Sur le pont de la Concorde…

J’étais à la fin d’un intervalle. Je venais de passer devant Habitat 67 et je finissais la petite montée menant au pont de la Concorde. À cet endroit, la piste cyclable était (encore) sur fond glacé et en y ajoutant de l’eau provenant de la neige fondue, Dame Nature présentait un combo périlleux au coureur qui osait s’y aventurer (je n’ose penser quoi ça doit voir l’air avec ce qui nous est tombé dessus hier !).

Je m’arrête donc à chaque fois que je passe là depuis quelque de temps, question de faire ce petit passage en marchant car je désire demeurer en vie. Petite différence en cette fin de jeudi après-midi cependant: deux gars qui n’avaient vraiment pas rapport à cet endroit (ils étaient habillés comme des gens ordinaires, duh !) s’en venaient en sens inverse. Quand l’un d’eux m’a abordé (en anglais), j’ai tout de suite su qu’ils ne venaient pas du coin.

Ils voulaient savoir s’il y avait un McDonald proche (ils ne venaient définitivement pas du coin). Première chose qui m’est venue à l’idée: “Si tu avais l’idée de te partir un McDo, mon chum, le ferais-tu ici, en plein milieu du fleuve ?!?”. Mais bon, ils ne pouvaient pas savoir… J’ai regardé ma Garmin et sachant qu’il y en a un dans le Vieux, tout près de l’endroit où je m’étais élancé, je leur ai annoncé: “Il y en a un à 3.75 km”.

“Ça prend combien de temps, ça ?”. Évidemment, je me suis senti obligé de leur répondre par une niaiserie: “15 minutes si vous courez”. Ma Garmin indiquait exactement 15 minutes (je vous rappelle que je terminais un intervalle, je ne vais pas si vite habituellement !). Et l’autre de me répliquer qu’il ne court pas, il a un trop gros surpoids (ça, c’est le McDo, mon ami). Sur le coup, je l’ai trouvée drôle, puis je me suis rendu compte qu’il m’avait évidemment pris au premier degré. Here we go again

Son compagnon, qui semblait moins pressé à s’empiffrer de junk food (il était plus mince aussi), s’est mis à me poser des questions. “Pourquoi tu cours ?  Pour maigrir ?”. Et moi de répondre: “Yeah !” avec un grand sourire. C’est plus fort que moi. On dirait que le second degré, ça fait autant partie de ma nature profonde que la course. “Tu sais, ce n’est pas bon être trop maigre…”. Bon, encore une de mes blagues qui tombe à plat. Décidément, je n’apprendrai jamais… Heille le smatte, est-ce que j’ai l’air d’un anorexique ?  As-tu une idée de la quantité de calories que je peux absorber dans une semaine ?  Sur l’heure du midi, mes lunchs prennent toujours deux fois plus de temps que ceux de mes compagnons de travail à chauffer. Ce n’est certainement pas parce que j’aime manger ma bouffe plus chaude…

Question suivante: “Tu cours quelle distance ?”. À peu près 16 km aujourd’hui (j’ai laissé tomber l’idée de faire leur éducation sur le travail de vitesse, les intervalles, les côtes, etc.). “C’est jusque où ça ?  Jusqu’au casino ?”. Ils ne connaissent vraiment rien à rien, il n’y a pas à dire: le casino est environ à 1.5 km d’où nous étions !  Je me suis mis à leur expliquer que je me rendais à mon auto, qui était garée sur la rive sud. Pour ce faire, je devais passer par le pont Jacques-Cartier (que j’ai pointé du doigt), le traverser, puis faire un petit bout par après. J’allais me taper 3 boucles du chemin de l’Isle (sur l’île Ste-Hélène) question de faire des côtes avant de traverser, mais ça, ils n’avaient pas à le savoir.

Voyant où est situé le pont, ils n’en revenaient pas. “Tu vas courir jusque là ?!?”. Ben heu, oui. “Tu vas courir sans arrêt ?”. Merde, ce n’est même pas 3 km pour se rendre !  Je vais courir sans arrêt, sauf si je pogne des plaques de glace comme ici, si je dois sauter une clôture, si je tombe sur deux hurluberlus qui me posent des questions bizarres, etc. Ils n’en démordaient pas. “Tu vas vraiment courir sans arrêt ?  Combien de temps tu cours ?”.  Entre 1h05 et 1h10, dépendant du vent, des côtes, des conditions quoi. J’ai cru qu’ils allaient tomber dans les pommes. Un marathon, vous connaissez ?  Ça prend un petit peu plus de temps que ça, vous savez…

Nous nous sommes quittés après avoir jasé un peu plus de poids et de malbouffe. Ils semblaient vraiment vouloir aller chez McDo car ils ont poursuivi leur chemin vers le Vieux Port. Je me demande où ils ont fini par aboutir…

Stratégie ? Quelle stratégie ?

Voilà, la prochaine fois que je vais courir, ce sera durant le Marathon de Boston. J’avoue avoir peine à y croire… Les Olympiques des coureurs du dimanche et j’y serai. Wow.

Cette semaine, tel que prévu, j’ai fait mes deux sorties de 10 km, mardi et jeudi. À peu près tous les programmes d’entrainement suggèrent de prendre ça relaxe la semaine avant un marathon. Sauf que je ne sais pas ce qui se passe dans ma tête, mais quand je pars pour 10 km, on dirait que je me dis « Bof, ce ne sera pas long de toute façon, alors… » Ça fait que j’avais beau essayer de me retenir, j’ai terminé avec des temps de 41:05 et 41:08. Je sais, beaucoup trop vite, vraiment pas fort de ma part… En plus du risque de blessure, je taxais mes jambes. Mais il y a un détail à ne pas négliger: le côté psychologique de la chose. Je n’étais pas totalement à fond et n’étais définitivement pas à bout de souffle en terminant, alors je me dis que la vitesse est bonne et qu’avec trois jours de repos, mes jambes devraient logiquement être capables d’endurer le quadruple de cette distance si je vais plus lentement…

Enfin, on verra bien. Pour le moment, la neige tant annoncée a (finalement) commencé à tomber. La dernière tempête de l’hiver qui obsède les gens alors que dans le fond, est-ce que ça dérange vraiment ?  Dans quelques jours, ce ne sera plus qu’un mauvais souvenir. Il m’arrive souvent de ne pas comprendre l’obsession que nous avons (et je m’inclus dans le lot) pour la météo. Qu’est-ce qu’on y peut de toute façon ?  Nous avions prévu partir tôt demain matin, question de pouvoir s’installer à l’hôtel et aller à l’expo-marathon avant sa fermeture, à 18h.  Mais s’il fait tempête, on retardera le départ de quelques heures et on ira à l’expo-marathon dimanche, c’est tout. Est-ce bien grave ?  Qu’est-ce qui nous fait plus de tort: s’en faire pour une chose sur laquelle on n’a aucun contrôle ou avoir à tout simplement s’adapter ?

Mais bon, tant qu`à être sur le sujet, la météo est optimiste pour le jour de la course: alternance de soleil et de nuages avec un maximum de 57 degrés Farenheit (14 Celcius). Le vent: 10-15 km/h du sud. Donc, pas vraiment de soucis à me faire de ce côté. Un vent d’est aurait été plus problématique…

La stratégie maintenant.  Heu, quelle stratégie au juste ?  Ben non, j’ai tout de même fait une petite base de devoirs… Mais pas tellement. J’ai regardé le profil du parcours (il est pas mal plus clair dans le petit guide qu’ils nous ont envoyé que sur cette page web), consulté les conseils d’experts, lu quelques récits de course, etc. Sauf qu’on dirait que je n’accroche pas. J’ai l’impression qu’ils en mettent plus que le client en demande.

Le parcours est descendant sur les 4 premiers milles, puis relativement plat sur les 12 suivants. Le gros du travail se retrouve entre les 16e et 21e milles où on retrouve les infâmes Newton Hills, la pire étant la désormais célèbre Heartbreak Hill, la quatrième et dernière du lot. Puis, les 5 derniers milles sont en descendant ou à peu près.

C’est un profil qui s’apparente un peu à ce que j’ai vu à Mississauga: début descendant, relativement plat par la suite, puis des montées-descentes dans la partie cruciale du parcours. La côte au 34e kilomètre me restera toujours en mémoire… En plus, les 17 derniers kilomètres avaient été parcourus avec un vent de 30 km/h dans le visage, sous la pluie. Je m’imagine difficilement de pires conditions pour un marathon.

Dans les récits, plusieurs ont dit que les montées des Newton Hills étaient surévaluées, mais que c’étaient plutôt les descentes à répétition qui avaient tué leurs quadriceps. Hein ?!?  Si c’est vrai, je suis en voiture. Heartbreak Hill aurait une pente de 4.5 – 5% et c’est la plus difficile. J’imagine que les descentes ne sont pas tellement plus abruptes (mais je ne peux en être absolument certain), alors je ne vois vraiment pas comment mes quads pourraient avoir de la difficulté à composer avec ça. Je pense qu’ils ont déjà vu pire… et sur une distance pas mal plus longue !  🙂

Ceci dit, il ne faut pas non plus partir en fou. Je me souviendrai toujours du monsieur qui m’avait raconté, avant le départ du Marathon de Montréal en 2010, que lui était parti vite parce que ça descendait, puis en avait payé le prix par la suite.  Il m’avait donc conseillé de faire attention. Je me suis toujours demandé pourquoi il m’avait dit ça vu qu’à ce moment-là, je n’étais pas qualifié… J’ai la tête d’un gars qui est supposé être qualifié pour Boston ou quoi ?

Je compte donc faire les premiers kilomètres bien sagement, en restant « en dedans » comme on dit. D’ailleurs, j’ai déjà remarqué qu’en course, ça va souvent très bien quand je me retiens, probablement parce que je suis plus détendu à ce moment-là. Je m’ajusterai ensuite. L’hydratation et l’alimentation joueront un rôle crucial, question de ne pas choker dans la partie de la course la plus difficile. Je n’ai toutefois pas de plan précis d’établi, je vais y aller à l’instinct. Ça m’a plutôt bien servi la dernière fois. 🙂

Boston, le mal placé

C’est le rêve de tout marathonien. Tout le monde connait cette course mythique et même les non-coureurs savent qu’on ne peut pas y participer autrement qu’en se qualifiant. Quand on commence à courir, c’est notre Everest: se qualifier pour Boston.

À mes débuts, le standard que je devais atteindre était 3:15:59. Wow, impossible… Mon but a d’abord été de faire un “demi-Boston”, soit tenir la vitesse désirée sur un demi-marathon. Je n’ai atteint cet objectif qu’une fois rendu à 40 ans, en faisant 1h34 sur un demi. Prochain objectif: l’avoir pour vrai.

C’est arrivé l’année suivante, à Mississauga. Mais bon, je n’ai pas été admis, mais je me suis repris l’an passé à Ottawa et serai à Boston cette année. Sauf qu’il y a un détail que je n’avais pas considéré pendant toutes ces années: la date.

Le Marathon de Boston se tient toujours le troisième lundi du mois d’avril. Or, pour nous qui vivons dans les pays nordiques, c’est à peine un mois après la fin de l’hiver. Comme un entrainement pour un marathon s’échelonne habituellement sur 3 ou 4 mois, nous n’avons pas le choix: nous devons absolument nous entrainer durant la saison froide.

Or, ça s’avère parfois difficile (j’en ai peut-être déjà glissé un mot)… La neige, la glace et les journées courtes font en sorte qu’il est difficile de faire du travail de vitesse. En effet, le coureur craint toujours de glisser et de se planter, alors il est plus prudent. En plus, pas facile de bien voir le GPS et suivre sa progression quand le soleil est couché à partir de 17 heures. Et je ne parle pas de la neige… Pour ma part, ce n’est que la semaine dernière que j’ai vraiment commencé les intervalles, soit moins de six petites semaines avant la course. Avant ça, je faisais du fartlek ou quelque chose du genre: je me donnais un objectif au loin (une pancarte, un poteau, une maison, etc.) et sprintais jusque là. Et ça, c’était quand la surface le permettait. C’est mieux que rien, mais ce n’est pas l’idéal.

Pour ce qui est du travail en côtes, on a un peu le même problème. Les montagnes environnantes (monts Royal et St-Bruno) sont difficilement praticables à la course en hiver. On n’a pas tous la chance d’habiter Sherbrooke… Or, je l’ai constaté l’an passé, faire des côtes, c’est très payant et en plus, il semblerait qu’il faut se préparer parce qu’il y en a trois belles vers la fin du parcours à Boston.

Bref, je me suis déjà demandé pourquoi le taux de “requalification” au Marathon de Boston n’était que de 46%. Je pense en avoir une réponse à tout le moins partielle ici: sa situation dans le temps qui “empêche” certains participants de se présenter au départ dans la forme optimale qu’ils avaient le jour où ils ont finalement réussi leur exploit personnel.

Ceci dit, je suis tout de même optimiste. Je sais, je suis déjà qualifié pour 2014 et je ne compte même pas participer de toute façon. Mais je veux me requalifier, c’est mon premier objectif. C’est comme une question de principe, une façon de “valider” ma présence là-bas. Après ça, j’aimerais bien faire mieux qu’à Ottawa. Mon record personnel ? Je n’y pense même pas.

Et puis, il ne faut pas oublier que tout peut arriver côté conditions, Il faisait 30 degrés  (!) au départ l’an passé. Dans un cas pareil, les objectifs…  D’ailleurs le taux de requalification avait chuté dramatiquement.  De toute façon, je cours depuis assez longtemps pour savoir qu’il faut être prêt à faire face à n’importe quoi !