Pas trop grognon malgré tout

« Ho que je suis dans la m… »

J’étais en train de regarder le spectacle de la mi-temps du Super Bowl. Sur la scène, Chris Martin, le chanteur de Coldplay, sautillait sur place, courait un peu partout. Il avait l’air d’un pois mexicain. À chacun de ses bonds, je sentais une douleur traverser ma fesse gauche. Définitivement que je n’aurais pas été capable de faire la même chose que lui. Alors imaginez courir en sentiers…

J’étais définitivement dans la m…

Étonnamment, le monsieur n’a été trop grognon durant ce mois de février qu’il a passé à tenter de guérir. En fait, il l’a été un tout petit peu, mais beaucoup moins que la dernière fois où il s’est retrouvé sur la liste des blessés. Comme s’il gardait son air bête en réserve pour plus tard. Pourtant, si la tendance se maintient,  son foutu sciatique est bel et bien sur la voie de la guérison.

Comme je le racontais ici, après quelques essais infructueux (et le dernier, carrément désastreux), je me suis d’abord tourné vers l’expertise de Norbert pour tenter de me ramener sur la route. Ça s’est avéré un gros travail de défrichage. Comme on dirait dans le jargon du monde de la construction, il s’est tapé le rough.

Quelques jours plus tard, ayant déjà pris depuis quelques semaines un rendez-vous avec Annie, une autre massothérapeute (c’était un cadeau de Noël de ma douce moitié), j’en ai profité pour lui demander poursuivre le travail. Faire la finition, en quelque sorte. Je me voyais déjà recommencer à courir à pleines jambes deux jours plus tard…

Ce qu’elle m’a dit a légèrement calmé mes ardeurs : mes sacro-iliaques n’étaient pas alignés. Bon, je suis encore déséquilibré… Il semblerait que mes muscles-dont-j’oublie-le-nom n’étaient pas placés comme il faut, etc. Bref, j’étais encore dans la m… Elle a beaucoup travaillé autour problème, m’a dit que ça s’était un peu replacé, mais que j’aurais probablement besoin d’y retourner.

Ok. Quand ?

« Attendez un peu… La semaine prochaine, c’est plein; celle d’après, c’est la relâche. J’ai de la place le 7 mars. »

Hein ?  Nous étions le 19 février. Heu… non !  Je suis un coureur, moi. Je suis donc quelqu’un de pressé. De très pressé. C’est comme ça, c’est ma nature profonde !  (Bon, j’entends d’ici Barbara et Pierre éclater de rire et dire de concert que ma nature n’est certainement pas si profonde que ça…)  J’ai une course de 100 miles à la mi-mai, je fais quoi d’ici là ?  Du macramé ?  C’est bien beau dire qu’il est préférable de se présenter au départ légèrement sous-entrainé que légèrement blessé, il y a des limites, non ?

De toute façon, dès que j’ai entendu les mots « mal alignés », mon idée était faite : ça prendrait Marie-Ève, mon ostéopathe. Aux grands maux les grands moyens. Elle m’avait sauvé en 2013, elle me sauverait encore.

J’étais à peine sorti de notre premier rendez-vous que je me sentais beaucoup mieux. Pourtant, tout ce qu’elle avait fait, c’était m’étirer dans certains sens, me faire pousser dans d’autres tout en me faisant respirer (sans oublier de se foutre de ma gueule rapport à ma souplesse légendaire) et voilà, j’étais rééquilibré. « On va pouvoir travailler le sciatique la prochaine fois ». Je me sentais tellement mieux que j’ai eu toutes les difficultés du monde à ne pas aller courir durant les deux jours où je devais laisser le traitement faire son effet. Je ne comprendrai jamais rien à cette science-là…

Le plus difficile maintenant, c’est d’y aller progressivement. Je vois Massanutten approcher et je dois me retenir à deux mains pour ne pas en faire trop. Bon, le sciatique est toujours là pour me rappeler que je ne suis pas encore guéri, mais quand même… Le 20, les copains vont se faire un 50 kilomètres en mode fat ass et ça va être vraiment tough de ne pas y aller.

Ceci dit, ce que j’ai lu cette semaine m’a ouvert les yeux. En effet, j’ai vu passer dans La Presse+ un petit article sur Philippe Viau-Dupuis. Certainement un des 2-3 meilleurs coureurs sur route au Québec (il a fait 2h21 à Boston l’an passé, se classant premier Canadien), ce dernier a vu le ciel lui tomber sur la tête : un tendon d’Achille complètement foutu. Sa saison 2016 est déjà terminée et il ne sait pas s’il pourra courir à nouveau, encore moins s’il pourra revenir un jour à son niveau d’il y a à peine un an.

Bref, disons qu’il y en a qui sont pas mal moins bien foutus que moi. Alors quand bien même que ça me prendrait 2-3 heures de plus pour faire Massanutten…

 

Comme un schizophrène

Été 2013, sans trop savoir comment, j’ai développé une tendinite derrière le genou gauche. Puis, après un arrêt d’une semaine et un traitement en chiro, j’ai fait un essai qui s’est avéré catastrophique. Non seulement mon genou n’allait vraiment pas mieux, mais mon sciatique du côté gauche (encore la gauche, toujours la gauche !) avait bloqué, me causant des douleurs atroces au bas du dos et me faisant marcher tout croche.

Durant les jours et les semaines qui ont suivi, ce sera surtout ce dernier qui me causera des problèmes. Sans les bons soins de mon ostéo ainsi que les étirements qu’elle m’avait donné à faire, pas certain que je m’en serais remis.

Toujours est-il que depuis ce temps, craignant la réapparition de ces maux, j’avais suivi religieusement ma routine d’étirements : ischios, mollets, bandelettes, fessiers. Au minimum deux fois par jour.

Mais, au fil des mois, tout en discutant avec les amis coureurs, je me suis rendu compte que j’étais pas mal le seul à me farcir une telle routine. Aussi, je lisais un peu partout que les étirements à froid, ça ne donnait pas grand-chose… Ajoutez à ça le temps que je pouvais sauver dans une journée en raccourcissant le processus et vous obtenez un coureur qui en était rendu à ne faire que les étirements liés à la blessure au genou et ce, rarement plus d’une fois par jour.

Après ma baisse de régime un peu inexplicable de la fin 2015, je commençais à sentir que ça revenait tranquillement. Quand j’ai fait la tournée des 3 sommets avec Pierre la dernière fois, j’ai eu l’impression qu’il ne s’ennuyait pas du tout, bien au contraire (je parle d’un ennui du point de vue « athlétique », pour ce qui est de ce que j’avais à lui jaser, je ne peux pas dire si ça l’ennuyait; mais bon, ça faudrait lui demander ! :-)). Ça voulait dire que j’étais à peu près à son niveau, ce qui ne peut forcément pas être mauvais.

Dans la semaine qui a suivi, la course fartlek s’est bien déroulée, tout comme mon entrée en ville à la course. Des intervalles le samedi ?  Mes meilleurs depuis des lunes. Puis vint la sortie du dimanche : les 3 sommets auxquels j’ai ajouté la Camilien-Houde. 31 kilomètres avec beaucoup de dénivelé pour une sortie en ville.

Le soir, j’ai senti le sciatique se coincer. Oups. J’ai bien tenté de récupérer le tout en reprenant les étirements. Trop peu, trop tard. Deux jours après, je retournais sur la liste des blessés.

Je pensais bien pouvoir m’en sortir seul avec quelques jours de repos et une reprise assidue des étirements. Nada. Progressivement, la tentative de « retour au jeu » s’est soldée par un échec. J’ai dû m’avouer vaincu : je devais consulter.

Par miracle, Norbert, le massothérapeute sportif de Julie, ma partner de pour la Petite Trotte à Joan, avait de la place hier soir. Quand je l’ai vu, j’avoue avoir eu un peu peur: le gars est bâti comme Georges St-Pierre !  Mon pauvre petit sciatique allait tellement, mais tellement souffrir…

Finalement non. En fait, pas plus que ce que m’a déjà fait subir Sophie. Ok, pendant plus d’une heure, je me suis senti comme un pantin désarticulé, mais j’ai survécu. J’attends maintenant de voir si ça fait son effet. Je suis optimiste. À suivre.

La leçon de l’histoire ?  Je ne suis pas comme les autres : j’ai besoin de mes étirements si je veux continuer à pratiquer mon sport. Tel un schizophrène qui doit accepter de prendre ses médicaments s’il veut avoir une chance de fonctionner normalement, je dois accepter de me taper cette routine quotidiennement. C’est la vie…

Le porteur de bière

Rue du parc Lafontaine, déjà plus de 20 kilomètres de parcourus. L’ambiance est bonne, la température parfaite. Les demi-marathoniens y vont d’un dernier effort, Sylvain et moi courons côte à côte, à un rythme qui me semble idéal pour le reste de la course.

« Ma bandelette est en train de jammer, va peut-être falloir que j’arrête… »

Hein ?  De quessé ?  Ça allait bien, non ?  Je me dis que ça va passer. Si ça ne passe pas et qu’il doit abandonner, je fais quoi ?  Je continue ?  À quelle vitesse ?  Heu, je suis un ti peu fourré, moi là… Ça va passer, ça va passer.

La foule est dense et bruyante sur Rachel à l’approche de l’entrée du parc. Ce genre de cris me donne toujours une dose d’adrénaline et cette fois ne fait pas exception. Puis, nous prenons la gauche sur De la Roche direction nord et c’est maintenant le désert. Plus personne, plus rien.

« Il faut que j’arrête. »

Ainsi, tout juste avant la marque du demi-marathon, Sylvain s’immobilise, s’assoit sur le trottoir et commence à se masser la cuisse, au niveau de la bandelette. Et là, je me sens vraiment, mais vraiment inutile. On fait quoi pour encourager un gars qui est blessé ?  Au lieu de dire des niaiseries ou des banalités, je choisis le silence.

La gang de la Maison de la course passe. Patrick s’inquiète de voir Sylvain ainsi, ce dernier le rassure : après le massage, il devrait être bon pour repartir. Ce qu’il fera, 3-4 minutes plus tard, nous amenant à la pancarte du demi-marathon en 2 heures. Pourra-t-on faire 4 heures ?  Rien n’est moins certain. Quand un malaise comme ça se présente en course, c’est rarement pour s’en aller par après.

Sur papier, la deuxième partie du marathon est vraiment poche. Constituée de trois allers-retours formant une croix (dans le genre chemin de croix…), elle risque d’être difficile sur le moral des participants. Et quand nous empruntons St-Joseph vers l’ouest, ça me frappe de plein fouet: je vois des participants qui reviennent, d’autres qui partent vers le nord. Tout le monde a l’air de faire de la distance pour faire de la distance, un véritable calvaire (pour demeurer dans le thème). Ajoutez à ça une partie du boulevard qui est en construction, puis un petit détour cucul où le seul spectateur présent nous applaudit à partir de son balcon au deuxième étage… C’est la grande joie, il n’y a pas à dire. Et Sylvain qui ne va pas mieux…

Peu après avoir quitté St-Joseph pour prendre la direction du nord, tout juste avant le 25e kilomètre, nous arrivons aux abords du parc Laurier. Qui est là ?  Maggie, bien sûr !  Sa sœur Caroline, avec qui nous avions fait un long bout à Ottawa l’an passé est maintenant avec elle, accompagnée de son fils. Sylvain en profite pour prendre une pause et les mettre au courant de ses malheurs. Tant qu’à faire, j’applique du Voltaren sur ma cheville, pour voir si ça lui fait un effet ou pas. Un autre test.

Pendant que je badigeonne mon articulation, j’entends mon protégé parler que ça va lui prendre de la bière pour terminer et que ce sera ma prochaine mission quand on sera rendus au 27e kilomètre.

Je crois bien sûr qu’il blague. Je lui ai glissé en début de course que j’avais eu un grand regret quand j’avais accompagné Maggie: ne pas avoir trainé un bon vieux 2$ sur moi qui m’aurait permis de lui acheter un Mr Freeze quand elle aurait tant aimé pouvoir en manger un. J’ai donc pris un 5$ avant de partir, au cas où.

Quand nous reprenons la route, il persiste: je vais vraiment avoir à arrêter dans un dépanneur pour acheter de la bière. Nah, il me niaise, c’est certain… Jouant le jeu, je lui dis qu’il va devoir choisir sa sorte et que je n’arrêterai certainement pas pour de la Laurentides ou de la O’Keefe (est-ce que ça existe encore, ces « bières »-là ?). Il acquiesce et après quelques échanges, arrête son choix sur de la bière plus douce, genre Stella Artois ou Heineken. Merde, c’est qu’il a vraiment l’air sérieux…

Cette petite discussion semble le distraire un peu, mais ne l’empêche pas d’être obligé de prendre une autre pause, au point d’eau situé 1.5 km plus loin. Me sentant toujours aussi inutile, je demande aux bénévoles s’il n’y aurait pas de l’aide médicale. Peut-être qu’un physio pourrait donner un coup de main, non ?

En voulant bien faire, je déclenche un mini-mouvement de panique. Le bénévole à qui je m’adresse se met dans tous ses états et se lance dans un chiâlage en règle contre le personnel médical « qui n’est jamais là quand il y a une urgence » pour ensuite courir à leur recherche comme si c’était une question de vie ou de mort. Heu, il n’est pas tombé raide par terre, il a juste mal à la cuisse !

D’autres bénévoles inquiets s’approchent alors du « patient » qui tente de les rassurer. Puis arrivent les filles de l’équipe médicale, qui, heureusement, sont plus calmes et comprennent bien la situation quand on la leur explique. La journée semble tranquille, elles en profitent pour jaser un peu. C’est nous qui leur apprenons que seuls les marathoniens passent par là. Quand même un peu surprenant.

Pendant ce temps, je garde un œil sur un dépanneur tout près. Était-il vraiment sérieux ? Le 27e kilomètre est juste là…

Autre reprise de la course, ça va mieux, on dirait. Le paysage sur Christophe-Colomb n’est pas si mal, nous reprenons les coureurs qui nous ont dépassés pendant le dernier arrêt et il semble avoir oublié son idée saugrenue, puis repaf, ça jamme encore.

Ha, si j’étais physio ou quelque chose du genre, je servirais à quelque chose. Au lieu de ça, mon ami doit s’astreindre à faire la cigogne ou une version verticale de la danse du bacon, je ne sais pas trop, pour tenter d’étirer le muscle récalcitrant.  Le lapin de 4 heures se pointe, nous lançant des encouragements au passage. Il n’est pas épuisé, il est blessé !

Peu après avoir recommencé à avancer, nous parvenons à Jarry pour ensuite emprunter de la Roche direction sud, question de revenir vers le Plateau. À la vue d’un dépanneur, je reçois l’ordre officiel: ma mission est d’y entrer et d’en ressortir avec deux petites canettes de bière. Il était vraiment sérieux.

Je m’exécute donc. Entrer dans un dépanneur pendant un marathon, avec le dossard et tout le kit, faut quand même le faire !

Celui que j’ai « choisi » est une insulte pour tous les trous que j’ai pu rencontrer dans ma vie. Sale, les tablettes à moitié vides sur lesquelles la marchandise semble crouler sous la poussière, déprimant au possible. Mais tout au fond, un réfrigérateur à bière. Je m’y dirige au pas de course. Je cherche, cherche, cherche. Mes yeux ne voient seulement que des grosses bouteilles (genre pour alcoolos) et des grosses canettes. Rien en petit format, mis à part les six-packs et autres caisses de 12 et 24. Je ne suis tout de même pas pour acheter un six-pack ! De toute façon, je n’ai que 5$.

Je ressors donc les mains vides à la même vitesse à laquelle je suis entré, sous le regard en point d’interrogation du proprio de l’endroit, et retrouve le parcours. Installé sous la pancarte du 30e kilomètre, mon alcoolique anonyme est encore pris à se masser.

« Il y a juste des grosses ! » que je crie en arrivant, comme si je venais de sortir du Café Cléopâtre. « On va se rapprocher du Plateau, il va ben y avoir des petites plus loin… » que je reçois comme réponse. Puis, il y a ajustement dans les instructions: la prochaine fois, je ressors avec ce qu’il y a, grosse ou petite. C’est qu’il n’en démord pas…

Donc, un kilomètre plus loin, autre dépanneur, autre entrée en catastrophe en risquant de tout casser. Au moins, l’endroit est un peu mieux… Mais toujours la même variété au niveau des formats. J’arrête donc mon choix sur une grosse Heineken. En fait, c’est une très grosse: elle me semble pas mal plus imposante que celles de 500 mL qu’on voit souvent. Une 710 ou 750 mL, peut-être ?

Enfin, assez perdu de temps. Je cours vers la sortie et garroche au passage mon billet de 5$ sur le comptoir sans attendre le change. La commis, toute surprise, me dit « Ho… Thank you ! » en souriant.

Cette fois-ci, Sylvain ne s’est pas arrêté et je ne le vois même plus. Je me mets donc en frais de le rattraper. Vous vous imaginez ce qui peut passer par la tête des pauvres coureurs qui me voient les dépasser à pleine vitesse une grosse canette de bière à la main ?  Non mais, il s’en  va où, ce con-là ?  Et comme pour en ajouter, je ne peux m’empêcher de rire tout en courant. Qui a dit que la course, c’était « plate » ?

Chemin faisant, un léger détail me vient à l’idée: il est interdit de boire de l’alcool sur la place publique.  Je peux toujours faire le fanfaron et courir avec ça tant qu’elle n’est pas ouverte, mais si on en boit… Il y a quand même pas mal de policiers, ce serait vraiment con de se faire coller une contravention.

Finalement arrivé à sa hauteur, je tends mon butin à mon « chef ». Il me laisse les honneurs. Et je me fais avoir: en l’ouvrant, je suis aspergé. Ben oui, beau nono, à courir de même…

J’avoue que ça fait très bizarre de boire de la bière en courant. Pas certain d’aimer ça, mais on a beaucoup de plaisir à le faire. Nous n’oublions évidemment pas notre vieux chum Chris au passage, qui aurait certainement approuvé.

En nous voyant arriver, Maggie est découragée: « Ha non, vous l’avez vraiment fait ! ». Heu oui. Pas le choix, les ordres sont les ordres. Mais bon, c’était un peu pour dire qu’on l’avait fait. Après quelques photos, on lui donne ce qu’il reste, puis on repart. Plus que 10 kilomètres. « Il reste juste 45 minutes !» que j’annonce, sachant que c’est le temps que prend habituellement Sylvain pour couvrir cette distance. Évidemment, il sait que je ne suis pas sérieux. En fait, je m’attends à ce que ça prenne 1 heure.

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Chris aurait certainement approuvé !

Avant de décoller, je confirme que je serai à Bromont. Pas question de jouer à la moumoune avec un petit malaise comme celui-là. Maggie s’étonne : « Tu vas vraiment faire 160 kilomètres en étant blessé ?!? ». Ben… tant qu’à être blessé de toute façon, aussi bien l’être en partant, non ?

À peine 100 mètres plus loin, autre arrêt-massage. Tant et si bien que Maggie et Caroline nous rejoignent et j’en profite pour prendre une dernière gorgée. Hé, il n’en reste presque plus !  « C’est parce que je n’ai pas le droit de boire de l’alcool en public, ça fait que je veux m’en débarrasser au plus vite ! ». La belle excuse…

Au passage sous la bannière de départ du 10 km, je vérifie le chrono : 3h16. Sylvain est maintenant en souffrance permanente et a de la difficulté à avancer. C’est certain qu’on ne fera pas sous les 4 heures. Il décide sur le champ de ne plus arrêter car c’est pire par après: ça le fait figer.

De retour sur St-Joseph, pour un looooong aller-retour, le dernier. Nous croisons des coureurs qui vont à toute vitesse en sens inverse, pompés par l’odeur de l’arrivée qui approche… pour eux !  Après un certain temps, je remarque un groupe portant des t-shirts rouges faciles à reconnaitre : ce sont des Étudiants dans la course. Nous en en avons vu quelques-uns depuis le départ et à chaque fois, je vérifiais si Pierre était parmi eux.  Négatif. Mais cette fois-ci…

Hé oui, c’est bien lui !  Je ne fais ni une, ni deux et traverse le terre-plein pour aller à sa rencontre. « Hey, Partner !!! ». La surprise suivie d’un large sourire marquent son visage si expressif. « Comment ça va ? ». Je lui explique un peu les problèmes de mon protégé (les siens semblent très bien aller), puis on se donne rendez-vous à l’arrivée.

De retour à mon « mouton » qui poursuit son chemin de croix juste à la force du mental. Un entraineur de la Maison de la course le reconnait et fait un bout avec nous. Malheureusement, ça ne lui donne pas les ailes escomptées. Puis, comme nous n’avançons pas trop vite, je décide de me donner le luxe d’arrêter aux toilettes au point d’eau du 35e kilomètre.

En sortant, surprise : Sylvain est très loin devant. J’enclenche la vitesse supérieure pour le rattraper. Vraiment, mais vraiment pas facile quand ça fait des heures qu’on garde un rythme plus lent. Il me semble que ça allait mieux avec une bière à la main… Je finis par le rejoindre, au prix de longs efforts. Comme quoi avancer, toujours avancer, c’est ça qui est payant. Je vais m’en rappeler lors de mon prochain ultra. Keep moving forward.

Juste avant Pie IX, nous devons nous taper une (autre) petite boucle merdique pour revenir sur St-Joseph. Le nouveau parcours, bien que moins emmerdant que l’ancien, offre lui aussi son lot de passages difficiles pour le moral. Je plains honnêtement mon ami de souffrir ici.

Puis, comme pour faire écho à mes pensées, ma cheville fait un beau « Couick ! ». La douleur me déséquilibre pour 2-3 enjambées, un peu comme le ferait une crampe. Ouch ! Maintenant, je la sens à chaque enjambée. Ho, elle n’est pas drôle, celle-là !  C’est endurable, mais limite, comme on dit.

Ok, pas vraiment le moment de me plaindre, je ne suis pas ici pour ça, mais bien pour soutenir mon poulain. Sur Pie IX, j’essaie de le distraire en lui offrant de la bouffe (je fais des tests de ce côté en vue de Bromont, quoi que finalement…), mais il la refuse. Puis, l’air dans mes intestins tenant à tout prix à sortir, je ne peux faire autrement que le laisser aller, et… Deux dames à côté sourient quand je dis « C’est lui ! », mais bon, les blagues pipi-caca, ça a ses limites…

5 kilomètres à faire. Sylvain me demande si j’ai déjà vécu des douleurs à ce point d’un marathon (ho que oui !) et comment j’ai fait pour passer au travers. Bon, je ne peux pas savoir à quel point il souffre, mais je lui raconte mes pires : Montréal 2008 et 2011 (la fois où j’ai cru que j’allais mourir; sur Pie IX, justement), Boston 2013. Mais il m’est aussi arrivé de terminer « juste fatigué », lors de mes deux meilleures courses, entre autres. Bref, je lui dis que quand ça fait mal, on serre les dents et on endure en priant pour ça finisse au plus sacrant !

Au kilomètre 38, je lui suggère un exercice pour se donner de petits objectifs : dédier chacun des kilomètres restants à quelqu’un de cher. Ma proposition : un pour Maggie, un pour chacun de leurs 2 enfants et le dernier pour notre ami Chris qui nous regarde, là-haut. Tentative de faire passer son cerveau en mode « émotif », question de lui faire oublier le mal. J’avoue que les résultats seront assez mitigés. J’aurai essayé.

Tiens, notre tata à moto qui nous redépasse. Il ne klaxonne plus, vu qu’il a de la place en masse pour passer. Mais il roule vite pas à peu près. Il va facilement à 50-60, peut-être même plus. Est-ce qu’il sait qu’il est aux commandes d’un engin lourd et puissant au travers de coureurs qui sont sur la fin d’un marathon et qui pourraient se mettre à tituber ou changer de direction à tout moment ?  Si au moins c’était un jeune adulte, je dirais que c’est un problème de lobe frontal sous-développé, mais non, c’est un bonhomme dans la cinquantaine/soixantaine. Une seule conclusion s’impose alors : c’est un maudit sans-dessein et il n’a pas d’affaire dans un tel événement. Problème de cerveau au complet sous-développé, peut-être ?

Ok, j’avoue que ma mauvaise humeur est aussi causée par l’état de ma cheville. Depuis qu’elle a craqué, chaque foulée est douloureuse. Ça court toujours, je ne songe pas une seconde à arrêter. Mais serai-je capable de tenir le coup sur 160 kilomètres à Bromont ? Bah, en y allant lentement…

Puis, j’ai un flash : Washington. Dans les 15 derniers miles, j’y ai couru à pleine vitesse, en serrant les dents. C’était dur, mais je tenais le coup, reprenant au passage plusieurs coureurs. Serais-je capable de faire ça, ici et maintenant ?  La réponse est évidente : non. Pourtant, j’ai « seulement » 39 kilomètres relativement faciles de parcourus alors que là-bas, j’en avais plus de 60. Même après 75 kilomètres, je tenais encore le coup, alors…

Nous recroisons l’entraineur de la Maison de la course. Je profite du fait que Sylvain soit momentanément accompagné pour me lancer à pleine vitesse dans une descente. Un dernier test, pour voir… Je dois me rendre à l’évidence : je ne serai jamais en mesure de faire un 100 miles dans trois semaines. Merde.

St-Joseph, tel que prévu, dure une éternité. Ce parcours est vraiment, mais vraiment à ch… Puis, au 41e kilomètre, rue Brébeuf. Enfin !!!  Tout au bout, le parc Lafontaine et son arrivée.

Et qui retrouve-t-on sur Brébeuf ?  La petite troupe à Maggie ! Sylvain veut s’arrêter pour les saluer, je le pousse à poursuivre. Il ne faut pas que sa jambe fige si près du but…

À 500 mètres de l’arrivée, je le serre par les épaules. Tu l’as, mon ami, tu l’as : tu es un marathonien. Ça, personne ne pourra jamais te l’enlever. Je pointe les index en direction du ciel, regarde Chris qui est certainement en train de prendre une (autre) bière à notre santé là-haut, son sourire si caractéristique lui fendant le visage. Salut mon ami !

En bon pacer, je laisse la place à mon protégé. Il ne veut rien savoir et insiste pour qu’on termine ensemble. Nous le ferons donc, en 4:18:39.

Un nouveau membre vient d’entrer dans la confrérie. Bienvenue, mon chum ! 🙂

Des problèmes avec la gauche

Chers amis, rassurez-vous: malgré ce que le titre de ce billet laisse sous-entendre, je ne parlerai pas de politique. Hé non, je garde mes opinions sur le sujet pour moi… et ma douce moitié.

Non, c’est de mon côté gauche dont je veux parler. Moi le droitier, j’ai remarqué que depuis je cours, c’est toujours mon côté « faible » qui est la cause de mes problèmes. Pourtant, la course est un sport symétrique, non ?

Blessure à l’ischio-jambier droit ?  C’est parce que ma jambe gauche est trop faible (« Elle est morte » m’avait dit Sophie sans passer par quatre chemins). Contracture au mollet droit ?  Même raison.

Cet été ?  J’ai déjà abordé le sujet, c’est un kyste infecté sur l’omoplate qui m’a causé bien des soucis. En fait, il m’a souvent donné l’impression de me faire tout simplement rater mon été: pas de baignade, pas moyen de faire des efforts avec le haut du corps de ce côté (et quand on a ma « charpente », ça ne prend pas grand chose pour avoir à faire des efforts, croyez-moi !), toujours rendu au CLSC pour faire changer le pansement… La grande joie. Heureusement, je pouvais toujours courir, vu que j’étais blessé « au haut du corps », justement. Mais de quel côté ?  Le gauche, bien sûr !

Depuis que l’abcès est guéri, ma gauche, se sentant démunie et abandonnée, m’a réservé une merveilleuse surprise pour la suite des choses: un problème à la cheville.

Celui-là est récurrent. Il s’est manifesté la première fois en 2011, suite à une « petite sortie » de 49 kilomètres qui m’avait amené chez des amis où on allait souper. À l’époque, survolté suite à la lecture d’un livre de Dean Karnazes, je m’étais mis à enfiler les très longues courses (genre distance marathon et plus) à toutes les semaines. Et à un moment donné, ça avait fait crack… Trois semaines d’arrêt complet alors que nous vivions le plus beau mois de décembre que je n’ai jamais connu pour la course. Damn !

Toujours est-il qu’il arrive parfois que je ressente encore cette douleur que je reconnais assez rapidement. Elle était revenue en force durant le Vermont, mais est disparue durant la période de récupération qui a suivi. Comme je ne suis pas intelligent, j’ai repris un entrainement « normal » (c’est-à-dire pas graduel du tout) en vue de Bromont, et après deux semaines complètes, re-crack. Re-damn !

J’ai dû me rendre à l’évidence: fallait que je m’arrête. Encore. Juste avant ma semaine de vacances. Vous imaginez les craintes que ma tendre moitié pouvait avoir ?  Une pleine semaine pognée avec un homme qui ne peut pas courir, est-ce qu’il y a pire souffrance sur cette terre ?  Pas sûr… 😉

Mais, contre toute attente, je me suis retenu… sans chiâler. Oui oui, je le jure ! Enfourchant le vélo, j’ai patienté, bien déterminé à attendre que le mal disparaisse pour reprendre la course. Et après une éternité (une pleine semaine, oui mesdames et messieurs), j’y suis allé graduellement. 10 kilomètres, puis 13 le surlendemain. Ce matin, 21 au mont St-Bruno. So far, so good. Ce n’est pas parfait, mais ça tient.

Vais-je être en mesure de faire Bromont, où selon Gilles, l’absence de Joan fera de moi the heir of the throne (et celui qui se retrouve sur la page couverture du site web !  Voyez de quoi on a l’air quand ça fait 24 heures qu’on s’amuse dans le bois…)?  Rien n’est moins certain. Mais j’y serai, aucun doute là-dessus. Car si je ne suis pas en mesure de courir, j’irai prêter main-forte à Audrey, Gilles, Alister et toute la gang là-bas. Ces gens-là font un travail colossal, on se doit de les aider à la réussite de ce merveilleux événement.

En attendant, le Marathon de Montréal dans 18 jours sera un excellent test. Si ça passe, je me relance dans l’aventure. Si ça casse, quelqu’un a besoin d’aide pour faire des sandwichs ?

Des petites nouvelles…

Au cours des dernières semaines, je n’ai, encore une fois, pas eu beaucoup de temps pour pondre un billet sur mon sport préféré. Comme j’en ai déjà glissé un mot, je passe le plus clair de mon temps sur semaine dans l’Abitibi profonde et quand je reviens chez moi les fins de semaine, j’ai plus le goût de passer du temps avec ma douce et notre petite canaille que m’installer à mon ordinateur. Vous me comprendrez certainement.

Ceci dit, ce ne sont pas les sujets qui ont manqué. Parmi eux, il y a eu le mini-débat qui s’est déroulé sur Face de Bouc suite à la parution de cet article signé Daniel Lequin et paru sur RDS.ca. En gros, monsieur Lequin nous raconte qu’il est contre la pratique de cette discipline car elle provoque un stress immense sur l’organisme et en conséquence, les ultramarathoniens en seront inévitablement réduits à jouer au poker s’ils poursuivent la pratique d’une telle activité. Et pour appuyer ses dires, il cite Pierre Lavoie qui a récemment déclaré : « Je ne ferai jamais d’ultra marathon parce que j’ai l’intention de courir toute ma vie».  Ha si Pierre Lavoie le dit, c’est que ça doit être vrai, non ?

Avec tout le respect que j’ai pour l’homme et l’athlète, je dois dire que malheureusement, il est dans le champ. L’argumentation qu’on retrouve dans cet article est d’une faiblesse déconcertante et laisse entrevoir hors de tout doute que ces messieurs ne connaissent absolument rien en quoi consiste un ultramarathon. C’est Joan qui a le mieux résumé ce que je pense à ce sujet, alors je lui laisse la parole ici :

« Mes parents sont professeurs d’éducation physique et cela ne les empêche pas de n’y rien connaître aux ultra-marathons. Qui dit activité marginale, dit incompréhension et idées reçues.

Dans le cas de Pierre Lavoie, c’est la même chose. Ce n’est pas parce qu’il est un athlète de haut niveau qu’il s’y connait spécifiquement en ultra-marathons en sentiers. Il fait même l’erreur d’appliquer son expérience à un sport qui n’a de commun avec le marathon sur route que l’utilisation de ses deux jambes pour se déplacer.

De ma propre expérience en ultra, puisque moi j’en ai, j’ai constaté strictement l’inverse dernièrement: j’ai eu la chance de voir passer l’ensemble des participants à un ravitaillement lors d’un 100-Mile aux États-Unis. J’ai vu de tout: hommes et femmes, jeunes et vieux, grands et petits, minces ou gros, lents et rapides, débutants et confirmés. Et quand je dis coureur confirmé, certains participent à des ultras (de 160km) depuis plus de 20 ans.

D’accord, ma petite histoire n’est pas scientifique, mais citer en exemple un unique ami qui a mal aux genoux, c’est aberrant comme démonstration! Mon père me faisait le même genre de remarques en allant chercher l’anecdote rarissime qui allait dans le sens de ses peurs. Pour lui, c’était le risque cardiaque, et il arrivait toujours à me trouver l’exemple d’un ami d’un ami qui avait eu un truc après avoir couru.

Autre remarque: ce texte commet la même erreur que bien du monde, celle de vouloir qu’il y ait une limite absolue à la distance qu’il est raisonnable de parcourir. C’est un non-sens puisque les limites sont hautement personnelles et n’ont justement rien d’absolu. Pour certains, courir 5 km sera le maximum souhaitable, pour d’autres, seule la traversée d’un continent saura les épuiser.

L’absolu n’existe pas, il appartient à chacun de trouver ses limites sans juger ni se comparer aux autres. »

Voilà. CQFD comme on disait à l’université.

Autre sujet, beaucoup plus positif à mon avis, est ce qui s’est passé cette fin de semaine dans le monde de la course en sentiers. En effet, c’est ce samedi qu’avaient lieu deux épreuves d’importance de ce côté-ci de l’Atlantique, soient la Transmartinique (138 km) et le North Face Endurance Challenge – California (50 miles).

J’ai suivi avec beaucoup d’attention ces deux épreuves et force est d’admettre que je ne me trompais guère récemment lorsque j’affirmais que le Québec, malgré le fait que la pratique de la course en sentiers y soit encore à l’état embryonnaire, se présente de plus en plus comme une force dans le domaine.

Tout d’abord, les représentants de la Belle Province se sont emparé de 3 des 50 premières positions à San Francisco, malgré la présence d’un très fort contingent de coureurs provenant de l’ouest américain.

C’est toutefois à la Transmartinique que nos compatriotes se sont le plus illustrés. En effet, malgré des conditions chaudes et humides qui sont totalement à l’opposé de ce à quoi nous sommes habitués ces derniers temps, nos compatriotes ont pris 3 places dans le top 10, dont une extraordinaire 2e position par Florent Bouguin. Éric Breton a terminé 9e et Joan, ex-aequo 10e.

Pour citer un coureur américain : « You Quebecers are fucking tough ! ». En ultra, c’est drôlement pratique…  🙂

Bravo les gars, on est vraiment fiers de vous !

Mon prochain article ne devrait par tarder et, contrairement à mes habitudes, parlera d’une épreuve beaucoup plus courte en distance… mais tellement divertissante !  À suivre.

 

« Courir, ce n’est pas bon pour les genoux… »

On me la sort régulièrement. Récemment, en l’espace de seulement quelques jours, on me l’a sortie deux fois. Presque à chaque fois, ça vient de la bouche de gens sédentaires, qui ne font pour ainsi dire aucune espèce d’activité physique. Ça se présente sous quelques variantes du style: «Courir, ce n’est pas bon pour les genoux » ou « Dans 10 ans, tu vas être dû pour un beau remplacement de hanche ». Si vous courez, vous en avez certainement déjà entendu des centaines dans la même lignée.

Au début, je me disais qu’ils avaient peut-être raison, que je devrais faire attention.  Puis je me suis mis à penser : combien d’anciens coureurs de haut niveau voient leur qualité de vie diminuée par des articulations douloureuses ou ont dû subir un remplacement quelconque ?  Combien ?  Aucun nom ne me venait en tête. Plusieurs vedettes des années 80 courent encore aujourd’hui: Alberto Salazar, Joan Samuelson, Jacqueline Gareau, les sœur Puntous. Même les légendes des années 70 Bill Rodgers et Frank Shorter lacent régulièrement leurs souliers de course, malgré le fait qu’ils se dirigent vers la fin de la soixantaine. Et que dire des ultramarathoniens Dean Karnazes, Pam Reed ou Marshall Ulrich, pour ne nommer que ceux-là ?

J’ai fait quelques recherches dans le but de trouver les traces d’une étude qui pourrait le moindrement confirmer ce que les gens avancent. Rien. Au contraire, je suis tombé sur des articles comme ceux-ci qui justement, contredisent ces merveilleux préjugés.

Ce qui explique que maintenant, j’avoue que ces phrases-là commencent à me gosser sérieusement. Ça fait des années et des années que les études ont confirmé ce que les gens savaient déjà: la sédentarité, le surpoids et évidemment, le tabagisme, sont de véritables fléaux qui contribuent à diminuer considérablement l’espérance et la qualité de vie de la population (l’alcool ?  Naaaaaah !  ;-)).

Et pourtant, je ne me permets jamais de passer de commentaires déplaisants du genre : «Tu es en train de te scrapper la santé» quand je rencontre quelqu’un qui transporte un gros surpoids ou qui fume.  Même si ce que j’avancerais est totalement vrai, contrairement aux mythes et légendes urbaines que le monde se plait (ou devrais-je dire, se complait) à répéter. Je laisse les gens vivre leur vie comme ils l’entendent, pour la simple et bonne raison que ça ne me regarde pas.

Alors pourquoi, en retour, certaines de ces mêmes personnes (ça demeure une minorité) se permettent-elles des remarques qui sont à la fois intrusives dans ma vie privée tout en étant totalement fausses ?  Est-ce par une espèce de culpabilité ?  Vous imaginez la tête qu’ils feraient si je leur répondais en faisant allusion à leur propre style de vie ?  Pour quel genre d’air bête je passerais, vous pensez ?  Et pourtant, c’est quoi la différence ?

Bref, je ne comprends pas ce comportement. Quelqu’un a une explication ?

Une sagesse qui va rapporter ?

En fin de semaine, ma douce moitié m’a laissé entendre que je n’écrivais plus aussi souvent qu’avant. Bon, Madame me réclame maintenant !  😉  Je lui ai fait comprendre qu’en février, il ne se passait pas grand chose côté course/entrainement et que je risquerais de me mettre à radoter si je devais encore une fois aborder le sujet de la course hivernale, même si ça demeure une source intarissable de chiâlage de ma part.

Petite anecdote cependant. Ma belle-maman a un peu freaké en lisant le blogue de Pat, se demandant si j’ambitionnais moi aussi de faire l’UTMB un jour. Ben, heu… oui, pourquoi pas ?  L’UTMB, c’est le Marathon de Boston de la course en sentiers, ce serait cool de pouvoir dire que j’ai fait les deux, non ?  Mais bon, une étape à la fois. Tout d’abord, une bonne base d’ultras plus courts (ok, moins longs): 60k, 80k (50M), 100k, etc. Puis des 100 milles, pour voir si je suis capable, si j’ai bien appris et si j’aime ça (je sais que je vais aimer, je suis nono de même). Chaque chose en son temps.

En attendant, ça fait 2-3 semaines que je traine un malaise à la hanche gauche. Rien de bien grave, pas assez pour m’empêcher de courir en tout cas. Je commence à boitiller dans les heures qui suivent la course, puis ça se replace tranquillement… pour revenir après la sortie suivante. Quand je cours, je ne ressens rien.

Sauf dimanche, où ça a pris un bon 7-8 kilomètres avant que ça se réchauffe assez pour que je n’y pense plus. Des intervalles la veille d’une longue sortie, ce n’est peut-être pas l’idée du siècle, je l’accorde. J’ai commencé à me rendre compte que ma foulée en était affectée. Préoccupant. Ajoutez à ça un tendon extérieur du genou gauche qui s’est mis à émettre des plaintes lui aussi autour du 30e kilomètre de ma sortie dans les rues de ma petite ville (en passant, je commence à vraiment en avoir ras le pompon de virailler dans les rues; je suis tanné de l’hiver, vous en avais-je déjà parlé ?)

Bref, j’ai eu un éclair de sagesse et ai pensé laisser à ma vieille carcasse la chance de récupérer un peu: j’ai décidé hier de “sauter” ma sortie de vitesse prévue aujourd’hui. Décision qui n’a pas été facile à maintenir car la hanche ne dit presque plus rien et le genou jase encore moins. J’essaie de voir ce repos pas tellement forcé comme un investissement.

J’espère qu’il être payant…

Une année en dents de scie

Les rétrospectives, c’est une tradition à ce temps-ci de l’année. Je l’ai fait l’an passé, alors pourquoi ne pas remettre ça cette année ?  Pour moi, l’année 2013 a été synonyme de hauts de de bas, mais à la fin, une chose demeure: la course à pied est une véritable passion que je désire continuer à partager avec vous, fidèles lecteurs.

Voici donc l’année résumée en quelques thèmes.

La consécration. Hopkinton, le 15 avril, 9h55. J’étais dans mon couloir, attendant le départ du Marathon de Boston. Le plus ancien et le plus prestigieux marathon de la planète. Après des années de travail acharné, j’y étais enfin. À ce moment, j’ai éprouvé un très grand sentiment de fierté, probablement ce qu’un athlète de haut niveau peut vivre quand il se retrouve à la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques. C’était à la fois simple et magique, je vais m’en rappeler le restant de mes jours.

Mauvaise évaluation. J’ai carrément sous-estimé la difficulté du parcours. Je me disais que je suis un ultrarunner, que les côtes de moumounes comme sur le parcours nous amenant à Boston, ça ne pouvait jamais être si difficile que ça… J’en ai payé le prix. Dans les dernières encablures de la Heartbreak Hill, j’ai crampé. Les 8 derniers kilomètres ont été infernaux.

L’horreur. J’étais arrivé depuis un bon bout de temps. Nous avions quitté les lieux et étions probablement en train de débarquer du métro quand les bombes placées près de l’arrivée ont explosé. Mais l’horreur des événements nous a tous touchés. À l’hôtel, les gens étaient en état de choc, personne ne parlait plus de rien d’autre. La question sur toutes les lèvres: pourquoi ?

La résilience. Celle des coureurs qui retourneront car ils refusent de se laisser intimider. Je fais partie de ceux-là. Celle de la merveilleuse ville de Boston qui a décidé elle aussi de se tenir debout devant l’adversité et de faire un pied-de-nez à ceux qui voudraient lui faire peur. Je ne suis pas un amateur de hockey, mais ce qui s’est passé deux jours plus tard avant le match des Bruins m’a donné les frissons.

La vague. Celle d’amour qui a déferlé de partout. Nos amis, notre parenté, nos collègues. Des personnes avec qui nous n’avions pas eu de contact depuis des années se sont inquiétées pour nous et nous ont demandé, nous ont ordonné même de leur confirmer que nous allions bien. Rien ne m’a jamais fait autant chaud au cœur. Merci à tous, encore une fois !

La bouette. St-Donat, le 29 juin. Le printemps avait été pluvieux, il venait de tomber une trentaine de millimètres de pluie. Devant nous, 58 kilomètres de sentiers. Un parcours déjà considéré comme difficile à la base avait été transformé en véritable soue à cochons. De l’eau jusqu’aux épaules dans la rivière, une traversée interminable du « Vietnam », des descentes impossibles à négocier. À maintes reprises, je me suis promis que « plus jamais ». Et pourtant, j’ai eu du plaisir et serai fort probablement de retour. Faut croire que je suis maso. Ce vidéo de Michel Caron qui a terminé une vingtaine de minutes avant moi est une véritable pièce d’anthologie.

LA blessure. Elle s’est manifestée au lendemain de la tragédie à Lac-Mégantic (question de me donner un peu de perspective). Une semaine plus tard, j’étais sur la liste des blessés. Ça a duré des semaines. Des semaines d’enfer au cours desquelles j’ai dû annuler ma participation à deux courses que je voulais vraiment faire cette année: le 65k du XC Harricana et le Vermont 50.

L’ostéo. Son prénom: Marie-Ève. Sa discipline: l’ostéopathie. Je ne connaissais pas ça, mais on m’avait fait plusieurs suggestions en ce sens, alors je me suis dit que j’essaierais. Elle a sauvé ma fin de saison, un point c’est tout. Sans elle, je ne serais pas allé à New York. Chaque sou que j’ai investi dans ses traitements a été un sou bien investi. Elle me chargerait le double du prix que j’y retournerais sans hésiter.

Lake Placid. Coup de cœur ou coup de foudre ?  Le beau temps a certainement aidé, mais nous sommes tombés sous le charme de cette petite ville du nord de l’état de New York. Là-bas, le sport et le plein-air sont rois. Des montagnes, des sentiers de randonnée, des routes dans un état impeccable… Nous nous promettons évidemment d’y retourner prochainement. Très prochainement.

Le plus bel entrainement. XC Harricana, le 7 septembre. Mon genou m’ayant empêché de m’entrainer convenablement, j’ai troqué le 65k pour le 28k avec dans l’idée de le faire comme un entrainement. Un vrai entrainement là, pas le moment de me tuer à l’ouvrage. Ça a été ma sortie la plus plaisante depuis le Vermont 50 2012. J’ai eu un plaisir inégalé dans la montée du mont Grand-Fonds, les sentiers de quads, la montée de la montagne Noire et tout le reste. Une course à l’organisation impeccable, des sentiers très bien marqués, une super belle expérience avec à la clé, une 15e place complètement inattendue. À répéter un jour, c’est certain.

La bonne décision. À la fin septembre, lors d’un entrainement, ma tendinite au genou est revenue. Je me suis tout de suite arrêté et dans la journée, ai contacté mon ostéo qui a réussi à me traiter dès le lendemain. Quatre jours plus tard, je reprenais l’entrainement. Nous coureurs avons l’habitude d’ignorer les signes que nous envoie notre corps jusqu’à ce que ça devienne insupportable. Ce jour-là, j’ai pris une bonne décision et ça a payé. Je devrais faire ça plus souvent…

Le plaisir entre amis. Mont Orford, le 19 octobre. Des conditions parfaites, une course que je faisais avec des amis dans un endroit superbe. Et beaucoup, beaucoup de plaisir. J’adore accompagner des amis dans une course, même si parfois je me sens un peu inutile. Pour 2014, j’ai déjà deux « accompagnements » de prévus. Et j’ai hâte.

La Grosse Pomme. New York. Ça faisait des années que j’y rêvais. Pas pour les mêmes raisons que Boston où il faut se qualifier. Ha, on peut aussi se qualifier pour New York, mais les standards sont vraiment trop stricts pour moi. J’ai donc dû passer par la loterie et attendre 3 ans avant de pouvoir faire partie du contingent de coureurs qui s’élanceraient du Verrezano-Narrows Bridge en direction de Central Park.

Des spectateurs par centaines de milliers tout au long du parcours, une organisation extraordinaire à la hauteur de cette ville qui n’a pas d’égale à travers le monde. Une expérience unique que je recommande fortement à tout le monde qui en a la chance.

À la fin, un deuxième meilleur temps à vie sur un parcours difficile et la tête remplie de souvenirs.

Pour 2014. Beaucoup de belles courses en vue. Un premier 100 km, peut-être un premier 100 milles. Va définitivement falloir que les genoux et le sciatique se tiennent à carreau !  🙂

Sur ce, un très joyeux Noël à tous ! 🙂

Les petites vites

De retour après quelques jours assez occupés. Voici ce qui a retenu mon attention ces derniers temps.

Virgil Crest Ultras – Ça fait 10 jours que la course a eu lieu et je n’ai pas eu l’occasion d’en parler. Pourtant, durant la fin de semaine du Marathon de Montréal, mes pensées étaient non pas ici, mais bien dans un coin perdu de l’état de New York. Comme le temps était frais et pluvieux par chez nous, je me disais que ça devait être la même chose là-bas. En plus, avec le principe du double aller-retour pour le 100 milles, pas difficile d’imaginer que l’état des sentiers devait se détériorer à vue d’oeil à mesure que la journée (et la nuit) avançait.

Nous étions en mode “ménage” à la maison, car nous avions fait des rénos et elles étaient terminées. Est-ce qu’il y a une meilleure façon d’avoir la tête ailleurs que faire du ménage ?  J’en étais pathétique: j’allais voir les mises à jour sur le site de l’événement aux 30 minutes, question de suivre l’évolution de nos coureurs québécois. J’ai vite constaté, à voir les temps de passage, que certains d’entre eux couraient ensemble.

La course a été difficile. Très difficile. Sur 66 au départ du 100 milles, ils étaient seulement 18 à l’arrivée. Plusieurs se sont arrêtés à la mi-parcours, obtenant ainsi un classement officiel pour la course de 50 milles qui se déroulait en même temps. Le gagnant, James Blandford, est un habitué des courses dures: c’est lui qui a remporté le Massanutten en mai. Les Québécois ne sont pas demeurés en reste. Joan a terminé en excellente 3e position; son récit de course est du bonbon, à ne pas manquer (me croirez-vous si je vous dis qu’il est rentré au travail en courant deux jours plus tard ?!?  T’es une machine, Joan !). Le toujours souriant Pierre Lequient a quant à lui fini 4e et Pierre Arcand, 6e. Quant à Pat, il s’est arrêté après une soixantaine de milles. Il nous raconte son expérience ici. Cette lecture m’a beaucoup fait réfléchir.

Record du monde à Berlin – Berlin a la réputation d’être un marathon ultra-rapide. Je ne sais pas ce qui se passe là-bas, mais les records du monde y tombent comme des mouches. Je suppose que le parcours est très plat, mais il y a certainement autre chose. Est-ce le climat ?  Le bitume ?  Le fait que les pacers engagés par l’organisation sont de très haut niveau ?

En tout cas, le Kenyan Wilson Kipsang y a réussi dimanche une course parfaite et a fait éclater le record du monde: 2:03:23, soit 15 secondes de mieux que l’ancien record de Patrick Makau. Kipsang est un coureur établi qui avait failli s’emparer du record en 2011 en faisant 2:03:42 à Francfort. Gagnant à Londres en 2012, il avait raté sa chance aux Jeux olympiques trois mois plus tard: il était l’un des deux Kenyans à s’être fait jouer un vilain tour par l’Ougandais Stephen Kiprotich dans les derniers kilomètres.

À Berlin, il a réussi une course parfaite. Se tenant à l’arrière du peloton de tête amené avec vigueur par deux pacers de très haut calibre, il a conservé un rythme constant du début à la fin. En effet, ses splits sur 5 km ont varié de 14:27 à 14:48 (non mais, comment ils font pour aller à une telle vitesse bout de sacrament ?!?). Du grand art.

Seul bémol: un tata qui a décidé de faire une pub pour un site de prostitution et qui a réussi à se faufiler pour franchir le fil d’arrivée juste devant Kipsang. Donc, pas de photo d’arrivée triomphale pour le nouveau recordman du monde. Dommage.

Record de parcours au Vermont 50 – Celle-là m’a fait énormément plaisir. Ma course préférée, à laquelle je ne pouvais pas participer alors qu’il faisait un temps splendide, a été remportée par David Le Porho. Le sympathique David a donné une véritable leçon de course à Brian Rusiecki, le vainqueur de l’année passée, en établissant un record du parcours (6:09:31 !) et laissant ce dernier 24 pleines minutes derrière lui.

Au cours d’une conférence à laquelle j’ai assisté récemment, David a dit être en préparation pour sa première course de 100 milles. La course visée ?  Le Western States 100, rien de moins. Comme il est très rapide (il a fait 2h21 sur marathon cet été) et qu’il n’est pas du genre à s’embarquer dans un projet à la légère, je ne parierais pas contre lui. Je pense que les chances qu’on le voit à St-Donat l’an prochain sont plutôt minces. 😉

En début de saison, j’ambitionnais de compétitionner avec les meilleures femmes lors du VT50. En effet, Amy Rusiecki (oui, la femme de l’autre) avait gagné en 8h18 l’an passé, soit 24 minutes de mieux que moi. Je me disais qu’avec un entrainement plus poussé en côtes et une meilleure gestion des ravitaillements, peut-être que… Or cette année, elle est descendue sous les 8 heures… mais ce n’est pas elle qui a gagné. C’est plutôt Aliza Lapierre qui a fait un temps-canon de 7:01:08.  Définitivement que j’aurais eu à réviser mes ambitions à la baisse !

Augmentation des mesures de sécurité à New York – Ça fait des semaines que les New York Road Runners m’envoyaient des courriels de schnoutte. De la pub pour leurs autres courses, des promos à la noix, des sondages, etc. Puis est arrivé le courriel que nous attendions en espérant ne jamais le recevoir: celui à propos des nouvelles mesures de sécurité.

On voit immédiatement les effets post-Boston 2013. En gros, on nous dit que tous les sacs à dos risquent d’être fouillés, que les spectateurs doivent se préparer à de longues files d’attente, que l’aire des retrouvailles risque d’être très difficile d’accès et qu’il serait préférable de donner rendez-vous à ses proches ailleurs (ha oui, où ça ?  À la Statue de la Liberté ?). À ça s’ajoute une longue liste d’articles qu’il sera interdit pour nous coureurs de transporter. Il y en a des évidents: couteaux, armes-qui-n’en-sont-pas-mais-qui-pourraient-l’être (genre un marteau), armes à feu (duh !), etc. Mais il y a aussi des articles qui pourraient être utiles en course qui seront interdits. Les vestes d’hydratation, par exemple. Honnêtement, celle-là me dérange un peu plus car j’avais jonglé avec l’idée d’utiliser la mienne au lieu de ma ceinture. Maintenant, comme il y a des points d’eau à chaque mille, je pense sérieusement à faire comme tout le monde: courir avec rien. Ce serait une première pour moi.

Mais malgré toutes ces belles précautions, dans ce genre d’événement, on ne peut pas tout prévoir. Juste à voir comment un nono a réussi à s’infiltrer en fin de parcours à Berlin…

Pendant ce temps-là, du côté du blessé… – Le Grand Blessé a reçu son traitement d’ostéo vendredi dernier. Toujours le même problème: mes muscles sont trop contractés, alors les tendons sont sollicités en permanence. Et les douleurs finissent par se pointer…

Le remède ?  Repos (pas facile !), étirements (ça semble marcher) et massages. Suite au traitement, j’ai reçu l’ordre de me reposer au moins 48 heures, le temps que ses manipulations fassent effet. Pour une fois, j’ai écouté, me contentant de marches comme exercice durant la fin de semaine. Puis lundi, à vélo, je suis parti pour la première fois sans ma Garmin, question de mettre toutes les chances de mon côté pour y aller vraiment mollo. Car je me connais, quand je vois une vitesse affichée qui ne fait pas mon affaire, je pousse toujours un petit peu…

Mardi, retour à la course. Encore là, relaxe: 15 km que j’ai faits à 4:25/km de moyenne pour entrer au travail. Les genoux ont tenu le coup, mais ça faisait vraiment bizarre de terminer avec un sentiment du style “il me semble que j’aurais pu aller pas mal plus vite…”. Pas habitué à ça, le monsieur. Aujourd’hui, c’était encore le mollo-vélo et demain, un autre 15 km. En espérant que ça tienne encore…

Le gros mot à trois syllabes

Quand il est émotif, et ça lui arrive souvent, il arrive que l’être humain moyen fasse usage de jurons. Bizarrement, le répertoire utilisé varie d’un peuple à un autre. Pour les anglophones, la grande majorité des gros mots sont reliés au sexe. Pour nous Québécois qui jadis avons tant été contrôlés par l’Église catholique, la tendance est à faire le ménage du lieu de culte local quand nous sommes fâchés. La plupart du temps, nous nous contentons d’utiliser les mots à une, maximum deux syllabes pour nous exprimer. Mais il y en un, un vrai, qu’on sort seulement pour les grandes occasions. Parce qu’il est long à dire: trois syllabes et que lorsqu’on s’en sert, c’est parce que on vraiment en…

Le soleil se levait à peine hier matin quand il a retenti sur le bord du fleuve, dans mon petit patelin de banlieue. Et vous l’aurez deviné, le grossier personnage qui a osé s’époumoner ainsi, c’était moi. Mon genou droit venait de me jouer exactement la même chanson que son confrère de gauche m’avait jouée en juillet: le coup de la corde de violon. Parce que c’est comme ça que je le sens quand ça arrive: on dirait qu’un de mes tendons derrière le genou est tellement tendu (il me semble que c’est justement le propre d’un tendon d’être tendu, non ?) qu’il m’envoie une note ultra aiguë qui traverse mon système nerveux à vive allure et se retrouve à mon cerveau en moins de deux. Aussitôt, la douleur est si vive que je dois m’arrêter. Et le juron sort tout seul. Blessé à 5 semaines de New York, tab… !!!

Évidemment, j’avais reçu des signes bien avant. Les premiers, c’était pendant que je faisais du vélo avant même que je recommence à courir, au début août. Mais un coureur, ça réussit toujours à se trouver des raisons, à se convaincre que mais non, ce n’est pas ça. Cette fois-là, je me disais que c’était parce que ma jambe droite travaillait trop pour compenser pour la gauche et que tout rentrerait dans l’ordre une fois la gauche guéri. Bien sûr.

Quand j’ai repris la course, comme j’allais lentement et faisais des distances plus courtes, le genou droit se tenait effectivement tranquille. Puis, avec les semaines et l’augmentation de volume, les signes ont commencé à réapparaitre, petit à petit. Au début, je portais un protecteur seulement sur le genou gauche. Puis, quand j’allais en montagne, j’en mettais sur les deux. Depuis deux semaines, je portais un protecteur sur chaque genou à toutes les fois que je courais. Mais non, je n’avais pas de problème…

Contrairement à la première fois, je me suis tout de suite arrêté et suis retourné à la maison en marchant. Je ne me suis pas bourré d’Advil pour continuer malgré tout et ai immédiatement lancé un appel à l’aide à Marie-Ève, l’ostéo qui m’avait remis sur pieds cet été. Par chance, j’ai réussi à avoir un rendez-vous pour cet après-midi. À partir de là, j’aviserai.

Toutefois, une réflexion s’impose pour le long terme. J’aime, j’adore courir, alors je ne veux certainement pas arrêter. Je vais cependant avoir à changer des choses dans mon entrainement. Par exemple, devrais-je améliorer ma routine d’échauffement ?  Courir plus souvent et moins longtemps ?  Consulter un entraineur peut-être ?  Pierre Lequient, un marathonien de mon calibre qui s’est lancé dans les ultras depuis peu a eu une saison de rêve cette année après en avoir engagé un… Peut-être aurais-je besoin de me faire masser ?  Mes blessures sont causées par des muscles qui sont trop contractés et il semblerait que les étirements que je fais religieusement ne sont pas suffisants pour les faire relâcher.

Bref, bien des choses à envisager. Mais après New York !