2014, mieux que 2012 ?

Une autre année qui s’achève. La tradition étant maintenant bien établie, je vous offre aujourd’hui chers lecteurs une petite rétrospective de mon année de course à pied. Avec mes bons et mes moins bons coups.

Tourner en rond – La dernière fois que j’en ai parlé, c’était lors d’une conférence donnée par Joan. Il présentait l’ultramarathon sous toutes ses formes et parmi celles-ci, il y avait la version consistant à courir 50 kilomètres sur une piste. La première réaction des gens quand ils prennent connaissance de telles épreuves se résume généralement à un gros « Ouach ! » ou un « Beurk ! » de dégoût.

Et pourtant, je dois avouer que je n’ai pas détesté l’expérience. Ça a quelque chose de rassurant, courir sur une piste. Les toilettes sont toujours proches, les ravitaillements aussi. Et en hiver, ce n’est pas trop déplaisant de courir sans spinner. Je ne sais pas si je vais récidiver, mais je ne ferme certainement pas la porte.

La victoire – Dès le premier des 500 virages à effectuer durant la course, j’étais seul en tête. Pendant près de 4 heures, je me suis demandé si j’allais tenir le coup, s’il y avait un coureur qui me suivait et attendait que je faiblisse pour m’achever. Comment aurais-je pu savoir que Denis, celui qui m’encourageait à chaque fois que je le dépassais, était mon plus proche poursuivant ?

Puis, dans le dernier tour, on a prononcé les mots magiques: « vainqueur » et « record ». Ça m’a fait vraiment bizarre. On n’était évidemment pas en présence du contingent de coureurs du Marathon de Boston, mais j’ai tout de même savouré cette grande première.

Quant au record, il a tenu le coup lors de l’édition montréalaise des Marathons intérieurs JOGX et il ne sera pas en danger en 2015 pour la simple et bonne raison qu’on n’y tiendra pas d’épreuve de 50 km.

L’attente –  Hopkinton, le lundi 21 avril. Après New York quelques mois plus tôt, je me retrouve encore à attendre le départ d’un grand marathon en gelant comme un creton. Ça durera des heures. À ce moment précis, je me dis « Plus jamais ».

L’émotion – Quand les Japonais tout près ont fini par finir de jacasser, un silence complet s’est installé dans la grande cour de l’école secondaire où tous les coureurs étaient réunis. Les images de l’horreur qui avait secoué Boston et le monde entier me sont revenues en tête. Si j’étais là, c’était pour les victimes, pour montrer à tous les illuminés que cette terre peut porter que jamais, au grand jamais, ils ne me feront reculer.

Je ne sais pas si c’était la rage ou la tristesse, mais j’ai senti une vive émotion monter en moi. Et ai laissé échapper quelques sanglots.

Le parcours – Pourtant je le savais. Ce parcours-là tend un piège au coureur pour le bouffer tout rond par la suite. Je ne cessais de me répéter de prendre ça cool, de relaxer, de demeurer « en dedans ».

Rien à faire. Après avoir eu l’illusion que je pourrais être dans un grand jour (du con !), les premières crampes ont fait leur apparition avant même d’arriver à Newton, au 26e kilomètre. Heureusement, fort d’une expérience acquise à la dure (c’est le moins que l’on puisse dire !), j’ai réussi à gérer ma fin de course relativement convenablement et à terminer avec mon 3e meilleur temps en « carrière ».

Je me demande si un jour, je réussirai à traverser la petite banlieue de Brookline sans souffrir le martyr… Pour ça, va falloir que je refasse la course, ce dont je ne suis pas certain d’avoir envie.

Lapin-accompagnateurMarathon d’Ottawa. Pour la première fois, j’allais accompagner quelqu’un pour un marathon. J’avais bien peur de ne pas être à la hauteur. En effet, que faire et quand le faire ?  Encourager « positivement » ou « botter le derrière » ?  Et si Maggie frappait le mur ?

Disons que j’ai beaucoup appris ce jour-là. Des détails, mais qui peuvent faire toute une différence. Par exemple, les côtes sont beaucoup plus difficiles pour les coureurs moins rapides, car ils n’ont pas le même momentum à la base. Ils doivent donc travailler plus fort durant la montée qui semble alors plus longue pour eux. Aussi, prévoir que les ravitos pourraient être moins bien garnis et surtout, trainer de l’argent la prochaine fois. Quand Maggie a constaté que des Mr Freeze (il faisait chaud) avaient été distribués et qu’il n’en restait plus pour nous, j’ai senti son moral en prendre un coup. Si j’avais pu faire un arrêt au dépanneur à ce moment-là…

Lapin-accompagnateur (bis) – Sylvain, le coureur le plus rapide que j’ai eu l’occasion d’accompagner, faisait sa première incursion dans le monde du demi-marathon (en fait, le Tour du Lac Brome fait 20 kilomètres, mais bon…). J’ai eu l’occasion de me reprendre un peu, m’amusant à déconner avec mon ami, question de lui changer les idées durant l’épreuve.

La prochaine fois, ce sera pour la grande course. Il est prêt, ne reste plus qu’à le convaincre. Je crois même qu’il a le potentiel pour faire Boston dès sa première tentative.

Le feu – Ils étaient (presque) tous bien installés autour quand nous sommes arrivés. Les participants de la course de 120 km de l’Ultimate XC de St-Donat avaient trouvé la nuit particulièrement difficile. Pas tellement encourageant de voir des coureurs de ce calibre avoir le moral dans les talons après avoir complété (en sens inverse) le parcours qui nous attendait. Parmi les sept, seulement deux se joindraient à nous pour les 60 kilomètres restant.

Question de nous enlever le peu de confiance en nous qui nous restait, Joan s’est permis d’ajouter: « Vous allez vous amuser ! ». Moi qui avais trouvé l’épreuve particulièrement pénible 12 mois auparavant…

Les crampes (bis) – Je devrais plutôt dire LA crampe, soit celle qui semblait contracter tous les muscles de mon corps suite à une chute à quelques kilomètres du village de St-Donat. L’espace d’un instant, j’ai cru que jamais je ne me relèverais.

Le sourire – Celui de Luc quand il m’a aidé à me relever. Celui de Luc encore quelques minutes plus tard quand il m’a dit « Allez, on finit ça ensemble ! ». Et celui qu’on avait tous les deux quand on a traversé la ligne d’arrivée, main dans la main. C’est ce que j’aime par-dessus tout de la course en sentiers: on passe des heures et des heures sur le parcours et pourtant, on termine à égalité, la position n’ayant que finalement pas tellement d’importance (nous avons tout de même terminé en 14e place).

Le coup de pied – Celui de Pat. Donné sur le bout pied au sens propre, mais au derrière au sens figuré. En 2-3 phrases, il m’a convaincu que j’étais prêt pour un 100 miles. Il avait crissement raison.

L’imagination – Quelques jours après St-Donat, le travail m’a amené à effectuer un premier de très (trop ?) nombreux déplacements en Abitibi. Les longues heures, la fatigue accumulée, un nouvel environnement, plusieurs obstacles se sont dressés pour m’empêcher de vivre ma passion.

J’ai dû faire preuve d’imagination, mais j’ai trouvé à la fois le temps et les endroits pour courir. J’ai même pu parcourir à fond la caisse des sentiers de quads qui étaient ma foi fort praticables et très agréables.

Un collègue (beaucoup plus jeune que moi) m’a demandé où je trouvais l’énergie pour aller courir après des journées comme on se tapait au boulot. Honnêtement, j’aurais trouvé infiniment plus difficile d’aller m’enfermer dans ma chambre d’hôtel…

La bibitte rare – Dans un monde où les engins à moteur sont pratiquement élevés au niveau des dieux (j’exagère à peine), la perception qu’ont les gens d’un gars maigrichon qui court beau temps mauvais temps, pluie ou neige, varie à l’intérieur de la fourchette allant de l’extra-terrestre à la nuisance publique.

Mes collègues de la place, à force me côtoyer, ont semble-t-il adopté le terme « bibitte rare » pour me décrire. Un être humain en apparence tout à fait normal, mais bon, le soir, il court. Que voulez-vous, personne n’est parfait…

Mais on dirait que ce n’est pas toute la population locale qui ait aussi bien assimilé la présence d’oiseaux rares. En effet, pour la première fois depuis des années, j’ai entendu a un cabochon qui m’a lancé un « Cours Forrest, cours ! » comme je passais tout près. Moi qui croyais que cette race avait quitté la surface de la planète… Puis, le même soir, il y a un autre tata, au volant de son giga-pickup, qui s’est mis à me klaxonner (et ce n’était pas un petit coup de klaxon pour m’avertir de sa présence, c’était la version frénétique des klaxons à répétition ayant l’air de dire: « Tasse-toi de mon chemin ! ») alors que la rue était suffisamment large pour accommoder 5 ou 6 engins du calibre de celui dans lequel il semblait essayer d’exprimer sa virilité. Du con…

Le « froid » abitibien – Un seul mot pour le décrire: exagéré. Vent pour ainsi dire absent, humidité presque aussi rare, les conditions y sont quasi-idéales pour pratiquer des sports en hiver. Pour une même température, je porte une couche de moins de vêtements que dans la région de Montréal.

-20 degrés en Abitibi ?  C’est plus facile à endurer qu’un -10 dans le sud de la province. Je n’ai toutefois pas connu leurs fameux -40…

Lake Placid –  Nous avions tellement aimé, nous y sommes retournés. Un terrain de jeux incroyable pour un fou de la trail qui en a profité au maximum, encore une fois. Le Flume Trail System n’a maintenant plus aucun secret pour moi. Les heures que j’ai passées à l’arpenter dans tous les sens m’ont donné une base inestimable en vue des courses automnales.

La meilleure organisation ? – On dit souvent que ce sont les petits détails qui font la différence. Et l’organisation de l’UT Harricana semble particulièrement attentive à ces petits détails.

Par exemple, la présence de toilettes portables au départ. Ou le marquage des kilomètres sur le parcours. Ces petits riens qui font passer l’expérience de course d’agréable à très agréable.

Savoir s’adapter est également une très belle qualité pour une organisation. 300 coureurs qui finissent par aboutir dans un single track, ce n’est pas jojo. Ainsi, l’épreuve de 80 km ne reviendra pas en 2015 et sera remplacée par un 125 km qui partira de plus loin. Donc, moins de congestion à « subir » avec les coureurs du 65 km.

Ceci dit, nous devrions nous compter extrêmement chanceux que des gens passionnés mettent sur pied des épreuves de grande qualité comme St-Donat, Harricana et Bromont (je compte bien « rendre visite » aux autres ultras de la Belle Province dans un avenir rapproché). Pour avoir vécu l’expérience aux USA, les nôtres n’ont absolument rien à envier, bien au contraire, à nos voisins du sud. Et pourtant, ceux-ci devraient posséder une plus vaste expérience dans le domaine…

La bonne formule pour moi ? –  Après avoir lu le Field Guide to Ultrarunning d’Hal Koerner, j’ai décidé de faire un test à Harricana: j’allais prendre un gel à environ toutes les 30 minutes, sauf dans le cas où je boufferais aux ravitos. Résultat: aucune baisse d’énergie, aucun down pendant les 9h20 que j’ai passées dans les sentiers. J’allais certainement répéter.

Pas le plus rapide, ni le plus habile, mais… – Je suis parti en milieu de peloton, ou à peu près. Dans le single track, j’avais l’impression d’être une nuisance. Je ne comptais plus les coureurs que j’avais dû laisser passer.

Puis, je me suis rendu compte que les autres s’éternisaient aux ravitos, alors que je passais presque en coup de vent. Puis je rattrapais des coureurs, un à un, et ne me faisais jamais reprendre. Je poursuivais mon petit bonhomme de chemin, un point c’est tout. « Keep moving forward » que je ne cessais de me répéter.

Au final, une 13e place sur environ 150 partants, malgré une contracture au mollet droit. Serais-je fait pour les très longues distances ?

L’inconnu – 100 miles. 160 foutus kilomètres. En sentiers, en montagne. Il faut être fou pour faire ça, non ?  Pourtant, quelques minutes avant le départ de l’épreuve-reine du Bromont Ultra, je ne ressentais pour ainsi dire aucune nervosité, même si je me lançais dans l’inconnu. J’allais faire ce que j’aime le plus au monde pendant une journée complète. Quoi demander de mieux ?

La tente médicale – Après les 55 premiers kilomètres, premier passage au camp de base. Sous la tente, deux ou trois coureurs qui se tordent de douleur. Dans ma tête l’épreuve vient à peine de commencer, alors je trouve bizarre de voir autant de concurrents amochés. Du coup, je gagne plusieurs places au classement…

Première expérience – Je n’avais jamais couru à l’obscurité. On dit qu’il faut tester toutes le conditions de course, mais bon, je n’en avais pas eu l’occasion, alors…

En octobre, la nuit dure environ 13 heures. J’aurai passé tout ce temps à parcourir les bois et les chemins de campagne à la lueur de la frontale. Qui serait assez fou pour aller courir dans des sentiers à 3 heures du matin en temps « normal » ?  Personne, probablement. Mais dans le cadre d’une course, on dirait que c’est « normal », justement.

On avance plus lentement, les ombres font parfois (souvent) croire à la présence d’animaux bizarres, on se sent seul au monde, on réussit à se perdre même si on se déplace à la vitesse d’une maman paresseux affolée. Et pourtant, on se sent à sa place. Jamais je n’ai souhaité être ailleurs cette nuit-là.

« T’es deuxième !!! » – Thibault l’air serein, bien installé sur une chaise, une couverture sur les jambes, ses bâtons de marche à ses pieds. Il se retirait de la compétition, les quads fichus. Ces mots sortis de la bouche de ma douce moitié confirmaient ce que je venais de réaliser: il ne restait plus qu’un seul coureur devant moi, Joan, qui n’est tout simplement pas dans ma ligue. Derrière: trois ultramarathoniens aguerris. 56 longs kilomètres me séparaient encore de l’arrivée. Tellement de choses pouvaient encore se produire…

1h15 – C’est l’avance que j’avais sur Pierre, Louis et Martin lors de mon dernier passage au camp de base. À ce moment-là, ça m’est tombé dessus: j’allais vraiment terminer mon premier 100 miles en deuxième position. Wow !

L’équipe de support –  Sans elle, pas de deuxième place, point à la ligne. L’anticipation de voir mon père et ma tendre moitié à chaque poste de ravitaillement m’a littéralement transporté.

Mention spéciale à ma douce qui possède un don: celui de deviner mes besoins. Elle ne court pas et pourtant elle sait. Comment fait-elle pour deviner ?  Aucune idée, mais c’est bigrement efficace !

La belle surprise – Joan, sachant que j’en étais à ma première expérience, a attendu mon arrivée pendant presque deux heures. Je ne sais pas s’il peut savoir à quel point ça m’a fait plaisir…

L’anonymat – Réservé, même dans le monde composé d’introvertis des coureurs longue distance, j’étais peu connu du milieu au moment de prendre le départ. Durant toute la course, j’étais le « coureur inconnu qui avance bien ».

Maintenant, je ne pourrai plus évoluer sous le radar de la même manière. Mon amie Maryse a même tenté de me convaincre que je faisais partie de l’élite de la course en sentiers au Québec. C’est bien gentil de sa part, mais c’est juste que tout est tombé en place pour moi ce jour-là, un point c’est tout. L’élite, moi ?  Jamais de la vie !

L’entrevue – Une première pour moi. Il fallait que ce soit avec 160 kilomètres dans les jambes et 28 heures sans sommeil. Essayant de répondre par autre chose que « Oui » et « Non », les pensées se bousculaient dans ma tête… à la vitesse qu’elles pouvaient bien se bousculer !

J’ai tenté de profiter de l’occasion pour faire la promotion de notre merveilleux sport, de faire comprendre aux lecteurs tout ce que ça implique, etc. Le résultat n’a pas été si mal, mais aurait pu être mieux…

« Félicitations ! » –  Durant toute la journée, le cerveau ralenti par l’alcool (désolé Julie si je n’ai pas toujours été cohérent lors de nos conversations de jour-là !), je ne comptais plus les gens qui me félicitaient quand ils me croisaient. À chaque fois, je remerciais la personne bien humblement, gêné de toute cette attention.

Je suis carrément tombé des nues le lendemain matin lorsque mon voisin, avec qui nous n’avons pas beaucoup de contacts (vous savez, du genre: « Bonjour, bonjour » ou « Pourriez-vous ramasser le courrier pendant nos vacances ? ») m’a crié ses félicitations alors que j’étendais péniblement mes vêtements souillés de la veille sur la corde à linge. Comment savait-il ?  « J’ai lu ça dans le journal ! ».

C’était dans la version papier du journal ?!?  Shit… Avais-je dit des conneries durant l’entrevue ?

La récup –  Longue, très longue. Chevilles et pieds enflés, deux semaines complètement arrêté, reprise pénible ponctuée d’une contracture à l’ischio droit. Comment Scott Jurek a-t-il pu gagner Badwater deux semaines après avoir remporté le Western States ?

Meilleure que 2012 ? – En 2012, j’ai connu un printemps d’enfer en alignant des records personnels sur 10k, le demi et le marathon avec à la clé, une première qualification pour Boston. Ont suivi mon premier ultra, puis un autre record personnel sur marathon à l’automne, 14 pleines minutes plus rapide que mon temps de référence en début d’année.

Et pourtant, je me demande si je n’ai pas connu une meilleure année en 2014. Parce que cette fois-ci, je me suis vraiment dépassé. Ce que j’ai perdu en vitesse, je semble l’avoir gagné en endurance. Et surtout, je me sens dans mon élément, dans le bois, à m’adapter aux différentes conditions, loin du stress de l’effort continu de la course sur route.

Aurais-je trouvé mon créneau ?

2015 – Rien d’officiel pour l’instant, mais tout comme pour Boston jadis, ce sont les grands ultras vers lesquels je porte maintenant mon attention. Et qui dit grands ultras dit courses qualificatives. À suivre…

Une saison qui bat son plein

Quand on suit un peu ce qui se passe dans le monde de la course sur route, on remarque rapidement une chose: l’année est divisée en deux. Les principaux marathons sont organisés soit au printemps (Tokyo, Boston, Londres), soit à l’automne (Berlin, Chicago, New York). Plus près de chez nous, la saison de printemps culmine avec le Marathon d’Ottawa alors qu’à Montréal, la course se déroule fin septembre.  Toronto a deux marathons, un au printemps, l’autre à l’automne. Le but visé en organisant les courses à ces périodes de l’année est évidemment d’améliorer les chances d’avoir  des conditions idéales (donc, des températures fraîches) pour les concurrents. C’est aussi pour cette raison que dans bien des cas, le départ est donné très tôt le matin.

Dans le monde des ultramarathons, on ne pense toutefois pas de la même manière. Les organisateurs se disent que tant qu’à avoir des gens assez fous pour se lancer dans de telles aventures, aussi bien leur rendre la vie encore plus difficile. Donc, des parcours en montagnes et des courses qui se déroulent souvent par temps chaud.

Ce qui fait que la saison des ultramarathons est à son plus fort présentement, en pleine canicule. Ainsi donc, le fameux Western States 100 a eu lieu le même jour que l’Ultimate XC, soit le 29 (et le 30)juin. Le titanesque Hardrock 100, avec ses 34000 pieds de dénivelés (dans un sens et dans l’autre), avait lieu les 12 et 13 juillet, le désormais célèbre Badwater 135 s’est déroulé de lundi jusqu’à aujourd’hui et finalement, on retrouvera plusieurs Québécois au Vermont 100, samedi et dimanche.

Comme l’an passé, j’ai suivi avec beaucoup d’intérêt Badwater. Détail remarquable, sur les 96 concurrents qui ont pris le départ, 81 ont rallié l’arrivée à l’intérieur du temps alloué, soit 48 heures. Certains pourraient croire que faire 135 milles, soit 217 km, en 48 heures, ce n’est finalement qu’avancer à 4.5 km/h de moyenne, alors ça ne doit pas être si dur que ça. Sauf que se taper cette distance-là dans le désert, en endurant des températures dépassant parfois les 50 degrés Celcius, il faut le faire !  Et ça, c’est sans compter qu’après 122 milles de course, les 13 derniers se font en montant. Pour les passionnés de cyclisme, dites-vous que c’est l’équivalent du mont Ventoux, par où le Tour de France est passé dimanche. Ouch !

J’encourageais virtuellement et à distance une certaine recrue: monsieur Karstein Solheim qui, à 76 ans, tentait de réussir cet exploit pour la première fois. Il a malheureusement dû s’arrêter en chemin. J’espère seulement qu’il va bien.

Ceci dit, je n’enviais personne qui se retrouvait là. Pour le Vermont 100 par contre… Malgré la météo exécrable, j’ai adoré son petit frère, le Vermont 50, avec son air pur, ses montagnes et ses chemins de terre me rappelant le coin où mes parents habitent. Je souhaite la meilleure des chances à tous les veinards qui y seront: profitez-en bien et surtout, amusez-vous !  Dimanche matin, je vais certainement me garrocher sur le site de l’événement, question de voir comment ça s’est passé pour vous.

Quant à moi, excellente nouvelle aujourd’hui: je vais voir Sophie-mon-ultra-chiro demain. Je ne sais pas s’il y a eu une annulation ou si elle a fait un trou dans son horaire pour moi, mais l’essentiel, c’est que quelqu’un devrait trouver et probablement corriger la cause de mon mal. Car c’est bien beau s’occuper des symptômes, mais ça ne donne pas grand chose si on ne s’attaque pas à l’origine-même du problème, n’est-ce pas ?

Marshall Ulrich – Running On Empty

C’était un cadeau d’anniversaire de la part de mes beaux-parents. Mais vue sa nature, je savais que c’était ma tendre moitié qui en avait fait l’achat: c’était un livre de course. En fait non, c’était un livre à propos d’un être humain qui court, nuance très importante. Quand je l’ai vu, je suis parti à rire. J’ai lui ai demandé si elle savait qui était Marshall Ulrich, l’auteur. Elle l’ignorait.

RunningOnEMpty

Qui est Marshall Ulrich ?  C’est tout simplement Monsieur Badwater. Il détient le record pour le nombre de participations (21, et il y sera encore à la mi-juillet), le nombre de courses complétées (18) ainsi que le temps le plus rapide sur le parcours original, celui de 146 milles (il a été ramené à “seulement” 135 milles il y a plusieurs années). Sachant qu’elle craint comme la peste que je décide de me lancer dans cette folle aventure un jour, j’ai trouvé très drôle qu’elle me procure un livre écrit par le grand maître de cette épreuve.

Parmi les autres exploits d’Ulrich, on compte le “Badwater Quad”, c’est-à-dire DEUX allers-retours de ce parcours infernal, un Badwater en mode pleinement autonome (soit sans aucune aide externe, il transportait lui-même tout ce dont il avait besoin: eau, nourriture, vêtements, etc.), l’ascension des plus hauts sommets de tous les continents et plein d’autres.

Dans Running on Empty, il nous raconte ce qu’il identifie comme ce qu’il a vécu de plus difficile au niveau performance athlétique: sa traversée des États-Unis à la course… à l’âge de 57 ans. Traverser le continent à pied, c’est déjà un exploit en soit. Mais le but initial n’était pas seulement “de le faire”. Nah, ça aurait été trop facile. Il fallait battre le record du monde, rien de moins… Le record à ce moment-là était de 46 jours, 8 heures et 36 minutes, soit une moyenne de 66.1 milles (106 kilomètres) par jour. Officiellement, Ulrich visait les records “Maîtres” (40 ans et plus) et “Grands Maîtres” (50 ans et plus), mais dans son for intérieur, il voulait le record absolu.

Charlie Engle, un (futur ex-) ami, et lui se sont lancés dans cette aventure un peu folle le 13 septembre 2008, quand ils sont partis de l’Hôtel de Ville de San Francisco direction New York dans la bonne humeur, avec comme objectif de faire 70 milles (113 km !) par jour. Rapidement, les deux compagnons se sont séparés, chacun y allant à son rythme.

La cadence infernale des premiers jours fit son oeuvre. Les deux athlètes devaient passer de très longues heures à avancer sur la route, combattant la chaleur et le vent. Les nuits de sommeil étaient courtes et le moral descendait lentement mais sûrement. Les blessures se mirent à faire leur apparition. Charlie dut abandonner après seulement 17 jours. Quant à Marshall, il fut terrassé par LA blessure qui fait trembler tous les coureurs: la fameuse fascite plantaire (ce petit vidéo montre assez bien ce que nos deux comparses ont dû subir).

Pendant que le temps continuait à avancer,  il passa une imagerie par résonance magnétique. Évidemment, le médecin lui suggéra de tout arrêter. Évidemment Ulrich, qui avait “diminué” la cadence à 60 milles par jour, demanda s’il ne pouvait pas se limiter à 40 milles à la place. Il continua ainsi, les bobos s’accumulant, mais la fascite se tenant à l’écart. Progressivement, il réussit à retourner à son rythme de 60 milles par jour. Et arriva finalement à New York, en 52 jours et 12 heures, battant au passage les records chez les Maîtres et bien évidemment, les Grands Maîtres.

Son récit nous raconte les coulisses de cet exploit. Il nous parle de toute la logistique nécessaire à la réussite, des tensions qui ne pouvaient faire autrement que de se développer entre les divers intervenants. Car il ne faut pas se leurrer, une grosse équipe de soutien est tout simplement indispensable pour que l’athlète puisse continuer à avancer, encore et toujours. Et au fil des jours, des semaines, les membres de cette équipe se sont épuisés à la tâche, faisant éclater les conflits.

L’aspect monétaire était évidemment non-négligeable. Cette aventure avait été financée par une compagnie de production de films qui en retour, reçut la permission de filmer les deux coureurs pour en faire un documentaire, Running America  (nos voisins du sud peuvent être tellement originaux quand ils s’y mettent… On peut visionner le trailer ici). Or, comme c’était Charlie qui avait réussi à obtenir le financement et qu’il a dû quitter, chaque dollar dépensé par la suite par Ulrich et son groupe fut scruté à la loupe. Et quand des amis commencent à se quereller à propos d’argent…

Ulrich nous raconte aussi ses états d’âme, les difficultés qu’il a eu à surmonter, autant physiques que psychologiques ou émotionnelles, pour se rendre à destination. À tous les jours, il voulait arrêter. À tous les jours, sa femme, qui était à ses côtés durant toute la “course”, voulait qu’il arrête. Mais ils ne s’en sont jamais parlé et il a continué. Sans vraiment en avoir la prétention, ce livre est finalement une belle histoire d’amour.

Bien qu’inspirant à bien des égards, ce bouquin m’a amené la conclusion suivante: “Jamais de la vie !”. À chaque page, on sent la souffrance et quand il arrive à New York, un seul sentiment ressort: le soulagement, ce qu’on peut constater en regardant le trailer d’ailleurs. Pas la joie d’avoir accompli quelque chose de grandiose, juste un gros “Enfin, c’est fini !”. Pas de quoi donner le goût de faire de même…  Bref, si (je dis bien si) l’idée me prend un jour de traverser le pays à la course, ce ne sera pas avec l’idée de battre des records. C’était beaucoup trop dur juste à le lire, alors j’imagine à peine ce que ça peut être le vivre…

Un autre élément que j’ai retenu dans tout ça: l’alimentation. Contrairement à Scott Jurek, Marshall Ulrich croit que l’être humain est omnivore. Et il a avalé à peu près n’importe quoi durant son périple: fruits, légumes, viande, desserts, fast food, barres énergétiques, boissons gazeuses, Red Bull, café, etc. Tout sauf… de l’eau !  Pourquoi ?  Pour la simple et bonne raison qu’il voulait que tout ce qu’il avale contienne des calories.

Au final, une lecture très intéressante et aussi, très instructive. C’est un must absolu pour tout coureur qui désirerait “essayer ça un jour”. Je la recommanderais à tous les coureurs longue distance, question de se rassurer un peu: non, vous n’êtes pas les seuls “fous” sur cette terre !  Quant aux gens “normaux”, pas certain qu’ils comprendraient pourquoi un être humain s’inflige une telle torture, malgré toutes les belles explications…

Des petits comiques !

Comme il n’y a pas que Boston dans la vie (en fait, il n’y a pas que la course non plus, mais vu qu’il s’agit tout de même d’un blogue sur la course…), je me permets de sortir de mon focus aujourd’hui.

Je savais que le monde des ultras était un peu, comment dire, différent. En partant, réunir un relativement petit groupe d’individus dans un trou perdu pour parcourir 50 kilomètres, 50 milles, 100 kilomètres, 100 milles ou même plus juste pour le simple “plaisir” de le faire, c’est déjà quelque chose.

Mais je ne pensais pas que ce monde tout à fait particulier pouvait être hilarant. J’en ai trouvé deux exemples assez comiques (que ce soit volontaire ou non, ça reste toutefois à vérifier) ces derniers jours, j’ai décidé de les partager avec vous.

Exhibit numéro 1: le fameux Badwater 135. Oui je sais mon amour, je vais encore voir sur le site de cette course-là. Que veux-tu, ça m’impressionne, du monde qui court jusqu’à en développer des ampoules… sur les testicules (sans blague, je l’ai déjà lu).  J’admire ces gens-là, j’ai le droit, non ?  Et non, je ne veux pas faire cette course-là… Quoi ? Si on devient millionnaires du jour au lendemain ?  Heu, ouin, va falloir que je me trouve une autre excuse que les coûts exorbitants reliés à une telle folie pour ne pas avoir à me la taper. Moi, courir dans un sauna avec un séchoir à cheveux dans le visage…

Justement, parlant de coûts exorbitants…  Sur le site de l’événement, on retrouve une première en vue de la course de juillet prochain: la possibilité de suivre un programme d’entrainement spécifique à Badwater. J’étais curieux, alors je suis allé voir.

Ça semble intéressant. L’instructrice est une spécialiste du conditionnement physique qui a déjà terminé l’épreuve deuxième chez les femmes et qui a de l’expérience en tant que membre de l’équipe de support (il semblerait qu’à Badwater, c’est une atout presque aussi précieux que d’avoir fait la course). Mais comme c’est précisé sur le site, il ne s’agit pas seulement d’une vulgaire grille de type Excel pondue sur le coin d’une table. Ne ne non. C’est un programme complet, adapté au coureur et à sa progression hebdomadaire. Le côté mental est aussi abordé. Le “client” pourra envoyer un nombre illimité de courriels (on ne précise pas le taux de réponse, par contre) et aura même droit à un entretien téléphonique par semaine (woo hoo !).

De plus, notre experte aidera le participant et son équipe dans la configuration des véhicules de l’équipe de support, dans le choix des vêtements à porter, l’hydratation et l’alimentation, etc. Elle sera aussi disponible en tout temps durant la course si un coureur ou son équipe avait un quelconque besoin.

En prime, le coureur aura droit, d’ici le jour de l’épreuve, à 3 appels téléphoniques et/ou conversations Skype de 30 minutes en exclusivité avec le directeur de la course ! Le moment idéal pour poser toutes les questions qui nous brûlent les lèvres depuis si longtemps. La première qui me vient à l’idée: “Vous devez avoir des tendances sadiques, hein ?”.

Je me disais qu’une telle offre ne pouvait être refusée !  😉  Mais bon, ça devait peut-être coûter quelque chose, non ?  J’ai regardé plus loin. Hé bien pour la modique somme de 295 $ par bloc de 4 semaines, auquel il faut ajouter des frais d’adhésion de 95$, cet entrainement est à vous. Comme il reste 20 semaines avant l’épreuve, un petit calcul rapide nous amène à un joyeux total de… 1570 $ !  (Je dois toutefois souligner qu’un rabais est offert à ceux qui paient pour les 5 blocs de 4 semaines en même temps. Trop gentil.)

Pardon ?  En plus des frais d’inscriptions de 995 $, il faudrait payer plus de 1500 $ pour un programme d’entrainement ?!?  Pour aller courir 135 milles dans le désert. Sont drôles, sont trop drôles !

Exhibit numéro 2: The North Face Endurance Challenge – New York

Je parlais de cette course de 50 milles disputée dans les sentiers du Bear Mountain State Park dans l’état de New York avec ma douce moitié quand elle m’a demandé si les représentants de la race canine étaient acceptés sur les lieux de la compétition. Heu…

J’ai donc plongé dans les règlements, à la recherche de la précieuse information. Mais le 5e point dans la liste a attiré mon attention. En gros, ça dit ceci (traduction libre): « Enterrer tout déchet humain à une profondeur minimale de 6 pouces, à au moins 200 pieds de toute source d’eau et 50 pieds des sentiers ».

Je n’ai pas pu m’empêcher d’éclater de rire. Par « déchet humain » (human waste), comprenez-vous la même chose que moi ? Il me semble de me voir, assailli par un besoin pressant, m’éloigner du sentier, bien vérifier qu’il n’y a pas de source d’eau à proximité avant de me mettre à creuser (avec quoi, mes mains ?) au moins 6 pouces de profond pour finalement m’exécuter, puis enterrer le tout une fois le travail terminé…

Il faudrait vérifier auprès des autres coureurs qui ont déjà vécu une telle situation, mais quand ça m’est arrivé, je peux vous garantir que je n’aurais jamais eu le temps de faire toutes les étapes nécessaires avant de m’exécuter. Et comme on dit, vraiment pas question de tout faire ça après !

À moins que je fasse comme avec mon chien: traîner un sac en plastique. Je n’aurais ensuite qu’à transporter la précieuse cargaison jusqu’à la prochaine station d’aide et en disposer dans une poubelle. Ainsi, pas besoin de vérifier les sources d’eau et de creuser un trou. Pas certain que les autres compétiteurs seraient très enchantés de me voir piger à deux mains dans le plat de bretzels ou de petits nounours par après, mais bon…

Et puis, ils font quoi pour surveiller les coureurs ?  Il y a des patrouilleurs spécialement dédies à cette tâche ?  Font-ils des tests d’ADN sur les wastes en question pour identifier ceux qui auraient « triché » ?  Ont-ils des rubans à mesurer pour vérifier si les distances minimales ont été respectées ?

Bref, je me suis rendu compte cette semaine qu’on pouvait réellement s’amuser en s’intéressant au merveilleux monde des ultramarathons. 🙂

Pour ce qui est des Charlotte de ce monde, ce n’est pas tout à fait clair si elles sont bienvenues à Bear Mountain. Histoire à suivre.

Le demi-marathon hypothermique

Avant de commencer, un petit mot à la personne qui s’est retrouvée sur mon blogue en faisant la recherche suivante: « Est-ce que Richard Garneau mesurait 7 pieds ? ». Disons que je l’ai trouvée assez drôle merci !  🙂  La réponse: non. C’était un grand monsieur, dans tous les sens du terme, mais il ne mesurait tout de même « que » 6 pieds et 4 pouces…

Bon, le vif du sujet maintenant: le demi-marathon hypothermique qui aura lieu demain matin au parc Jean-Drapeau. J’ai déjà amplement parlé du Badwater 135 qui me fascine tant. Hé bien, ça pourrait peut-être sembler bizzare, mais le demi hypothermique me fascine également. Car tout comme l’autre, j’avoue avoir un peu peur de cette épreuve. Bon, j’exagère un peu, mais pas tant que ça.

Quand j’ai commencé à courir, j’avais identifié cette course comme candidate principale pour en faire mon premier demi-marathon. Puis je m’étais blessé en jouant au hockey cosom et j’avais passé mon tour, attendant le demi Scotia Bank en avril. Ensuite, à chaque année, je me trouvais une excuse pour ne pas participer: trop de travail, trop de neige, trop de vent, trop froid (c’est le demi-marathon hypothermique, du con…). Trop de n’importe quoi, en fait.

La vérité est que l’incertitude face à cette course me rend mal à l’aise. On ne sait pas quoi la surface aura l’air et surtout, quelle température il fera. Bien sûr que je n’ai pas peur de la distance dans le froid, le vent et la neige, j’en fais autant sinon plus à tous les dimanches que le bon Dieu amène. Mais je ne sais pas, on dirait que je ne me fais pas à l’idée de rester dehors à geler plusieurs minutes avant le départ. Ou demeurer à l’intérieur avec mon linge de course d’hiver sur le dos, avoir chaud au point de transpirer, puis congeler en mettant le pied à l’extérieur. En hiver, j’aime bien m’échauffer à l’intérieur, enfiler mes vêtements de course, marcher/jogger jusqu’au bout de la rue et partir tout de suite. Pas attendre.

En vérité, si je veux être franc avec moi-même, j’ai peur de ne pas être en mesure de « performer ». Ma raison sait que c’est normal d’aller moins vite dans de telles conditions avant le début de la saison de course, mais mon coeur ne veut rien savoir d’avoir un « mauvais » temps sur un demi. Oui, je le sais, c’est nono…

Donc, encore cette année, comme je ne serai pas lapin de cadence, je passerai mon tour. Et comme à chaque année, c’est avec cette course-là en arrière-pensée que je ferai ma longue sortie demain.

À regarder la météo, c’est encore plus certain que je vais y penser: on prévoit autour de -13 degrés avec un fort vent du nord-ouest pour la matinée. Ouch. Quand il vente, il vente encore plus au parc Jean-Drapeau. La situation géographique (en plein milieu du fleuve, terrain plat) rend les îles Ste-Hélène et Notre-Dame très vulnérables. Pour m’y être entrainé très souvent en plus d’y avoir disputé plusieurs épreuves, j’en sais quelque chose. En fait, je ne sais pas pourquoi, mais j’ai l’impression que le vent est humide en hiver dans ce coin-là…  J’en ai des frissons juste à y penser. Brrr !!!

Donc, si ça peut aider les participants à la course de demain, un petit conseil: identifiez avant le départ la provenance du vent. Comme le parcours est constitué de 3 boucles de 7 km, le dieu Éole vous aidra et vous nuira en alternance. Alors essayez d’avoir des compagnons de route pour les bouts où il vous sera défavorable, question de partager le « travail ». D’après moi, la section qui longe le bassin olympique va être terriblement difficile et la petite montée après les puits, à l’extrémité ouest du circuit Gilles-Villeneuve, infernale. Mais quand on s’y attend, on dirait que c’est moins pire…

En terminant, je voudrais souhaiter la meilleure des chances à tous les participants. Je vous souhaite d’avoir beaucoup, beaucoup de plaisir. Et sachez que vous avez toute mon admiration !  🙂

Courir ferait vieillir ?!? Nah…

Dimanche dernier, j’étais à mon ordi, à compléter mon dernier “post”. Je regardais en l’air à la recherche d’une formulation qui avait le moindrement d’allure pour bien exprimer ma pensée. Mon regard s’est arrêté sur la photo d’un jeune homme.

Le “jeune” en question, c’était moi à l’arrivée de mon premier marathon en 2007. À l’époque, j’avais fait l’achat des photos officielles et c’est sur la 5×7 que nous avons décidé d’encadrer avec mon dossard que mes yeux se sont arrêtés. D’ordinaire, c’est en se regardant sur des photos récentes qu’on se rend compte qu’on vieillit. Mais là, je voyais bien que j’avais l’air pas mal plus jeune dans ce temps-là, même si ça fait à peine 5 ans et demi. Hum…

Après avoir complété mon texte, j’ai fait un peu de cyber-flânage. Je me suis retrouvé sur YouTube et suis tombé sur ceci. Un superbe petit vidéo, bien réalisé, sur la dernière édition du Badwater 135. Cette épreuve me fascine et me fascinera toujours. Plusieurs en rêvent, mais moi, pas vraiment. La chaleur extrême, un parcours (qui semble) monotone et un coût prohibitif pour y participer font que j’ai beaucoup d’autres courses à faire avant de faire celle-là. Mais je ne peux pas m’empêcher d’être fasciné…

À un moment donné, on voit passer à l’écran les vétérans de cette pure folie qui apportent leur grain de sel. J’ai évidemment reconnu Dean Karnazes, beaucoup moins flamboyant que les images de lui qu’on voit un peu partout. Puis Pam Reed, qui a même déjà gagné là-bas en battant tous les hommes.  Une chose m’a frappé: je savais qu’elle était début-cinquantaine, mais la dame qui est apparue à l’écran semblait avoir au moins 60 ans.

J’ai regardé à nouveau la photo du “jeune homme”. Double hum… Ma femme et ma mère auraient-elles raison après tout ?  Est-ce que la course ultra-distance pourrait causer vieillissement prématuré chez ceux qui en font la pratique ?

Pour en avoir le coeur net, j’ai essayé de trouver des “pièces à conviction”, soient des exemples d’athlètes qui courent des ultramarathons depuis des années.  En observant leurs photos, j’allais bien voir s’ils semblaient plus vieux que leur âge…

Premier “cas”: madame Pam Reed. Sur ce cliché pris en 2011, elle avait 50 ans.

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Pam Reed

Ici, le fameux Dean Karnazes, qui allait avoir 50 ans au moment où il a pris la pose.

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Dean Karnazes

Le grand Scott Jurek, 39 ans ici.

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Scott Jurek

Finalement, Debbie Livingston, que j’ai rencontrée au Vermont 50. Bien qu’inconnue, je sais qu’elle a une cinquantaine d’ultramarathons à son actif, alors ça donne une bonne idée. Elle avait 37 ans sur cette photo.

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Debbie Livingston

Mon opinion ?  Définitivement que les dames semblent plus vieilles que leur âge. Quand aux deux hommes, s’ils ont vieilli prématurément, ça ne saute pas aux yeux (bien que je soupçonne Karnazes d’avoir légèrement altéré la couleur de ses cheveux…). Je dirais même que Jurek est pas mal bien conservé pour un gars qui va taper la quarantaine. Vous ne trouvez pas qu’il a presque l’air d’un adolescent ?

J’ai fait quelques recherches sur le sujet et à part un forum où la question était discutée, je n’ai rien trouvé qui apportait des preuves d’un vieillissement prématuré qui aurait été causé par l’abus des longues distances. Il faut dire qu’une étude sur ce sujet serait très compliquée à mener car plusieurs autres paramètres entrent en ligne de compte quand vient le temps d’évaluer les causes du vieillissement d’une personne: la génétique, l’environnement, le stress, la maladie, etc.

Il y a aussi une différence entre avoir l’air plus vieux et vieillir réellement. Par exemple,  il est bien connu que les gens plus gras nous semblent souvent plus jeunes, pour la simple et bonne raison que leur visage est plus rond et que leurs rides paraissent moins, sinon pas du tout. Pourtant, je ne gagerais pas que leur espérance de vie soit supérieure à celle des gens minces. Et bien évidemment, les ultramarathoniens sont rarement gras… De plus, les longues heures passées à l’extérieur, parfois par temps froid, souvent par temps chaud et au soleil, doivent certainement entrer en ligne de compte si on pense vieillissement de la peau. Or, qu’est-ce qu’on regarde pour évaluer l’âge d’une personne ?  Son visage, soit la partie du corps d’un coureur la plus exposée aux intempéries.

Mon avis au final ?  Les êtres humains sont tous différents. Selon moi, certaines personnes pourraient souffrir à long terme de faire des ultra-distances alors que d’autres vont en bénéficier. Pour certains, courir 10 et 15 km par semaine serait mauvais alors que pour d’autres, en faire 200 ne leur ferait que du bien. La seule façon d’avoir une bonne idée des effets positifs/négatifs de la course très longue distance sur le corps serait de faire une expérience sur plusieurs années avec des couples de jumeaux identiques: une moitié du couple ferait de la course ultra-distance et l’autre moitié vivrait une vie plus “normale”.  Essayez de trouver des volontaires, maintenant…  🙂

Donc, comme rien n’est prouvé, je vais continuer de faire ce que j’aime et advienne que pourra.  Au pire, ma tendre moitié héritera plus tôt et pourra ensuite s’enfuir avec un petit jeune !  😉

L’ultime ultra

Hier matin 9h, j’ai eu une pensée pour eux. Même chose à 11h, puis à 13h: ils partaient en trois vagues. Eux, ce sont les vrais de vrais, les fous (des folles aussi, il y a des femmes) comme je les appelle. Ils étaient 96 cette année à s’attaquer à la course considérée comme la plus difficile, la plus impitoyable de toutes: le Badwater 135. Le lien vers le site web de cet ultramarathon se retrouve sur cette page, sous la rubrique « Jamais dans 100 ans ».

Pour les non-initiés, cette course débute à 282 pieds sous le niveau de la mer à Badwater Basin, dans Death Valley en Californie et se termine 135 milles plus loin (soit 217 merveilleux kilomètres), au pied du mont Whitney, à une altitude de 8360 pieds. Non seulement ils ne se contentent pas d’organiser cette pure folie à l’endroit même où la température la plus élevée jamais atteinte dans l’hémisphère ouest a été enregistrée, ils le font en plein mois de juillet. Mais les organisateurs sont tout de même cléments: auparavant, la course se terminait au sommet du mont Whitney, 22 milles plus loin. Mais bon, comme cette montagne fait partie d’un parc, les autorités y interdisent désormais la tenue de compétitions. Les participants peuvent toutefois compléter la route s’ils se défont de leur dossard et ont les permis nécessaires. Et oui, il y en a qui le font…

Qui participe à ça ?  Des ultramarathoniens chevronnés, il va sans dire. Très chevronnés, même. Les athlètes désirant subir cette véritable torture doivent répondre à de multiples critères, tous bien décrits sur le site web de la course. Et détail non-négligeable: payer les frais d’inscription qui s’élèvent à 995$ américains.  Si on tient compte du fait que chaque athlète a habituellement deux équipes de support (chacun devant obligatoirement avoir une voiture qui le suit en permanence) et de toute la logistique reliée à la réalisation d’un tel exploit, ça me surprendrait beaucoup que ça revienne à moins de 10000 $ comme promenade dans le désert.

Les prix à gagner ?  Une belle boucle de ceinture à l’effigie de la course pour ceux qui l’ont terminée en moins de 48 heures. Oui, vous avez bien lu: il y en a qui prennent 48 heures pour faire ça. Deux journées complètes. Dans le désert, à plus de 40 degrés à l’ombre (et comme il n’y a pas vraiment d’ombre…). Pour une boucle de ceinture. Et moi qui les admire… Le gagnant ?  La même chose que les autres, à part le prestige d’avoir gagné. Pas un sou de plus.

J’ai lu toutes sortes d’histoires au sujet de l’entrainement que les participants s’imposent pour s’adapter au climat plutôt inhospitalier. Il y a écidemment le classique gars qui s’entraine avec un parka en plein été. Mais il y en a une qui m’a marqué plus que les autres. C’était un Canadien, donc pas vraiment habitué aux hautes températures, qui voulait se préparer pour cette course. Ce qu’il a fait ?  Il s’est construit une serre dans sa cour arrière et y a installé un tapis roulant. L’histoire ne dit pas s’il avait installé un séchoir à cheveux qui, pour imiter le vent désert, lui aurait soufflé de l’air chaud dans le visage. Tant qu’à y être… Quand j’ai raconté cette histoire à ma conjointe, elle s’est empressée de m’aviser que j’aurais droit aux papiers de divorce le jour où je bâtirais une serre chez nous. Un homme averti…

À l’heure d’écrire ces lignes, 25 coureurs ont terminé l’épreuve,  5 ont abandonné et 2 autres ont manqué la « coupure » imposée à 28 heures au mille 72. Ça veut donc dire qu’il reste encore 64 coureurs qui sont sur le parcours depuis… 32 à 36 heures. Je suppose bien qu’ils prennent des pauses de temps en temps, que certains vont probablement même piquer un petit somme, mais quand même… Cette épreuve me laissera toujours bouche bée.

L’homme aux multiples exploits, Dean Karnazes, probablement l’ultramarathonien le plus connu de la planète, était de la partie cette année pour la 10e fois. Il a terminé en 12e position, en 29:57:50. Le gagnant, l’Américain Mike Morton, était quant à lui une « verte recrue »: il a terminé en 22:52:55 à sa première participation. Comment un homme peut-il parcourir 217 kilomètres sur ses deux jambes, dans le désert, en moins d’une journée ?  Ça me dépasse… Ha oui, autre exploit: le bon vieux Marshall Ulrich, 61 ans, qui est encore sur la route. C’est seulement sa 21e expérience à Badwater…

Non chérie, je t’assure que tu n’auras pas à te taper un voyage dans la vallée de la mort un jour…  Pourquoi j’en parle alors ?  Ben, parce que ça me fascine.  J’ai le droit, non ?  🙂