes moins bons coups.

Tourner en rond – La dernière fois que j’en ai parlé, c’était lors d’une conférence donnée par Joan. Il présentait l’ultramarathon sous toutes ses formes et parmi celles-ci, il y avait la version consistant à courir 50 kilomètres sur une piste. La première réaction des gens quand ils prennent connaissance de telles épreuves se résume généralement à un gros « Ouach ! » ou un « Beurk ! » de dégoût.

Et pourtant, je dois avouer que je n’ai pas détesté l’expérience. Ça a quelque chose de rassurant, courir sur une piste. Les toilettes sont toujours proches, les ravitaillements aussi. Et en hiver, ce n’est pas trop déplaisant de courir sans spinner. Je ne sais pas si je vais récidiver, mais je ne ferme certainement pas la porte.

La victoire – Dès le premier des 500 virages à effectuer durant la course, j’étais seul en tête. Pendant près de 4 heures, je me suis demandé si j’allais tenir le coup, s’il y avait un coureur qui me suivait et attendait que je faiblisse pour m’achever. Comment aurais-je pu savoir que Denis, celui qui m’encourageait à chaque fois que je le dépassais, était mon plus proche poursuivant ?

Puis, dans le dernier tour, on a prononcé les mots magiques: « vainqueur » et « record ». Ça m’a fait vraiment bizarre. On n’était évidemment pas en présence du contingent de coureurs du Marathon de Boston, mais j’ai tout de même savouré cette grande première.

Quant au record, il a tenu le coup lors de l’édition montréalaise des Marathons intérieurs JOGX et il ne sera pas en danger en 2015 pour la simple et bonne raison qu’on n’y tiendra pas d’épreuve de 50 km.

L’attente –  Hopkinton, le lundi 21 avril. Après New York quelques mois plus tôt, je me retrouve encore à attendre le départ d’un grand marathon en gelant comme un creton. Ça durera des heures. À ce moment précis, je me dis « Plus jamais ».

L’émotion – Quand les Japonais tout près ont fini par finir de jacasser, un silence complet s’est installé dans la grande cour de l’école secondaire où tous les coureurs étaient réunis. Les images de l’horreur qui avait secoué Boston et le monde entier me sont revenues en tête. Si j’étais là, c’était pour les victimes, pour montrer à tous les illuminés que cette terre peut porter que jamais, au grand jamais, ils ne me feront reculer.

Je ne sais pas si c’était la rage ou la tristesse, mais j’ai senti une vive émotion monter en moi. Et ai laissé échapper quelques sanglots.

Le parcours – Pourtant je le savais. Ce parcours-là tend un piège au coureur pour le bouffer tout rond par la suite. Je ne cessais de me répéter de prendre ça cool, de relaxer, de demeurer « en dedans ».

Rien à faire. Après avoir eu l’illusion que je pourrais être dans un grand jour (du con !), les premières crampes ont fait leur apparition avant même d’arriver à Newton, au 26e kilomètre. Heureusement, fort d’une expérience acquise à la dure (c’est le moins que l’on puisse dire !), j’ai réussi à gérer ma fin de course relativement convenablement et à terminer avec mon 3e meilleur temps en « carrière ».

Je me demande si un jour, je réussirai à traverser la petite banlieue de Brookline sans souffrir le martyr… Pour ça, va falloir que je refasse la course, ce dont je ne suis pas certain d’avoir envie.

Lapin-accompagnateurMarathon d’Ottawa. Pour la première fois, j’allais accompagner quelqu’un pour un marathon. J’avais bien peur de ne pas être à la hauteur. En effet, que faire et quand le faire ?  Encourager « positivement » ou « botter le derrière » ?  Et si Maggie frappait le mur ?

Disons que j’ai beaucoup appris ce jour-là. Des détails, mais qui peuvent faire toute une différence. Par exemple, les côtes sont beaucoup plus difficiles pour les coureurs moins rapides, car ils n’ont pas le même momentum à la base. Ils doivent donc travailler plus fort durant la montée qui semble alors plus longue pour eux. Aussi, prévoir que les ravitos pourraient être moins bien garnis et surtout, trainer de l’argent la prochaine fois. Quand Maggie a constaté que des Mr Freeze (il faisait chaud) avaient été distribués et qu’il n’en restait plus pour nous, j’ai senti son moral en prendre un coup. Si j’avais pu faire un arrêt au dépanneur à ce moment-là…

Lapin-accompagnateur (bis) – Sylvain, le coureur le plus rapide que j’ai eu l’occasion d’accompagner, faisait sa première incursion dans le monde du demi-marathon (en fait, le Tour du Lac Brome fait 20 kilomètres, mais bon…). J’ai eu l’occasion de me reprendre un peu, m’amusant à déconner avec mon ami, question de lui changer les idées durant l’épreuve.

La prochaine fois, ce sera pour la grande course. Il est prêt, ne reste plus qu’à le convaincre. Je crois même qu’il a le potentiel pour faire Boston dès sa première tentative.

Le feu – Ils étaient (presque) tous bien installés autour quand nous sommes arrivés. Les participants de la course de 120 km de l’Ultimate XC de St-Donat avaient trouvé la nuit particulièrement difficile. Pas tellement encourageant de voir des coureurs de ce calibre avoir le moral dans les talons après avoir complété (en sens inverse) le parcours qui nous attendait. Parmi les sept, seulement deux se joindraient à nous pour les 60 kilomètres restant.

Question de nous enlever le peu de confiance en nous qui nous restait, Joan s’est permis d’ajouter: « Vous allez vous amuser ! ». Moi qui avais trouvé l’épreuve particulièrement pénible 12 mois auparavant…

Les crampes (bis) – Je devrais plutôt dire LA crampe, soit celle qui semblait contracter tous les muscles de mon corps suite à une chute à quelques kilomètres du village de St-Donat. L’espace d’un instant, j’ai cru que jamais je ne me relèverais.

Le sourire – Celui de Luc quand il m’a aidé à me relever. Celui de Luc encore quelques minutes plus tard quand il m’a dit « Allez, on finit ça ensemble ! ». Et celui qu’on avait tous les deux quand on a traversé la ligne d’arrivée, main dans la main. C’est ce que j’aime par-dessus tout de la course en sentiers: on passe des heures et des heures sur le parcours et pourtant, on termine à égalité, la position n’ayant que finalement pas tellement d’importance (nous avons tout de même terminé en 14e place).

Le coup de pied – Celui de Pat. Donné sur le bout pied au sens propre, mais au derrière au sens figuré. En 2-3 phrases, il m’a convaincu que j’étais prêt pour un 100 miles. Il avait crissement raison.

L’imagination – Quelques jours après St-Donat, le travail m’a amené à effectuer un premier de très (trop ?) nombreux déplacements en Abitibi. Les longues heures, la fatigue accumulée, un nouvel environnement, plusieurs obstacles se sont dressés pour m’empêcher de vivre ma passion.

J’ai dû faire preuve d’imagination, mais j’ai trouvé à la fois le temps et les endroits pour courir. J’ai même pu parcourir à fond la caisse des sentiers de quads qui étaient ma foi fort praticables et très agréables.

Un collègue (beaucoup plus jeune que moi) m’a demandé où je trouvais l’énergie pour aller courir après des journées comme on se tapait au boulot. Honnêtement, j’aurais trouvé infiniment plus difficile d’aller m’enfermer dans ma chambre d’hôtel…

La bibitte rare – Dans un monde où les engins à moteur sont pratiquement élevés au niveau des dieux (j’exagère à peine), la perception qu’ont les gens d’un gars maigrichon qui court beau temps mauvais temps, pluie ou neige, varie à l’intérieur de la fourchette allant de l’extra-terrestre à la nuisance publique.

Mes collègues de la place, à force me côtoyer, ont semble-t-il adopté le terme « bibitte rare » pour me décrire. Un être humain en apparence tout à fait normal, mais bon, le soir, il court. Que voulez-vous, personne n’est parfait…

Mais on dirait que ce n’est pas toute la population locale qui ait aussi bien assimilé la présence d’oiseaux rares. En effet, pour la première fois depuis des années, j’ai entendu a un cabochon qui m’a lancé un « Cours Forrest, cours ! » comme je passais tout près. Moi qui croyais que cette race avait quitté la surface de la planète… Puis, le même soir, il y a un autre tata, au volant de son giga-pickup, qui s’est mis à me klaxonner (et ce n’était pas un petit coup de klaxon pour m’avertir de sa présence, c’était la version frénétique des klaxons à répétition ayant l’air de dire: « Tasse-toi de mon chemin ! ») alors que la rue était suffisamment large pour accommoder 5 ou 6 engins du calibre de celui dans lequel il semblait essayer d’exprimer sa virilité. Du con…

Le « froid » abitibien – Un seul mot pour le décrire: exagéré. Vent pour ainsi dire absent, humidité presque aussi rare, les conditions y sont quasi-idéales pour pratiquer des sports en hiver. Pour une même température, je porte une couche de moins de vêtements que dans la région de Montréal.

-20 degrés en Abitibi ?  C’est plus facile à endurer qu’un -10 dans le sud de la province. Je n’ai toutefois pas connu leurs fameux -40…

Lake Placid –  Nous avions tellement aimé, nous y sommes retournés. Un terrain de jeux incroyable pour un fou de la trail qui en a profité au maximum, encore une fois. Le Flume Trail System n’a maintenant plus aucun secret pour moi. Les heures que j’ai passées à l’arpenter dans tous les sens m’ont donné une base inestimable en vue des courses automnales.

La meilleure organisation ? – On dit souvent que ce sont les petits détails qui font la différence. Et l’organisation de l’UT Harricana semble particulièrement attentive à ces petits détails.

Par exemple, la présence de toilettes portables au départ. Ou le marquage des kilomètres sur le parcours. Ces petits riens qui font passer l’expérience de course d’agréable à très agréable.

Savoir s’adapter est également une très belle qualité pour une organisation. 300 coureurs qui finissent par aboutir dans un single track, ce n’est pas jojo. Ainsi, l’épreuve de 80 km ne reviendra pas en 2015 et sera remplacée par un 125 km qui partira de plus loin. Donc, moins de congestion à « subir » avec les coureurs du 65 km.

Ceci dit, nous devrions nous compter extrêmement chanceux que des gens passionnés mettent sur pied des épreuves de grande qualité comme St-Donat, Harricana et Bromont (je compte bien « rendre visite » aux autres ultras de la Belle Province dans un avenir rapproché). Pour avoir vécu l’expérience aux USA, les nôtres n’ont absolument rien à envier, bien au contraire, à nos voisins du sud. Et pourtant, ceux-ci devraient posséder une plus vaste expérience dans le domaine…

La bonne formule pour moi ? –  Après avoir lu le Field Guide to Ultrarunning d’Hal Koerner, j’ai décidé de faire un test à Harricana: j’allais prendre un gel à environ toutes les 30 minutes, sauf dans le cas où je boufferais aux ravitos. Résultat: aucune baisse d’énergie, aucun down pendant les 9h20 que j’ai passées dans les sentiers. J’allais certainement répéter.

Pas le plus rapide, ni le plus habile, mais… – Je suis parti en milieu de peloton, ou à peu près. Dans le single track, j’avais l’impression d’être une nuisance. Je ne comptais plus les coureurs que j’avais dû laisser passer.

Puis, je me suis rendu compte que les autres s’éternisaient aux ravitos, alors que je passais presque en coup de vent. Puis je rattrapais des coureurs, un à un, et ne me faisais jamais reprendre. Je poursuivais mon petit bonhomme de chemin, un point c’est tout. « Keep moving forward » que je ne cessais de me répéter.

Au final, une 13e place sur environ 150 partants, malgré une contracture au mollet droit. Serais-je fait pour les très longues distances ?

L’inconnu – 100 miles. 160 foutus kilomètres. En sentiers, en montagne. Il faut être fou pour faire ça, non ?  Pourtant, quelques minutes avant le départ de l’épreuve-reine du Bromont Ultra, je ne ressentais pour ainsi dire aucune nervosité, même si je me lançais dans l’inconnu. J’allais faire ce que j’aime le plus au monde pendant une journée complète. Quoi demander de mieux ?

La tente médicale – Après les 55 premiers kilomètres, premier passage au camp de base. Sous la tente, deux ou trois coureurs qui se tordent de douleur. Dans ma tête l’épreuve vient à peine de commencer, alors je trouve bizarre de voir autant de concurrents amochés. Du coup, je gagne plusieurs places au classement…

Première expérience – Je n’avais jamais couru à l’obscurité. On dit qu’il faut tester toutes le conditions de course, mais bon, je n’en avais pas eu l’occasion, alors…

En octobre, la nuit dure environ 13 heures. J’aurai passé tout ce temps à parcourir les bois et les chemins de campagne à la lueur de la frontale. Qui serait assez fou pour aller courir dans des sentiers à 3 heures du matin en temps « normal » ?  Personne, probablement. Mais dans le cadre d’une course, on dirait que c’est « normal », justement.

On avance plus lentement, les ombres font parfois (souvent) croire à la présence d’animaux bizarres, on se sent seul au monde, on réussit à se perdre même si on se déplace à la vitesse d’une maman paresseux affolée. Et pourtant, on se sent à sa place. Jamais je n’ai souhaité être ailleurs cette nuit-là.

« T’es deuxième !!! » – Thibault l’air serein, bien installé sur une chaise, une couverture sur les jambes, ses bâtons de marche à ses pieds. Il se retirait de la compétition, les quads fichus. Ces mots sortis de la bouche de ma douce moitié confirmaient ce que je venais de réaliser: il ne restait plus qu’un seul coureur devant moi, Joan, qui n’est tout simplement pas dans ma ligue. Derrière: trois ultramarathoniens aguerris. 56 longs kilomètres me séparaient encore de l’arrivée. Tellement de choses pouvaient encore se produire…

1h15 – C’est l’avance que j’avais sur Pierre, Louis et Martin lors de mon dernier passage au camp de base. À ce moment-là, ça m’est tombé dessus: j’allais vraiment terminer mon premier 100 miles en deuxième position. Wow !

L’équipe de support –  Sans elle, pas de deuxième place, point à la ligne. L’anticipation de voir mon père et ma tendre moitié à chaque poste de ravitaillement m’a littéralement transporté.

Mention spéciale à ma douce qui possède un don: celui de deviner mes besoins. Elle ne court pas et pourtant elle sait. Comment fait-elle pour deviner ?  Aucune idée, mais c’est bigrement efficace !

La belle surprise – Joan, sachant que j’en étais à ma première expérience, a attendu mon arrivée pendant presque deux heures. Je ne sais pas s’il peut savoir à quel point ça m’a fait plaisir…

L’anonymat – Réservé, même dans le monde composé d’introvertis des coureurs longue distance, j’étais peu connu du milieu au moment de prendre le départ. Durant toute la course, j’étais le « coureur inconnu qui avance bien ».

Maintenant, je ne pourrai plus évoluer sous le radar de la même manière. Mon amie Maryse a même tenté de me convaincre que je faisais partie de l’élite de la course en sentiers au Québec. C’est bien gentil de sa part, mais c’est juste que tout est tombé en place pour moi ce jour-là, un point c’est tout. L’élite, moi ?  Jamais de la vie !

L’entrevue – Une première pour moi. Il fallait que ce soit avec 160 kilomètres dans les jambes et 28 heures sans sommeil. Essayant de répondre par autre chose que « Oui » et « Non », les pensées se bousculaient dans ma tête… à la vitesse qu’elles pouvaient bien se bousculer !

J’ai tenté de profiter de l’occasion pour faire la promotion de notre merveilleux sport, de faire comprendre aux lecteurs tout ce que ça implique, etc. Le résultat n’a pas été si mal, mais aurait pu être mieux…

« Félicitations ! » –  Durant toute la journée, le cerveau ralenti par l’alcool (désolé Julie si je n’ai pas toujours été cohérent lors de nos conversations de jour-là !), je ne comptais plus les gens qui me félicitaient quand ils me croisaient. À chaque fois, je remerciais la personne bien humblement, gêné de toute cette attention.

Je suis carrément tombé des nues le lendemain matin lorsque mon voisin, avec qui nous n’avons pas beaucoup de contacts (vous savez, du genre: « Bonjour, bonjour » ou « Pourriez-vous ramasser le courrier pendant nos vacances ? ») m’a crié ses félicitations alors que j’étendais péniblement mes vêtements souillés de la veille sur la corde à linge. Comment savait-il ?  « J’ai lu ça dans le journal ! ».

C’était dans la version papier du journal ?!?  Shit… Avais-je dit des conneries durant l’entrevue ?

La récup –  Longue, très longue. Chevilles et pieds enflés, deux semaines complètement arrêté, reprise pénible ponctuée d’une contracture à l’ischio droit. Comment Scott Jurek a-t-il pu gagner Badwater deux semaines après avoir remporté le Western States ?

Meilleure que 2012 ? – En 2012, j’ai connu un printemps d’enfer en alignant des records personnels sur 10k, le demi et le marathon avec à la clé, une première qualification pour Boston. Ont suivi mon premier ultra, puis un autre record personnel sur marathon à l’automne, 14 pleines minutes plus rapide que mon temps de référence en début d’année.

Et pourtant, je me demande si je n’ai pas connu une meilleure année en 2014. Parce que cette fois-ci, je me suis vraiment dépassé. Ce que j’ai perdu en vitesse, je semble l’avoir gagné en endurance. Et surtout, je me sens dans mon élément, dans le bois, à m’adapter aux différentes conditions, loin du stress de l’effort continu de la course sur route.

Aurais-je trouvé mon créneau ?

2015 – Rien d’officiel pour l’instant, mais tout comme pour Boston jadis, ce sont les grands ultras vers lesquels je porte maintenant mon attention. Et qui dit grands ultras dit courses qualificatives. À suivre…

Des choses et d’autres

Ha les vacances… On prend le temps de vivre, de respirer par le nez, de courir (évidemment) et surtout, de mémérer de choses et d’autres sur son blogue !  🙂

L’Abitibi – Comme j’en ai déjà glissé un mot, j’ai pris quelques jours de repos après l’Ultimate XC et à mon retour au travail, tout s’est mis à débouler. Ce qui fait que je me suis retrouvé à Rouyn pour trois semaines et après une petite semaine au bureau, j’y suis retourné la première du mois d’août.

Les gens de l’Abitibi sont extraordinaires. Souriants, accueillants, affables. Travailler avec eux est un pur plaisir car on se sent immédiatement partie intégrante de leur équipe.

On ne peut toutefois pas dire que je sentais que je faisais totalement partie de la famille car mes collègues ont des intérêts un tantinet différents des miens: alors que j’affectionne les moyens de transport à propulsion humaine, eux ont plutôt tendance à préférer les engins à moteur. Inutile de vous dire qu’au début, ils trouvaient un peu bizarre de me voir courir à vive allure dans les chemins de terre reliant le poste à la civilisation. Mais au fil des jours et des semaines, ils se sont habitués à me voir quitter plus tôt et à me dépasser sur la route au volant de leur pick-up ou de leur Suburban.

Il m’est arrivé d’avoir à faire preuve d’imagination pour pouvoir assouvir mon besoin de me défouler. Il ne m’était pas toujours possible de quitter le travail plus tôt, alors j’attendais d’être rendu en « ville » et je me tapais le tour du lac Osisko sur la piste cyclable. Je préférais toutefois les chemins de terre et idéalement, j’aurais emprunté les nombreux sentiers de quatre-roues qu’on retrouve autour du poste. Sauf que nous y avons aperçu un ours dans le coin un bon matin, alors les sentiers…

Des souliers, des souliers et encore des souliersAttention, discussion technique droit devant !   Quand j’ai commencé à courir en sentiers, je me suis procuré des Salomon S-Lab que j’ai beaucoup aimés sauf pour une chose: les lacets. Leur système de serrage des lacets, efficace à première vue, devient rapidement plus lâche avec le temps (lousse, comme on dit), ce qui oblige le coureur à les resserrer fréquemment. Quand on a les pieds étroits comme moi, c’est assez agaçant merci.

Comme je redoutais que mes Montrail Bajada soient trop soft pour les difficultés de l’Ultimate XC, je me suis rendu à la Maison de la course à la recherche de conseils et surtout… de souliers !  Quand le vendeur a dit qu’il ne comprenait pas de quoi je me plaignais à propos des lacets de Salomon, parce que lui, il n’avait jamais eu de problème, la réponse qui m’est venue instantanément a été: « Pour moi, une longue sortie ne consiste pas seulement à monter en haut de ton Pain de sucre pis redescendre ! ».  Merde, j’en ai usé deux paires jusqu’à la corde, je sais de quoi je parle !  Si je dis qu’il se loussent, c’est qu’ils se loussent, calv!  Mais bon, j’ai laissé faire.

L’expert-maison m’a suggéré des New Balance 910 V1. Confortables, semelle avec de bons crampons, je les ai pris. Après deux ou trois sorties au mont Royal et une au mont St-Bruno, ils étaient mûrs pour les vraies affaires: St-Donat.

La course s’est bien déroulée côté comportement, mais quand j’ai constaté leur état à mon retour à la maison, ayoye !  Un bout de semelle était décollé et la « bottine » était brisée sur les deux pieds. À peine 200 kilomètres de course et ils sont finis. Verdict: cossin, patente à gosses, cochonnerie, le terme que vous voulez. Après m’avoir déçu sur la route, New Balance récidive en sentiers. Entre eux et moi, c’est définitivement la fin.

Mon prochain essai: les Saucony Peregrine 4. Il faudra bien un jour que je passe au zero drop, ça aiderait peut-être à élargir mon éventail au niveau choix…

Le dénivelés – Discussion l’autre jour avec René, mon voisin et ami, fervent cyclotouriste. Comme il quittait bientôt pour un voyage à vélo dans les Alpes, il me parlait des dénivelés qui l’attendaient. Au début, les chiffres ne me disaient pas grand chose jusqu’à ce que je fasse le lien avec ce que je connais: les courses en sentiers, bien évidemment.

Je lui ai fait part des dénivelés positifs que j’avais affrontés en ultra (2400 mètres à l’Ultimate XC, 9000 pieds au Vermont 50 et ça, ce n’est même pas considéré comme difficile) et il  semblait un peu incrédule. Je le comprends: une « balade » en montagne de 60 km offrirait un dénivelé comparable à une étape dans les Alpes au Tour de France ?

J’ai vérifié car je mettais moi-même en doute ce que j’avançais. Mais j’ai les chiffres à l’appui ici: le parcours de l’Ultimate XC offre 2418 mètres de montées et 2408 mètres de descente sur 60 km. Un peu comme si on passait tout le parcours sur une pente à 8%, soit à descendre, soit à monter.

Imaginez l’UTMB avec ses 9600 mètres répartis sur 168 km ou encore le Hard Rock avec ses 33992 pieds sur 100 milles… Ouch !  L’Ultimate, n’est pas si ultimate, après tout…  😉

Le Québec, une force en ultra ?   Je commence à y croire. Et sérieusement à part ça !  Déjà que nos représentants avaient fort bien paru à Bear Mountain en mai avec 3 coureurs parmi les 8 premiers, sans compter Rachel qui avait terminé 3e chez les femmes, voilà que coup sur coup, Joan décroche la 3e place et Seb, la 6e au Vermont 100 (un des quatre grands 100 miles en Amérique du Nord) puis Florent arrive au 3e rang à la fameuse Canadian Death Race après avoir mené pendant les trois quarts de l’épreuve.

On ne parle de petites courses locales ici, mais de courses de niveau international. Il y a de quoi être fiers !  Et le sport ne fait que commencer ici, alors on peut se laisser aller à rêver à un avenir encore meilleur, surtout avec la multiplication des courses en sentiers ici depuis 2 ou 3 ans.

Mais pourquoi nos représentants sont-ils si forts ?  J’ai une petite théorie là-dessus: l’adaptabilité. Le climat dans le nord-est américain, et particulièrement au Québec, est réputé difficile: très froid en hiver, relativement chaud en été. Et surtout, en tout temps, une présence incontournable: l’humidité. Il fait toujours humide ici, ce qui nous fait ressentir les hivers encore plus froids et les chaleurs d’été, insupportables. Pourtant, nous courons là-dedans à longueur d’année. Disons que par bouts, il faut vraiment vouloir !  Je me dis donc qu’une fois rendus en compétition, quand ça va mal, les coureurs d’ici serrent tout simplement les dents et se répètent: « Je me suis pas tapé tout ça pour abandonner ! ».

C’est juste une théorie, mais je pense qu’elle a tout de même un certain sens, non ?   🙂

À moitié nu… ou presque – Parlant d’adaptabilité, en revenant de l’Abitibi la semaine dernière, il faisait un vrai temps québécois d’été à Montréal: chaud et humide. Pour ma sortie du samedi, j’ai décidé de faire un mini-Joan de moi. Ok, j’avais mes bouteilles, mes souliers full padés, ma casquette. Il ne fallait tout de même pas y aller trop raide… J’ai toutefois laissé le t-shirt à la maison et suis sorti à moitié nu, portant seulement une paire de shorts.

Le sentiment de liberté que j’ai ressenti est difficile à décrire. C’était la première fois que je courais par une telle température et que j’avais les mêmes sensations que par temps frais. La sueur coulait de partout, mais je sentais que mon corps réussissait à réguler sa température sans problème. C’était le jour et la nuit par rapport à d’habitude. Wow !

À un moment donné, j’ai entendu une jeune femme crier un « Woo hou hou ! » admiratif comme je passais près de chez elle. Quand je me suis retourné et que j’ai vu que ça venait d’une fort jolie personne en bikini qui lavait sa voiture, je me suis dit que je devais rêver ou que finalement, le soleil commençait peut-être à attaquer mon cerveau. Un maigrichon dans la quarantaine qui « exhibe » son torse ainsi, voyons donc… Riait-elle de moi ?

Je me suis rendu compte qu’elle s’adressait à sa petite fille qui jouait dans une piscine pour enfants, juste à côté.

Ok, les choses étaient normales et je pouvais continuer à fond la caisse… avec le sourire !  🙂